"L’Europe est sur la bonne voie. Et l’Union bancaire aussi. Les temps sont plus calmes et plus robustes qu’il y a encore un an. Mais nous ne sommes pas encore sortis de l’auberge en ce qui concerne la crise." Tel fut le message du Premier ministre Jean-Claude Juncker avant son entretien avec la chancelière fédérale d’Allemagne, Angela Merkel, le 16 mai 2013 à Berlin en vue de la préparation du Conseil européen du 22 mai à Bruxelles qui traitera principalement de la politique fiscale.
Lors de la conférence de presse qui a suivi cette rencontre, le Premier ministre luxembourgeois a clairement laissé entendre qu’il ne serait pas question d’aller au-delà de la décision à laquelle sont arrivés les ministres des Finances lors de l’Ecofin du 15 mai au sujet de la directive sur la fiscalité de l’épargne.
A cette occasion, le Luxembourg, qui avait annoncé au mois d’avril qu’il passerait à l’échange automatique d’informations dans le cadre de la directive sur la fiscalité de l’épargne, a donné son accord, avec l’Autriche, pour donner mandat à la Commission de négocier avec la Suisse, le Liechtenstein, l’Andorre, Monaco et Saint-Marin en vue de modifier les accords avec ces pays en matière de fiscalité de l’épargne. Mais le Luxembourg et l’Autriche, qui ont veillé à ce que ce mandat de négociations stipule bien, dans un souci de maintenir avec ces pays tiers un même niveau de compétitivité, que l’objectif est l’instauration de l’échange automatique d’informations, ont aussi remis à l’issue de ces négociations tout accord sur l’élargissement du champ d’application de la directive sur la fiscalité de l’épargne.
En clair, Jean-Claude Juncker a donc annoncé que, sur ce plan, il ne faudrait rien attendre de plus du Conseil européen du 22 mai.
Pour autant, il n’a pas ressenti de pression particulière de la part de l’Allemagne à ce sujet, ainsi qu’il l’a confié notamment au Tageblatt ou à RTL Radio Lëtzebuerg. En effet, la pression vient plutôt de la France, et il se prépare d’ailleurs à prendre langue avec le président français avant le sommet du 22 mai afin de lui expliquer la position luxembourgeoise.
A ses yeux, le Conseil européen de juin sera d’ailleurs plus important que celui du 22 mai, ainsi qu’il l’a annoncé, suivi en cela par la chancelière allemande. S’il s’est longuement réjoui de l’accalmie dans la crise, se souvenant des discussions qui avaient cours il y a de cela un an encore, le Premier ministre luxembourgeois a appelé à aller de l’avant, pas à pas et de manière réfléchie, en matière d’Union bancaire. Car si la situation est nettement moins dramatique qu’il y a un an, il reste encore bien à faire en termes de consolidation budgétaire, tout en veillant à ce qu’il y ait plus de croissance et d’emploi. Aussi, si le Conseil européen de juin est si déterminant à ses yeux, c’est qu’il sera l’occasion de se pencher ensemble sur les programmes de stabilité de chacun des Etats membres et d’en tirer les conséquences politiques pertinentes.
Le Luxemburger Wort rapporte à ce sujet que les deux chefs de gouvernement ont d’ores et déjà discuté du cas de la France, à qui la Commission vient de laisser entendre qu’elle pourrait se voir accorder un délai de deux ans pour revenir à un déficit ne dépassant pas le seuil de 3 % du PIB. Pour Jean-Claude Juncker, si un renforcement de l’austérité ne saurait être la solution, il n’en reste pas moins qu’il ne doit pas y avoir de pause dans les réformes structurelles dont la France a besoin.
Lors de la conférence télévisée WDR Europaforum à laquelle Jean-Claude Juncker a participé le même jour aux côtés du ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, le Premier ministre luxembourgeois a par ailleurs insisté sur la nécessité de "ne pas oublier la justice sociale dans notre action politique afin de consolider également la cohésion sociale dans nos pays". "L’Europe doit réapprendre à être fière d’elle-même", a-t-il par ailleurs conclu, car ce que l’UE a su atteindre lui est envié dans le monde entier.
Dans le cadre de son déplacement officiel, Jean-Claude Juncker a également rencontré le candidat du SPD à la chancellerie, Peer Steinbrück, pour un échange sur les grands dossiers de l’actualité européenne.