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Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale
Dans une tribune publiée par le Tageblatt, le président de l’OGBL Jean-Claude Reding dénonce l’impact économique et social de "la politique d’austérité dans l'Union européenne" et lance une mise en garde au LSAP
10-01-2013


tageblattLe président de l’OGBL, Jean-Claude Reding, s’est exprimé le 10 janvier 2013 dans un dossier consacré par le Tageblatt aux questions de société sur ce qu’il appelle "la politique d’austérité dans l'Union européenne".

"Le résultat social et économique de cette politique est désastreux"

Pour le président de l’OGBL, "le résultat social et économique de cette politique est désastreux." Et il poursuit : "croissance des inégalités, du chômage et de la pauvreté en sont les conséquences incontestées et visibles à l'œil nu en traversant l'Union européenne. Le Luxembourg est également de plus en plus victime de cette politique insensée." Il se réfère aux rapports de la Chambre des salariés et de Caritas qui "montrent que les inégalités croissent, que le risque de pauvreté est élevé et que les revenus réels, disponibles des ménages avec des salaires en dessous du salaire moyen stagnent voire régressent." Il se réfère aussi à ses entretiens avec les responsables des offices sociaux, et cite l'éclosion des épiceries sociales comme un signe qui ne trompe pas. Bref, "la réalité de la déchéance sociale et la crainte de l'avenir hantent un nombre croissant de nos concitoyens."

Les syndicats limitent la casse sociale

Un autre symptôme est pour lui le fait que "depuis 2009 les manifestations syndicales se suivent à un rythme rapide". Pour le président de l’OGBL, c’est "cet engagement syndical" qui a "permis de limiter la casse sociale, d'éviter l'abolition de l'indexation des salaires et des pensions à l'évolution des prix" exigées "par les milieux patronaux, par le Conseil et la Commission européenne, par l'OCDE et les autres chantres du libéralisme économique et du misérabilisme social".

Une autre politique contre le démantèlement du système de protection sociale

Mais d’autres facteurs continuent de poser problème. Il cite le blocage des prestations familiales (allocations familiales, boni enfants) depuis 2006, "une pression accrue sur les salaires des jeunes (d'ailleurs relancée par le gouvernement lui-même dans les différents domaines du secteur public)" et "une augmentation spéculative, incontrôlée et scandaleuse du prix du logement" qui "diminue le revenu réel et fragilise la situation de beaucoup de jeunes familles." S’y ajoutent la diminution projetée de l'allocation de rentrée scolaire, l'augmentation du coût de la garde d'enfants et l'augmentation de la pression fiscale sur les petits et moyens revenus.

Pour contrecarrer cette évolution, l'OGBL prône "ensemble avec les autres organisations syndicales" ce qu’il appelle "une autre politique, une politique anticyclique prudente qui sauvegarde le niveau des prestations de notre système de protection sociale qui s'est avérée être un puissant instrument anticrise et une bonne protection contre le risque de pauvreté et qui ménage le pouvoir d'achat, le revenu réel et disponible de la grande masse des salariés et des retraités, une politique qui renforce la progressivité de la fiscalité pour les hauts revenus, qui augmente la fiscalité sur le capital et le revenu du capital, qui lutte contre l'évasion et l'optimisation fiscale pour sauvegarder un niveau de recettes suffisantes et pour permettre une politique d'investissement public forte".

Les craintes pour le futur

Jean-Claude Reding évoque ensuite "diverses annonces issues des partis gouvernementaux" qui "laissent présager que la pression pour renforcer la politique d'austérité, injuste, inéquitable et économiquement contreproductive augmentera dans les mois à venir dans le cadre de la nouvelle gouvernance économique, budgétaire et monétaire mise en place dans le cadre de la nouvelle procédure dite du semestre européen."

La sélectivité des mesures sociales qui a été au centre des discussions budgétaires à la Chambre des députés en décembre 2012 est pour Jean-Claude Reding une "idéologie" qui "en fin de compte ne sert qu'à voiler la volonté de transformer notre système de protection sociale universelle couvrant tout le monde en un système minimaliste, une protection de dernier ressort contre la pauvreté absolue, un système qui offre une protection insuffisante pour maintenir un niveau de vie décent en cas d'accident de vie et qui forcera la majorité des salariés à recourir à une protection supplémentaire, au mieux dans le cadre d'un système mutualiste, au pire dans le cadre d'un système d'assurance privée commercial."

Le contrat social en danger

Jean-Claude Reding pense "qu’au vu des recommandations de l'OCDE et de la politique préconisée par la Commission européenne, il faut également s'attendre à de nouvelles attaques contre l'indexation des salaires, contre les conventions collectives de travail." Pour lui, les récentes résiliations de conventions collectives, à ses yeux "des attaques en règle, ciblées et coordonnées contre les conventions collectives de travail dans beaucoup de secteurs", s’inscrivent dans ce contexte.

Ce processus a aussi révélé selon lui "les insuffisances et approximations de notre législation en la matière, la faiblesse de nos instances de contrôle, de médiation et de nos procédures de conciliation." Pour faire face, "le mouvement syndical revendique des réformes rapides renforçant le droit du travail, adaptant les règles encadrant la négociation collective pour la sécuriser et la soutenir et améliorant le droit à l'information, à la consultation et à la participation des représentants des salariés et de leurs syndicats." Ces réformes, pourtant annoncées, "traînent depuis des années", souligne Jean-Claude Reding, alors que "les réformes négatives" sont "préparées, discutées et votées rapidement, parfois même arrachées aux forceps".

Une mise en garde lancée au LSAP

Et de lancer une mise en garde au LSAP. Un parti dont le journaliste Romain Hilgert relevait en septembre 2012 dans le Lëtzebuerger Land qu’il éprouve "de plus en plus de difficultés à faire accepter cette politique par son électorat" à cause de "l’orientation unilatéralement néolibérale de la politique européenne, avec la dérégulation et la privatisation qui s’imposent dans tous les Etats membres". Jean-Claude Reding dans le texte : "Les semaines à venir montreront si ceux qui déclarent qu'il faut réajuster la politique européenne, ajouter une dimension sociale à la gouvernance économique et monétaire s'opposeront au Luxembourg dans la majorité gouvernementale à la mise en œuvre  des recommandations antisociales et antisyndicales de la Commission européenne. Pour le parti socialiste ce sera l'heure de vérité. S'il n'arrive pas à s'opposer à un nouveau renforcement de la politique d'austérité, à mettre un terme au travail de sape contre notre système de protection sociale, à réaliser rapidement les réformes supplémentaires promises pour équilibrer la réforme des retraites, à faire voter une réforme d'envergure pour renforcer les institutions de représentation du personnel dans les entreprises et pour créer un plus grand espace pour la démocratie dans le monde du travail, à mener une politique de dialogue permettant de regagner la confiance perdue des salariés dans beaucoup des secteurs, - alors son avenir s'annonce sombre."