Principaux portails publics  |     | 

Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale - Fiscalité
Luc Frieden a fait le point sur la situation budgétaire au 30 juin 2012, déficitaire comme prévu dans un contexte économique européen maussade
20-07-2012


Le 20 juillet, le ministre des Finances, Luc Frieden, a dévoilé la situation budgétaire de l'administration centrale du Luxembourg à mi-parcours de l'exercice 2012.

"Les dépenses continuent d'augmenter plus vite que les recettes"

Luc Frieden, lors de sa conférence de presse, le 20 juillet 2012, sur la situation budgétaire du LuxembourgA l'issue du premier semestre, "le déficit ne se résorbe pas, bien au contraire", a souligné le ministre. Le budget de l'administration centrale enregistre en effet un déficit de 415 millions d'euros, en raison de dépenses qui "continuent d'augmenter plus vite que les recettes".

Les dépenses atteignent 6,63 milliards d'euros, en augmentation de 8,5 % par rapport au premier semestre de 2011. Les recettes restent pour leur part, avec un montant de près de 6,2 milliards d'euros, comparables à celles enregistrées lors de  l'exercice 2011 (+0,4 %). Après la présentation des chiffres peu encourageants du STATEC deux jours auparavant, "c'est la confirmation malheureusement que le budget 2012 est réaliste, sans pour autant que le déficit prévu ne soit dépassé", a déclaré Luc Frieden.

Mettant en garde contre un calcul simpliste qui se contenterait de multiplier par deux ces chiffres pour évaluer la situation budgétaire à la fin de l'année, le ministre des Finances, considère que le déficit de l'administration centrale pourrait ainsi varier entre 1 et 1,5 milliards d'euros à l'issue de l'exercice. En tout cas, ces chiffres à mi-parcours constitueraient la preuve que les prévisions n'étaient "ni trop pessimistes, ni trop optimistes", comme différentes critiques l'avaient avancé au moment des débats sur le budget.

Dans le détail, on observe au niveau des recettes le recul de l'impôt sur les collectivités. Le budget 2012 anticipait une baisse de l'impôt sur les collectivités par rapport à 2011. Après six mois, le recul de l'impôt est pour l'heure de 125 millions d'euros, donc 13,2 %, un chiffre qu’il ne faudrait néanmoins pas extrapoler tel quel selon le ministre. Dans sa deuxième note de conjoncture, le STATEC avait estimé que cette évolution n'empêcherait pas l'impôt sur les sociétés de finir en légère progression.

La TVA marque pour sa part une progression de 40 millions d'euros à mi-parcours (1,5 milliards d'euros, + 2,8 %). Le STATEC avait de son côté estimé que la TVA progresserait de 8 % à la fin de l'année. Le ministre des Finances s'est étendu sur cette rentrée fiscale. En effet, il a souligné que cette hausse est due principalement à la TVA sur le commerce électronique qui a progressé de 70 millions d'euros au premier semestre. "Cette hausse est donc due à une consommation internationale dans un secteur pour lequel nous devons faire de nombreux efforts pour rester attractifs", a expliqué Luc Frieden. Or, si des sociétés telles qu'Amazon resteront au Luxembourg, après l'expiration de la dérogation du Luxembourg quant au régime de TVA en 2015, les rentrées en TVA, désormais dépendantes du lieu de résidence de l'acheteur, échapperont en très grande partie à l'Etat. "Ce sera la plus grande rupture en termes de recettes fiscales depuis des décennies", a prévenu le ministre.

La taxe d'abonnement recule, avec 293,7 millions, de 7 %, "tendance sans surprise quand les bourses ne vont pas bien". L'imposition des salaires et traitements a augmenté de 30 millions d'euros (1,26 milliards d'euros) par rapport  au premier semestre 2011.

Les dépenses affichent une croissance de 8,5 % et non de 6 % comme prévus. Cela ne constitue pas "un dérapage", dixit Luc Frieden, mais la conséquence de "l'exécution des lois" dans le domaine social et de la hausse des investissements.

Ainsi, on constate d'une part, la hausse de la rémunération des salariés de l’Etat (+ 71,9 millions) en raison notamment de la tranche indiciaire d'octobre 2011 et de la création d'emplois, l'augmentation de 68,1 millions d'euros des "prestations sociales autres qu'en nature" (RMG chômage…) et une progression de 272 millions d'euros des "autres transferts courants" (pensions, maladie, familles, communes) à 3,342 milliards.

D'autre part, la hausse des dépenses est également liée à la hausse des investissements (+ 42 millions d'euros), qui doivent moderniser le pays.

Luc Frieden appelle à l'"effort collectif"

A la lecture de ces chiffres, le ministre des Finances a appelé le pays à "l'effort collectif". La poursuite d'une "nouvelle culture des dépenses" doit empêcher le déficit, qui, au final, n'est ni plus ni moins que l'augmentation de l'endettement. "C'est dans  notre intérêt et celui de ceux qui viendront après nous que de fonder notre avenir sur des bases solides".

Le gouvernement ne verra qu'à l'automne s'il y a lieu d'adapter les propositions d'économies déjà dévoilées. Citant l'une des quatre recommandations de la Commission européenne quant à l'orientation défavorable de l'évolution du budget, Luc Frieden a notamment considéré le système de pensions et les "automatismes" comme des obstacles à l'objectif de l'équilibre pour 2014. "Nous avons besoin de plus d'efficacité des dépenses, de nous concentrer sur des objectifs, en  réfléchissant pour soutenir les dépenses qui soutiennent la croissance."

L'Etat devrait selon le ministre non pas augmenter ses dépenses pour soutenir l'activité mais au contraire, chercher à augmenter les recettes en attirant les entreprises qui produisent de la croissance dans d'autres parties du monde. Luc Frieden a notamment souligné l'intérêt de la place financière à s'intéresser à des régions dynamiques telles que l'Amérique latine (vers laquelle il entreprendra une mission en octobre), l'Asie et le monde arabe.

Pour contrecarrer la baisse de la TVA dans le commerce électronique, le ministre a évoqué le marché du livre (pour le Luxembourg un livre format papier ou format numérique est la même chose, ce qui a mené à une controverse avec la Commission européenne, n.d.l.r.) et a annoncé qu’un des plus grands acteurs de ce secteur serait intéressé à s'installer au Grand-Duché.

Le projet de loi pour la ratification du pacte budgétaire déposé à la Chambre des députés

Répondant à une question de journaliste sur le "frein budgétaire", Luc Frieden a expliqué que le projet de loi pour ratifier le pacte budgétaire, autrement dit le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire signé à Bruxelles le 2 mars 2012 venait d’être déposé à la Chambre des députés, où il figure effectivement depuis le 10 juillet 2012 comme projet de loi n° 6649.

"Ce traité n’était pas politiquement nécessaire", a ajouté Luc Frieden, pour qui "mettre un frein à la dépense budgétaire n’est rien d’autre qu’une évidence et une question de bon sens". Evoquant la tendance de la dette publique luxembourgeoise à augmenter fortement depuis quelques années, de 6 % en 2005 à 20 % en 2012,  il a tiré un parallèle entre le Luxembourg et l’Irlande, elle aussi un pays à fort secteur bancaire et à faible dette publique avant la crise immobilière et bancaire en 2008, et qui a vu sa dette publique augmenter vertigineusement en l’espace de deux ans. "Cela peut aller très vite", a déclaré Luc Frieden, mettant en garde contre un Luxembourg qui ne prendrait pas des mesures adaptées. "Le monde change dramatiquement, et la situation économique en Europe est toujours mauvaise. Le Luxembourg est donc forcément impacté", a déclaré celui qui dit de lui-même qu’il est le "ministre de la place financière" dont la tâche est d’attirer de nouveaux acteurs économiques sur cette place.