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La proposition de la Commission d’introduire à l’échelle de l’UE une taxe sur les transactions financières a fait l’objet d’un débat animé au Conseil ECOFIN
Le paquet sur la gouvernance économique devrait entrer en vigueur à la mi-décembre 2011
08-11-2011


Réunis à Bruxelles le 8 novembre 2011 pour un Conseil ECOFIN, les ministres des Finances de l’UE ont tenu une longue réunion au cours de laquelle Luc Frieden a représenté le Luxembourg.

Alors que la question de l’introduction d’une taxe sur les transactions financières n’apparaît qu’en filigrane dans la déclaration finale du sommet du G20 qui s’est tenu à Cannes les 3 et 4 novembre 2011, les pays représentés n’ayant visiblement pas trouvé de consensus sur le sujet, les ministres des Finances de l’UE ont eu un premier débat sur la proposition de la Commission faite le 28 septembre 2011 d’introduire une telle taxe à l’échelle de l’UE qui prendrait effet au 1er janvier 2014. Fin juin, en présentant sa proposition de cadre financier pluriannuel pour 2014-2020, la Commission avait par ailleurs annoncé qu'elle proposerait l'établissement d'une taxe sur les transactions financières en tant que ressource propre du budget de l'UE.

Comme l’a résumé le ministre polonais des Finances, Jan Rostowski, qui assurait la présidence de la réunion, la discussion publique, qui fut "franche et ouverte", a révélé "la diversité des vues sur le sujet". Autant dire qu’un consensus sera difficile à trouver sur un sujet qui requiert l’unanimité. Les groupes de travail vont donc étudier la proposition plus avant.

Certains pays, Royaume-Uni et Suède en tête, ont marqué leur opposition à cette proposition. Cette taxe "est un moyen très efficace de réduire la croissance économique", a ainsi ironisé le ministre suédois des Finances, Anders Borg. D'autres pays européens non membres de la zone euro, comme la Pologne, se disent favorable à ce mécanisme, à condition qu'il soit appliqué au niveau mondial.

Mais pour le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, "l'argument selon lequel on ne peut faire qu'une taxe à l'échelle mondiale est un argument pour ne rien faire". "On peut être les précurseurs", et si on n'y arrive pas en Europe, "peut-être dans la zone euro" et ses dix-sept pays, a-t-il insisté. Il a cependant demandé aux 10 pays européens qui ne font pas partie de l'Union monétaire de "bien réfléchir" à leur position. "L'idée est de ne pas creuser le fossé qui existe déjà entre les 17 et les 27", a-t-il fait valoir. D'autres sont prêts, comme lui, à aller de l'avant au sein de la seule zone euro. "L'Autriche est favorable à une taxe sur les transactions financières. Et je suis aussi favorable à ce que nous l'introduisions au moins dans la zone euro", a déclaré la ministre autrichienne des Finances, Maria Fekter. Son collègue belge Didier Reynders a défendu la même stratégie.

S’il doit y avoir une taxe européenne, il faut qu’elle soit "européenne dans son champ d’application géographique, dans ses produits et dans son affectation", estime Luc Frieden

S’il dit "comprendre l’importance politique" de ce sujet et s’il reconnaît que "nos opinions publiques exigent que chacun contribue au coût de la crise, et donc aussi les établissements financiers", Luc Frieden estime pour sa part qu’un certain nombre de questions méritent d’être éclaircies. "S’il y avait un tableau de vote aujourd’hui, le Luxembourg ne donnerait non pas un feu rouge, non pas un feu vert, mais un feu orange", a résumé le ministre des Finances du Grand-Duché.Luc Frieden en discussion avec Klaus Tschutscher lors de la réunion des ministres des Finances de l'UE le 8 novembre 2011 (c) Conseil de l'UE

La première question qui se pose selon lui, c’est de savoir qui va payer cette taxe. Car, note Luc Frieden, bien souvent, en fin de compte, c’est le client de la banque qui paye les taxes sur les transactions. Et si ce n’étaient pas les clients, mais bien les établissements financiers qui devaient payer, Luc Frieden relève une difficulté de timing. Les ministres des Finances ont en effet eu le matin même un débat sur la recapitalisation des banques, exprimant le souhait que les banques cherchent, si possible, les fonds nécessaires pour répondre aux exigences en termes de fonds propres auprès de leurs actionnaires. Pour Luc Frieden, imposer de nouvelles exigences aux établissements financiers par le biais d’une taxe sur les transactions financières au même moment pourrait poser problème, au moins à court terme, à certains établissements.

Luc Frieden a aussi pointé du doigt la question du champ d’application géographique de cette taxe. Il se dit "étonné que le G20 n’ait pas pu obtenir de solution à cet égard" et observe que si "les plus grands centres financiers du monde, en majorité, s’opposent à cette taxe, l’Europe doit faire très attention". Selon le ministre luxembourgeois, si on réduit le champ d’application géographique d’une telle taxe, le risque de délocalisation des transactions financières taxées sera d’autant plus grand pour les pays qui l’introduiront. Luc Frieden, qui souhaiterait que cette dimension soit dûment prise en compte, plaide donc pour que le champ d’application géographique d’une taxe sur les transactions financières soit aussi large que possible et pour que tous les grands centres financiers qui jouent un rôle dans les transactions financières internationales appliquent la même taxe.

Luc Frieden juge enfin essentielle la question de l’affectation d’une telle taxe. "Si nous voulons plaider en tant qu’Europe pour une taxe commune portant sur les opérations transfrontalières, je soutiens la démarche de la Commission qui vise à ce que ce soit une ressource pour le budget de l’UE", a indiqué Luc Frieden. En bref, s’il doit y avoir une taxe européenne, Luc Frieden estime qu’il faut qu’elle soit "européenne dans son champ d’application géographique, dans ses produits et dans son affectation".

Le paquet sur la gouvernance économique devrait entrer en vigueur aux alentours de la mi-décembre 2011

Les ministres avaient aussi au programme de leurs discussions la proposition de la Commission sur la taxation de l’énergie. Un projet contesté dès sa présentation en avril dernier. Au vu du désaccord qui existe sur le sujet, la présidence a décidé d’annuler la discussion qui devait avoir lieu, invitant le groupe de travail à mener un travail détaillé, mais aussi "pratique et réaliste", sur la proposition de la Commission.

Au menu des ministres, le suivi des décisions des sommets du 23 octobre et du 26 octobre 2011, notamment en ce qui concerne la recapitalisation des banques requises dans les conclusions. Les ministres ont ainsi été informés du travail entrepris par la Commission, l’EBA, la BEI et la BCE pour établir une approche coordonnée au niveau européen en matière de financement à terme. Plusieurs options de mécanismes de garanties sont à l’étude. Pour Luc Frieden, il convient d’aller plus loin qu’en 2008 et d’avoir un point d’entrée unique donnant un plus grand role à l’Autorité bancaire européenne (EBA) et à la Commission européenne.  

Enfin, à la suite de l’accord trouvé début octobre, les ministres ont donné leur accord formel aux textes constituant le fameux "six pack", le paquet sur la gouvernance économique qui devrait entrer en vigueur aux alentours de la mi-décembre 2011. Et les ministres ont d’ores et déjà débattu des indicateurs qui seront pris en compte dans le cadre de la surveillance des déséquilibres macro-économiques que va mener la Commission dans ce cadre.