Le 26 juin 2013, la commissaire européenne en charge des droits fondamentaux, Viviane Reding, a envoyé une lettre au ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, suite aux révélations faites par le journal anglais The Guardian, sur base des déclarations de l'ex-consultant informatique de l'agence de renseignement américaine, Edward Snowden dévoilant l’existence du programme "Tempora" qui permettrait aux services de renseignement britanniques d’accéder aux communications téléphoniques et Internet transitant par les câbles transatlantiques à fibres optiques. Des accords secrets passés avec les entreprises qui exploitent ces câbles permettraient ensuite au service de renseignement britannique MI6 de partager ses données avec ses homologues américains, affirme le quotidien britannique.
Dans sa lettre, Viviane Reding exprime sa "préoccupation" et demande à William Hague des "clarifications" à fournir avant le1er juillet 2013, comme elle l’a expliqué lors d’un point presse le 26 juin 2013. "Si ce que rapportent les médias est vrai, ces programmes pourraient avoir un impact préoccupant sur les droits fondamentaux des citoyens de l’Union européenne", écrit-elle dans son courrier, selon le journal Financial Times qui en a eu copie.
Viviane Reding a résumé ainsi les quatre questions qu’elle a adressées à William Hague : "Quelle est l'étendue du programme ? Est-il limité à des cas individuels ? Les données restent-elles au Royaume-Uni ? Quelles sont les possibilités d'une rectification pour les citoyens britanniques et européens ?" Le 25 juin 2013, l’Allemagne avait demandé des explications à Londres sur le degré de surveillance des citoyens allemands et sur la base légale d'un tel dispositif.
Viviane Reding avait déjà écrit le 10 juin 2013 au ministre américain de la Justice, Eric Holder, après de premières révélations du même Edward Snowden, sur l’existence du programme américain PRISM, par lequel le renseignement américain récolterait des informations sur les clients des principaux opérateurs de télécommunication et d’accès à internet des Etats-Unis, mais aussi aux données de plus d’un milliard de personnes dans le monde qui utilisent les services des principaux fournisseurs américains de services internet.
A la suite de ces nouvelles révélations sur l’existence du programme Tempora, Viviane Reding a souligné que cette affaire est un "signal très clair que nous avons besoin de trouver le bon équilibre entre la protection des données et le traitement des données personnelles pour des raisons de sécurité". Le 25 janvier 2012, elle avait présenté une réforme des règles européennes en matière de protection des données. Lors du Conseil JAI du 6 juin 2013, les Vingt-Sept n’avaient toujours pas réussi à se mettre d’accord sur une approche générale.
Le député écologiste, Claude Adam, s’est emparé de ces révélations sur les programmes américain, PRISM, et britannique, Tempora, pour connaître la position du gouvernement luxembourgeois à ce sujet. Dans une question parlementaire envoyée le 27 juin 2013, le député luxembourgeois, Claude Adam, constate l’existence de "programmes d’espionnage terrifiants et scandaleux qui visent un maximum de citoyens et certainement aussi des institutions et des sociétés commerciales". Il s’inquiète de l’accès "à nos informations personnelles, aux données téléphoniques, aux contenus de nos boîtes Gmail, Hotmail, Yahoo et autres, à nos chats, à nos données Facebook, aux logs de connexion internet, aux photos, vidéos et vidéoconférences, aux fichiers entreposés dans les services cloud, aux appels VoIP, etc."
Il mentionne également des articles de presse étrangers rapportant que "les services de renseignements belges et néerlandais auraient accès aux données du programme PRISM" et que les services de renseignements contourneraient souvent l’interdiction de l’espionnage interne, à l’encontre de leurs propres citoyens, en recourant tout simplement aux données collectées par les services "amis". "Les citoyens luxembourgeois sont donc clairement concernés, ne fut-ce qu’en utilisant les services des sociétés américaines", avance Claude Adam.
Dans sa question parlementaire, Claude Adam veut savoir :
- si le Gouvernement et le Service de Renseignement luxembourgeois (SREL) connaissaient l’existence des programmes PRISM et Tempora avant les révélations récentes,
- si le gouvernement est déjà intervenu auprès des Gouvernements britannique et américain pour avoir des informations détaillées sur ces programmes et pour s’opposer à cet accès systématique aux données et communications de nos citoyens,
- si l’accès et l’analyse de toutes ces informations par les services britannique et américain ne servent pas à des fins d’espionnage économique,
- si le SREL est informé par les services "amis", lorsqu’ils interceptent ou accèdent directement à des informations concernant des citoyens ou sociétés luxembourgeoises,
- si les services de renseignement profitent d’un accès direct ou indirect aux données des programmes PRISM et Tempora,
- si le SREL a déjà demandé par le passé des informations aux services de renseignements étrangers visant des citoyens luxembourgeois
- si l’Etat luxembourgeois surveille de manière générale les réseaux de télécommunication et de communications électroniques luxembourgeoises et stocke ses informations.
Au nom du groupe parlementaire Déi Gréng, Claude Adam et son colistier, le député Henri Kox, ont également demandé au président de la Chambre des députés de mettre à l’ordre du jour une réunion jointe de la Commission juridique et de la Commission de l'Enseignement supérieur, de la Recherche, des Media, des Communications et de l'Espace, afin de discuter des enjeux et de l’état actuel de la réforme du régime européen de protection des données personnelles ainsi que de la position du Gouvernement luxembourgeois lors des derniers Conseils JAI.
Ils fondent leur requête sur l’idée que la réforme de la protection des données constituera "une première occasion de réagir en tant qu’Union européenne face à la découverte du programme PRISM" mais "que les travaux au Parlement européen pourraient bientôt aboutir en plénière, les gouvernements des Etats membres semblent durablement divisés entre partisans d’une protection renforcée et partisans d’une protection plus faible".