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Note de conjoncture du STATEC : le Luxembourg devrait finalement finir l'année 2012 avec une croissance de 0,1 % de son PIB
18-07-2012


Serge AllegrezzaLe 18 juillet 2012, le STATEC a présenté sa deuxième note de conjoncture de l'année 2012. Les données livrées montrent une nouvelle dégradation de la conjoncture économique européenne qui l'ont poussé à réviser significativement ses prévisions pour le Luxembourg.

"Une situation particulièrement inquiétante dans la zone euro"

Avec un taux de croissance finalement établi à 1,6 %, "l’année 2011 représente – hormis les années de crise 2008 et 2009 – l’une des plus faibles en termes de croissance de l’activité, témoignant de la fragilité de la situation et illustrant un contexte économique toujours difficile", constatait le Statec dans sa première note de conjoncture de l'année 2012.

A la livraison de sa deuxième note de conjoncture, le ton se sera finalement fait encore plus grave, assombri par le constat d'une "situation particulièrement inquiétante dans la zone euro". "La croissance prévue est plus près de la quasi stagnation, plus médiocre que nous l'avions espérée", a expliqué Serge Allegrezza. "La reprise que nous attendions est repoussée à plus tard. Dans la zone euro, on est passé du ralentissement à la stagnation puis à une dynamique de récession."

L'économiste du STATEC, Bastien Larue, a évoqué "un retournement qu'on pourrait qualifier de rechute". Plus de la moitié des Etats membres connaissent une récession, au sens technique du terme, à savoir la succession de deux trimestres à croissance négative. Le Luxembourg "frôle" cette situation, a-t-il fait remarquer.

"La plupart des indicateurs (…) s'étaient quelque peu redressés au tournant de 2011 et 2012, sur une période qui – grosso modo – avait duré de novembre à février. Ce rebond, de faible ampleur, s'est produit en lien avec les perspectives alors plus encourageantes sur l'avenir de la zone euro", grâce aux opérations de refinancement à long terme menées par la BCE. "Les effets positifs à court terme de la politique monétaire européenne (crise de liquidité et crise crunch évités) n'ont pas eu l'heur de rassurer sur le long terme : les problèmes structurels qui menacent secteur bancaire et finances publiques européens ont repris le dessus", lit-on dans la version détaillée de la note.

Bastien Larue a en conséquence souligné que ce nouveau développement de la crise économique est dû à la "crise politique", en raison de l'absence de "solution durable". "Les divergences entre Etats membres se retrouvent dans leurs performances économiques, en termes de croissance et de chômage", résume-t-il.

La note de conjoncture qualifie de "point d'achoppement principal" la mutualisation de la dette, qu'elle considère comme la "seule solution à même de faire retomber la pression sur le financement des Etats (l'alternative étant un démembrement de la zone euro)".

De même, dans son document, le STATEC cite les propos de Mario Draghi, le 24 mai 2012, pour éclairer les responsabilités politiques de la conjoncture économique. "Les mesures non conventionnelles de politique monétaire déployées par la BCE nous ont permis de gagner du temps et d'éviter un effondrement du système bancaire (…). Mais nous sommes arrivés au point où le processus d'intégration européenne a besoin d'un saut courageux d'imagination politique pour survivre", avait alors dit le président de la Banque centrale européenne.

"La crise de 2008-09 est lourde de séquelles et elle a eu notamment pour conséquence de faire passer la zone euro d'un processus de convergence à un processus de divergence", conclue le STATEC, au chapitre qu'il consacre à la situation de la zone euro.

Les perspectives pour 2012 et 2013

Le taux de croissance devrait atteindre 0,1 % en 2012 et 1,7 % en 2013

statec-bastien-larueA la lecture des chiffres définitifs, le Luxembourg a connu un recul du PIB au premier trimestre 2012 de 1,5 % par rapport au trimestre précédent, lequel s'explique "en grande partie par le recul du secteur financier", a rapporté Bastien Larue.

Au deuxième trimestre, les indicateurs de confiance des entreprises et des ménages marquent une baisse suffisamment importante pour qu'on puisse affirmer que ce mouvement se retrouvera dans les chiffres définitifs du deuxième trimestre, qui ne sont pas encore disponibles. "Le moral des consommateurs atteint des niveaux proches de ceux de la mi-2007 et de la mi-2008, ils sont très bas et ne sont pas de nature à stimuler la consommation. Cette baisse est due à l'évaluation de la situation économique et des inquiétudes vis-à-vis du chômage", explique Bastien Larue.

Suivant en général très fidèlement les variations de la courbe de la croissance, l'indice composite PMI, "indice des directeurs d'achat" qui mesure l'activité des entreprises du secteur privé, indique des "signaux très négatifs" pour le deuxième trimestre, envisageant un recul de 0,3 %.

Les difficultés du secteur financier sont dues à la "mauvaise orientation" du secteur bancaire (hors Organismes de placement collectifs, assurances et Professionnels du secteur financier). Ce dernier souffre de "marchés financiers déprimés". L'indice boursier européen est toujours au même niveau qu'au lendemain de la crise et a connu une forte baisse durant le deuxième trimestre. Alors que la première note de conjoncture tablait sur son recul de 2,7 % pour 2012, elle parie désormais sur une chute de 14 %.

Le secteur bancaire est marqué par une baisse de l'activité de crédits, "une baisse des crédits interbancaires et une hausse des créances interbancaires", et une même baisse des crédits aux entreprises et aux ménages. Dans l'enquête du STATEC, "les banques signalent un durcissement des critères d'octroi et une baisse de la demande de la part des ménages et des entreprises".

Par contre, à l'intérieur du secteur financier, les services aux entreprises (comptabilité, gestion, conseil, audit) "marchent toujours bien", comme l'emploi et les salaires le démontrent.

Dans l'industrie, on observe au deuxième trimestre une chute marquée de la confiance au niveau qualitatif. Même le secteur de la construction marque de sérieuses difficultés. "Il avait bien réagi à la crise jusqu'en 2011, mais affiche depuis quelques mois des tendances beaucoup plus pessimistes", a noté Bastien Larue.

L'industrie, l'Horesca et le commerce connaissent "soit une baisse, soit une modération de la croissance de leurs résultats".

Les services des secteurs protégés, de l'administration, de la santé, de l'éducation et des services collectifs, à l'bri des aléas de la conjecture, affichent de bons chiffres.

Ferdy Adam met en avant la baisse de la demande étrangère pour les produits luxembourgeois exportés, dû également au recul de l'économie mondiale. Le 16 juillet 2012, le FMI a effectivement révisé à la baisse ses prévisions de croissance pour la zone euro, mais aussi "de manière assez forte pour le Royaume-Uni et les Etats-Unis" et "conséquente pour la Chine et l'Inde".

Prenant en compte toutes ces variations, le STATEC estime désormais que le taux de croissance atteindra en 2012 non plus 1 % comme il l'avait estimé en mai 2012 mais 0,1 %. Les estimations de croissance pour 2013 sont elles-mêmes corrigées et passent de 2,4 % 1,7 %.

La hausse du chômage

La révision du taux de croissance a mécaniquement des conséquences sur les prévisions en termes d'emploi. Ce dernier augmenterait en 2012 de 1,9 % et non plus 2,1 % tandis qu'en 2013, il n'atteindrait que 1 % et non plus 1,5 %, comme prévu dans la précédente note de conjoncture. Le taux de chômage devrait atteindre 6,8 % en 2013 et non plus 6,5 %, soit 0,6 point de plus que le score prévu pour 2012.

De manière générale, on constate un repli de l'emploi intérimaire et une hausse du chômage partiel, indicateurs connus du ralentissement de l'emploi luxembourgeois débuté en 2011.

Le secteur bancaire affiche toujours de mauvais résultats. Il a encaissé à l'issue du 2e trimestre 2012 son 14e trimestre consécutif de baisse de l'emploi depuis le début de l'année 2009. L'emploi se dégrade aussi particulièrement dans l'industrie, suivie par la construction et le travail intérimaire. Les services restent épargnés "le manque de main d'œuvre qualifiée s'est même encore aggravé récemment".

"De la même manière qu'après l'éclatement de la bulle internet, où le pays avait connu une rapide montée du chômage avant une accalmie, le taux de chômage est élevé depuis la récession de 2008", note Serge Allegrezza. Les nouvelles prévisions en termes de chômage du STATEC ne font que confirmer " une convergence du Luxembourg avec les pays voisins", a souligné pour sa part Bastien Larue.

Une inflation basse et un recul du coût salarial moyen

L'inflation devrait atteindre un niveau très proche de 2 % en 2012. Cette accalmie, à la faveur de la tendance à la baisse des prix pétroliers et à un moindre effet des prix administrés, pourrait être une bonne nouvelle. Toutefois, cette moindre pression trahit aussi le ralentissement de la croissance mondiale et donc une demande extérieure moindre.

D'autre part, le coût salarial moyen devrait progresser moins fortement que d'habitude, en raison d'une situation défavorable aux revendications salariales. Les salaires nominaux devraient par conséquent augmenter plus faiblement, de seulement 2,9 % par an en moyenne sur 2012 et 2013 (soit une révision des prévisions à la baisse de 0,7 point de pourcent chaque année).

Ce coût salarial connaît une "évolution dynamique à la baisse" dans le secteur tertiaire "où le recul des primes et gratifications présente le principal risque baissier".

Des objectifs difficiles à tenir

Serge Allegrezza a rappelé que cette note de conjoncture donne le cadre pour la formulation de la politique économique qui doit tenir compte des mesures du paquet budgétaire (six pack) et du Programme national de réforme (PNR), livré chaque année dans le cadre du semestre européen.

Entre temps le Conseil européen a adopté deux recommandations pour le Luxembourg. La première, constate Serge Allegrezza, donc celle qui consiste à rectifier la trajectoire budgétaire pour atteindre un surplus en 2014,  "la situation actuelle ne nous permettra pas de l'atteindre".

En 2013, le solde des finances publiques atteindrait désormais - 3,2 % au lieu des - 2,8 % prévus auparavant. Les recettes augmenteraient non plus de 3,1 % mais de 1,6 %, en raison de la dégradation de la situation tandis que les dépenses baisseraient de 0,5 % en 2013. En prenant en compte les mesures annoncées par le Pacte de stabilité et de croissance, le solde des finances publiques atteindrait 2 % en 2013 alors que le gouvernement doit atteindre un bénéfice de 0,5 % du PIB l'année suivante.