Prévu à l’origine le 17 octobre 2011, le Conseil européen d’automne avait été reporté au 23 octobre 2011 afin de "permettre la mise au point de la stratégie globale face à la crise de la dette souveraine dans la zone euro".
Le 23 octobre 2011, un Conseil européen devait réunir les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE, suivi d’une réunion de ceux de la zone euro, deux réunions auxquelles participait le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker.
Afin de les préparer, des réunions de l’Eurogroupe, de l’Ecofin et du Conseil Affaires générales ont aussi été convoquées pour le week-end.
Jean-Claude Juncker a participé, en tant que président de l’Eurogroupe, aux réunions des ministres des Finances, tandis que Luc Frieden y représentait le Luxembourg. Jean Asselborn a pour sa part participé au Conseil Affaires générales.
Les réunions bilatérales n’ont pas manqué non plus, les rencontres entre Angela Merkel et Nicolas Sarkozy ayant eu notamment une grande visibilité.
Le vendredi 21 octobre, le président du Conseil européen annonçait que le sommet se ferait en deux étapes et qu’une nouvelle réunion des chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro serait convoquée le mercredi 26 octobre pour finaliser un accord.
A son arrivée à Bruxelles le 21 octobre 2011, Jean-Claude Juncker confiait à la presse qu’il aurait "préféré que nous n'ayons pas eu besoin de deux rendez-vous, dimanche et mercredi, et que nous ayons pu nous mettre d'accord sur une solution globale dimanche". "Nous ne donnons pas vraiment l'exemple éclatant d'un leadership qui fonctionne bien", commentait-il, jugeant que "l'impact à l'extérieur est désastreux" pour l'Europe. "Il va nous falloir nous mettre d'accord prochainement sur la manière dont nous pourrons améliorer le regard que les autres portent sur nous", a-t-il dit.
S’ils ont évoqué dans leurs discussions nombre de sujets qui doivent encore être approfondis par les chefs d’Etat et de gouvernement, les ministres des Finances de la zone euro ont cependant décidé de donner leur feu vert au versement de la prochaine tranche de l’aide à la Grèce, la sixième depuis l'accord du mois de mai 2010.
Les ministres ont en effet pu examiner les fruits de la cinquième évaluation menée par la troïka dont l’avis, attendu, avait été rendu le 11 octobre 2011. Ils constatent que la situation macroéconomique s’est détériorée depuis la 4e évaluation et que les défis économiques restent grands. Mais ils saluent les efforts substantiels de consolidation budgétaire entrepris par le gouvernement grec qui devrait, selon le communiqué de l’Eurogroupe, lui permettre d’atteindre les objectifs fixés pour 2012. Les nouvelles mesures approuvées la veille par le parlement grec ont été jugées particulièrement bienvenues par les ministres qui appellent les autorités grecques à poursuivre la mise en œuvre des réformes structurelles et du programme de privatisation.
L'enveloppe, qui atteint un montant de 8 milliards d’euros, est cofinancée par le Fonds monétaire international (FMI) qui doit encore donner son aval, ce qui est prévu pour début novembre. Le versement est prévu dans la première quinzaine de novembre.
Parmi les grands sujets qui ont animé les discussions du Conseil européen, la question des relations entre l’UE des 27 et la zone euro des 17 semble avoir été particulièrement vive. En témoignent les commentaires faits à l’issue de ce sommet par Herman Van Rompuy, qui le présidait. "Je suis tout à fait conscient du caractère sensible des relations entre les 27 et les 17", confiait-il, ajoutant que son intention est d’avoir des échanges de vues au niveau des 27 si possible avant chaque sommet de la zone euro. Et ce sera donc le cas pour commencer dès le mercredi 26 octobre 2011 où un Conseil européen sera convoqué avant la réunion des chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro.
"Le raisonnement est simple", s’est expliqué Herman Van Rompuy : "il est normal que ceux qui partagent une monnaie commune aient à prendre des décisions communes au sujet de cette monnaie", mais, a-t-il ajouté, "il est d’une importance vitale de sauvegarder l’intégrité du marché unique des 27". Il faut donc "maintenir un lien aussi étroit que possible entre ces deux types de prises de décisions, dans un esprit de confiance".
Le sujet est d’ailleurs acté dans les conclusions du Conseil européen qui conviennent "qu'il fallait veiller à la cohérence entre les activités respectives de la zone euro et de l'Union européenne, dans le plein respect de l'intégrité de l'Union européenne dans son ensemble et de son fonctionnement à vingt-sept". "Dans ce contexte, il incombe à la Commission européenne de veiller à ce que l'ensemble des vingt-sept États membres se conforment à la législation de l'UE, y compris celle relative au marché intérieur, et d'assurer des conditions équitables entre tous les États membres, y compris ceux qui ne participent pas à l'euro", est-il précisé.
Il a par ailleurs été décidé dans ce contexte que le président du sommet de la zone euro sera désigné par les chefs d'État ou de gouvernement de la zone euro lors de l'élection du président du Conseil européen et pour un mandat de durée identique. Dans l'attente de cette élection, indiquent les conclusions, les sommets de la zone euro seront présidés par l'actuel président du Conseil européen qui tiendra les États membres ne faisant pas partie de la zone euro étroitement informés de la préparation des sommets ainsi que de leurs résultats.
Le Conseil européen a adopté la décision nommant l’Allemand Jörg Asmussen membre du directoire de la BCE pour un mandat de huit ans à compter du 1er janvier 2012. Il succédera ainsi à Jürgen Stark qui avait annoncé sa démission le 9 septembre dernier et qui restera en poste jusqu’à l’entrée en fonction de son successeur.
De façon plus générale, les chefs d'État et de gouvernement des 27 États-membres de l'Union européenne ont fait le point sur la situation économique en Europe et dans le monde, en se concentrant notamment sur le sujet de la croissance, ainsi que sur la préparation du sommet du G20. En matière de lutte contre le changement climatique, le Conseil européen a rappelé sa volonté d’obtenir un résultat ambitieux et équilibré lors de la conférence de Durban, et a insisté sur l'urgence de se mettre d'accord sur un processus visant à établir un cadre complet juridiquement contraignant, accompagné d'un calendrier clair. Enfin, en matière de politique étrangère, le Conseil européen a été l’occasion de redire que l’UE demeure résolue à apporter son soutien à la transformation démocratique dans les pays de son voisinage méridional.
A l’issue du sommet de la zone euro, Herman Van Rompuy a fait le point sur la stratégie esquissée par les chefs d’Etat et de gouvernement en vue d’un accord le 26 octobre. Cinq fronts ont été identifiés et nécessitent donc des travaux techniques préparatoires.
1. Une action vigoureuse de la part de tous les gouvernements pour assurer la viabilité des finances publiques et renforcer la croissance. "Cela signifie le plein respect des objectifs budgétaires établis et une accélération des réformes structurelles", a indiqué le président du Conseil européen.
Le sujet avait déjà été abord au Conseil européen, et l’Italie a notamment été rappelée à l’ordre. "Demain, je pense convoquer un conseil des ministres parce que je souhaite profiter de cette situation pour voir si on peut faire avancer des mesures que je n'ai pas réussi à mettre en œuvre jusqu'ici en raison de divergences au sein de la majorité", a aussitôt annoncé devant la presse le Premier ministre italien Silvio Berlusconi. Il s’agira pour lui mercredi de "convaincre ses collègues que son pays met pleinement en œuvre les réformes annoncées".
2. Une solution durable pour la Grèce. "Nous continuons de travailler pour nous rapprocher d’une solution avec le secteur privé visant à améliorer la viabilité de la dette grecque, dans le cadre du nouveau plan d’aide à la Grèce", indique Herman Van Rompuy.
A l’issue de l’Eurogroupe du 21 octobre, Jean-Claude Juncker avait expliqué à la presse que les ministres des Finances s’étaient mis d’accord sur la nécessité d’une "augmentation substantielle de la contribution des banques".
L’accord du 21 juillet prévoyait une décote de l’ordre de 21 % et il serait maintenant question de 50 à 60 % ainsi que l’a confirmé le Premier ministre luxembourgeois sur les ondes de RTL le 22 octobre 2011. Les négociations avec les bailleurs privés de la Grèce sont en cours mais Jean-Claude Juncker les a mis en garde. "Les banques doivent savoir que si elles ne font pas d’efforts dans le cadre de ces négociations menées sur une base volontaire, nous devrons peut-être en arriver à une solution obligatoire", a-t-il expliqué, précisant bien que ce n’est pas ce qu’il veut dans la mesure où cela aurait des conséquences pour l’ensemble de la zone euro.
Selon un rapport d'experts qui aurait été remis aux ministres par la troïka des bailleurs des fonds de la Grèce, il faudrait une décote de 50 ou 60 % pour espérer stabiliser la Grèce sans avoir à augmenter dans des proportions gigantesques le montant des prêts internationaux qui lui ont déjà été promis.
3. Un pare-feu suffisant pour éviter la contagion. Il s’agit là de "maximiser les ressources" de l’EFSF sans en étendre ses garanties. Dans ce domaine, plusieurs options sont envisagées.
A l’issue de la réunion de l’Eurogroupe, il semble que deux d’entre elles aient été retenues. L'une propose que l’EFSF agisse comme un système d'assurance partielle de la dette publique de pays en difficulté, l'autre envisage la création d'une sorte de fonds spécial destiné à accueillir des contributions d'investisseurs tiers, et qui pourrait être adossé au Fonds monétaire international.
Herman Van Rompuy, a expliqué que "combinés, ces deux modèles pourraient avoir un effet cumulatif".
4. Restaurer la confiance dans le secteur bancaire européen. Ce point, abordé aussi lors du Conseil européen, fait l’objet d’un accord unanime : la nécessité d’un schéma coordonné de recapitalisation des banques est reconnue par tous. Les chiffres qui circulent tournent autour de 100 milliards d’euros.
Jean-Claude Juncker a rappelé sa position à ce sujet sur les ondes de RTL : les banques devraient dans un premier temps essayer de s’approvisionner en fonds sur les marchés et, si cela ne marche pas, les Etats les recapitaliseront, dans la mesure de leurs moyens. A chaque Etat d’en tirer les conséquences qu’il souhaite. Il ne s’agit en effet pas pour Jean-Claude Juncker de donner simplement aux banques l’argent du contribuable. Il donne ainsi l’exemple des fonds apportés à la Banque générale qui ont permis d’acquérir des droits d’actionnaire. Pour les pays qui manquent de moyens pour recapitaliser leurs banques, Jean-Claude Juncker propose qu’ils s’adressent à l’EFSF.
5. Une meilleure gouvernance et une plus forte intégration de la zone euro. A court terme, indique Herman Van Rompuy, il s’agit d’améliorer l’organisation et de renforcer le monitoring budgétaire et économique. A moyen terme, précise-t-il cela implique une plus forte convergence économique, des mécanismes d’exécution plus forts et une intégration budgétaire plus profonde.
Le Conseil européen a pris note dans ses conclusions "de l'intention des chefs d'État ou de gouvernement de la zone euro de réfléchir aux moyens de renforcer davantage la convergence économique au sein de la zone euro, d'améliorer la discipline budgétaire et d'approfondir l'union économique, y compris en envisageant la possibilité d'apporter des modifications limitées au traité".
Ces modifications éventuelles ont fait l’objet de commentaires assez vifs, notamment de la part du ministre luxembourgeois des Affaires étrangères. Jean Asselborn a mis en garde contre une nouvelle modification des traités jugée nécessaire par l’Allemagne notamment. "Nous devons faire attention à ne pas ouvrir un front de plus" et à ne pas ouvrir une nouvelle "boîte de Pandore", a-t-il déclaré. Selon Jean Asselborn, "il faut d’abord déterminer si nous en avons besoin" et "si nous en avons besoin, nous devons savoir comment le faire".
Le Conseil européen rappelle dans ses conclusions que "toute modification du traité doit être décidée par les vingt-sept États membres". Mais il indique aussi que les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE reviendront sur cette question en décembre sur la base d'un rapport établi par le président du Conseil européen en étroite coopération avec le président de la Commission et le président de l'Eurogroupe.