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Migration et asile - Élargissement - Justice, liberté, sécurité et immigration
Le flux de demandeurs d’asile en provenance des Balkans occidentaux, notamment de pays à facilités de visas, a conduit six Etats membres, dont le Luxembourg, à demander à ce que l’affaire soit traitée au prochain Conseil JAI
La réintroduction de l’obligation de visa n’est plus un tabou
15-10-2012


Le grand nombre de demandeurs d’asile politique en provenance de la Serbie et de la Macédoine (ou ARYM), deux pays qui bénéficient d’un régime de visas libéralisé et sont des candidats à l’adhésion à l’UE, a conduit les ministres compétents de six Etats membres – l’Allemagne, la Belgique, la France le Luxembourg, les Pays-Bas et la Suède – à écrire une lettre à la Commission européenne et à la commissaire Cecilia Malmström, en charge des Affaires intérieures.

balkans-occidentauxDans cette lettre, les six Etats membres exigent que l’affaire soit traitée au prochain Conseil "Justice et Affaires intérieures" qui aura lieu à Luxembourg les 25 et 26 octobre 2012 et ils demandent également une meilleure coopération entre Etats membres ainsi qu’entre Etats membre et agence Frontex pour la protection des frontières extérieures de l’Union et de l’espace Schengen. Finalement, ils demandent à ce que la clause de sauvegarde sur la protection des frontières extérieures – actuellement en discussion au Conseil et au Parlement européen - soit adoptée avant la fin de l’année, afin de rendre possible une procédure d’urgence qui permette par exemple de réintroduire une obligation de visa pour la Serbie et la Macédoine après une évaluation de la situation par le Conseil.

Les statistiques publiées sur les demandes de protection internationale  le 10 octobre 2012 par le Ministère de l’Immigration luxembourgeois montrent que les ressortissants serbes constituent avec 329 personnes et 19,35 % des demandeurs d’asile le premier groupe en termes d’origine des demandeurs de protection internationale. Les citoyens de l’ARYM, 161 personnes, constituent 9,47 % des 1700 demandeurs d’asile pour 2012. Ensemble avec les ressortissants d’autres pays des Balkans occidentaux – de l’Albanie (16,24 % des demandeurs), du pays candidat à l'adhésion à l'UE Monténégro (15,12 %), du Kosovo (11,18 %) et de la Bosnie-Herzégovine (10,47 %) – des pays qui ont aussi une perspective européenne et qui pour l'Albanie et la Bosnie disposent d'un régime de visas libéralisé, Serbes et Macédoniens constituent 82 % des demandeurs d’asile au Luxembourg.

L’immense majorité de ces demandes est rejetée tant au Luxembourg que dans les autres pays concernés comme non fondées au regard des conventions internationales. L’autre problème est que l’afflux de ces demandeurs d’asile que le porte-parole de Cecilia Malmström, Michele Cercone, a qualifiés de "réfugiés économiques", bloque les systèmes de protection des pays auxquels la demande est adressée.

La Commission exige des pays d’origine de ces demandeurs d’asile de contribuer de manière plus conséquente à la lutte contre les abus, par exemple à travers une campagne d’information. Mais elle n’élude pas l’origine du problème : le manque d’intégration des Roms.

La Commission avait déjà écrit dans le "Troisième rapport de suivi de la libéralisation du régime des visas concernant les pays des Balkans occidentaux" qui lui sert de référence et qu’elle avait publié le 28 août 2012 : "Le faible degré d’intégration des communautés locales, surtout d’origine rom, reste un important facteur de motivation pour la grande majorité des «faux» demandeurs d’asile. Les principales raisons de leur départ demeurent économiques, et s’expliquent par les avantages financiers qu’ils associent à une demande d’asile dans certains États membres de l’Union."

Par rapport aux abus, la Commission articule dans le rapport plusieurs axes d’action :

  1. une coopération renforcée avec les autorités des pays des Balkans occidentaux afin de surmonter et, si possible, d’anticiper les situations critiques auxquelles sont confrontés certains États membres de l’UE ;
  2. redoubler d’efforts dans l’identification des facilitateurs tels que les agences de voyage, les compagnies de transport, etc. ;
  3. renforcer les contrôles à la sortie (dans les pays des Balkans occidentaux) et à l’entrée (aux frontières de l’Union européenne) ; les États membres de l’Union européenne portant une responsabilité directe dans la gestion des frontières extérieures de l’Union devraient continuer à accorder une attention toute particulière au phénomène, dans le respect de l’acquis de Schengen et en étroite collaboration avec les pays des Balkans occidentaux, les États membres de destination et FRONTEX ;
  4. des campagnes de sensibilisation et d’information continues et ciblées dans le but de préciser les droits et obligations associés à une exemption de visas, avec une diffusion de l’information sur les règles d’accès au marché européen du travail et sur les risques encourus en cas d’abus des droits liés au régime d’exemption ;
  5. une assistance renforcée et ciblée aux populations minoritaires, et plus particulièrement aux communautés dans les pays d’origine.

Le chef du gouvernement serbe, le nationaliste Ivica Dacic, a de son côté annoncé que la Serbie assumerait les frais occasionnés par les plus de 10 000 demandeurs d’asile serbes.

L’association de défense des droits des Roms, Chachipe asbl, ne voit pas les choses de la même manière. Elle assimile dans un communiqué le geste des ministres en charge de l’immigration des six Etats membres signataires de la lettre adressée à la Commission à une "chasse à la courre raciste contre les Rom". Faisant l’inventaire des discriminations auxquelles les Roms sont exposés, elle qualifie de "dépréciative" l’approche de qualifier d’emblée comme non fondée une demande d’asile de Roms. L’association dénonce également les défenses de sortie du territoire des pays des Balkans occidentaux signifiés à des milliers de Roms, avec des arguments que l’a.s.b.l. juge oiseux et racistes.