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Budget de l'Union européenne - Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale - Marché intérieur
Nicolas Schmit, Nicolas Bouzou, Bertrand Mertz et Jo Leinen font des "propositions pragmatiques pour une Europe de la croissance"
12-04-2012


www.mediapart.frDans une tribune publiée le 12 avril 2012 sur le site d'information français Mediapart et qu'il cosigne avec l'économiste, Nicolas Bouzou, l'eurodéputé allemand Jo Leinen (SPD) et le maire socialiste de Thionville, Bertrand Mertz, le ministre luxembourgeois du Travail, de l’Emploi et de l'Immigration, Nicolas Schmit, défend une une autre stratégie économique européenne, marquée par la quête de solidarité et de croissance durable. Jo Leinen, Bertrand Mertz et Nicolas Schmit avaient déjà publié en commun une tribune sur Mediapart en août 2011, dans laquelle ils avaient lancé un appel à la rénovation de la social-démocratie européenne.

Contre "la politique de dévaluation interne"

Les cosignataires du texte baptisé "Propositions pragmatiques pour une Europe de la croissance"  constatent le calme actuel mais néanmoins provisoire qui règne sur les marchés financiers. Ils expliquent  ce répit par l’accord sur le traité européen portant sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, dont ils déplorent au passage le caractère insuffisant et le fait qu'il ait été "négocié dans des conditions peu transparentes", mais "avant tout" par l'action de la BCE.

Pour autant, ils soulignent que la crise financière "n'est pas encore maîtrisée" et ne se maîtrisera pas davantage par "l'austérité tous azimuts". "Les mesures d’austérité imposées sans discernement se révèlent contre-productives et plongent un pays tel que la Grèce non seulement dans une récession de plus en plus profonde mais également dans une crise sociale et politique majeure", expliquent-ils. Ce qu'ils nomment la " politique de dévaluation interne" et consiste à "réduire drastiquement les revenus" a des conséquences économiques et sociales "désastreuses" qui se mesurent par l'explosion du chômage et de la pauvreté. Les signataires reprennent l'analyse de l’économiste allemand Peter Bofinger selon laquelle une telle politique constituerait une "thérapie mortelle" semblable à la politique économique menée par le chancelier Heinrich Brüning à la fin de la République de Weimar.

Si la réduction des déficits publics est jugée "incontournable" pour certains Etats, elle ne s'obtiendra que par une "croissance soutenable", jurent les signataires. Ces derniers proposent de poursuivre la consolidation des finances publiques sur l'actionnement, étalé dans le temps pour éviter "d'asphyxier la croissance", de deux leviers : l’augmentation ciblée des prélèvements obligatoires qui toucherait "surtout" les catégories sociales les plus aisées et une réduction de certaines dépenses, "en améliorant la productivité  du secteur public". Les investissements dits d’avenir dans l’éducation, la formation, la recherche-développement et l’innovation écologique, devraient au contraire être épargnés par l'austérité,

"Corriger les disparités grandissantes de la compétitivité"

Les signataires se demandent s'il n'y aurait pas lieu d'augmenter plus rapidement les salaires dans les pays qui "bénéficient de surplus commerciaux considérables". Cela permettrait de corriger "les disparités grandissantes de la compétitivité". Ils déplorent par ailleurs que le chômage des jeunes ait été "à peine effleuré" lors du dernier Conseil européen alors que "l’Europe a besoin de sa jeunesse". Rappelant que dans certains pays un jeune actif sur deux n’a ni un emploi ni formation, ils proposent que soient mobilisées les ressources budgétaires communautaires, du Fonds social et des Fonds structurels, pour lancer une stratégie favorisant l’emploi des jeunes.

Des "projects bonds" pour relancer la croissance structurelle de la zone euro

De même, en vue d'une "véritable Union budgétaire", il serait nécessaire de procéder à une augmentation "raisonnable" du budget communautaire, laquelle pourrait être abreuvée par des ressources propres (une taxe européenne sur les transactions financières et "éventuellement" une taxe carbone). Ils défendent par ailleurs la mise en commun à la fois des capacités d'endettement des Etats membres, par la création des eurobonds mais aussi des outils de financement permettant de relancer le croissance structurelle de la zone euro, à travers ce qu'ils baptisent des "project bonds".

Ces "projects bonds" stimuleraient la croissance  "grâce à des investissements publics et privés dans des secteurs" dits structurants tels que le transport, les énergies renouvelables et les réseaux à haut débit." Ces projets seraient développés "en étroite relation" avec la Banque européenne d’investissement, et viendraient notamment seconder les pays "dont la capacité d’investissement est réduite par les efforts de consolidation".

Les efforts anéantis de la Grèce

"Le redressement se fera par des politiques qui sûrement exigent des efforts de la part de chaque pays, mais qui surtout jouent la carte maîtresse de la solidarité européenne et de la croissance", soulignent-ils en fin de texte après une dernière démonstration, chiffres à l'appui, de l'inefficacité de la stratégie actuelle en Grèce. Ainsi, les Grecs ont réduit leur déficit entre 2009 et 2011 de près de 11% mais ont en même temps enregistré une contraction de leur économie de 15 % par rapport à 2007. Le Portugal subit le même sort malgré des "efforts remarquables". Sans reprise de la croissance, ces pays ne peuvent donc pas sortir du "marasme". A terme c'est ni plus ni moins l’éclatement de l’Union monétaire dont "les conséquences politiques, économiques et financières seraient gravissimes" qui menacerait.