La ministre de la Justice, Octavie Modert, a représenté le Luxembourg pour le volet "Justice" du Conseil "Justice et affaires intérieures" (JAI) qui s’est tenu à Luxembourg le 6 juin 2013 sous présidence irlandaise.
Les ministres de la Justice se sont penchés au cours d’un débat sur le projet de réforme de la protection des données personnelles mis sur la table par la Commission européenne en janvier 2012. Ce dossier, dont la présidence irlandaise a fait une priorité, est parallèlement en discussion au Parlement européen.
Le débat s’est tenu sur la base d’une proposition de compromis préparée par l’Irlande et portant sur les chapitres I à IV du projet de règlement sur la protection des données. Si la présidence fait part de progrès importants dans les discussions, aucun accord n’a pu toutefois être dégagé formellement, dans la mesure où aucun accord sur une partie du texte ne peut être trouvé sans accord sur l’ensemble, ainsi que l’expliquent les conclusions du Conseil, qui sont lapidaires sur ce débat. Les travaux vont donc se poursuivre et la Lituanie, dont la présidence va commencer le 1er juillet 2013, va prendre le relais.
Pour le Luxembourg, qui soutenait pleinement la proposition de compromis irlandaise, le débat a permis "jeter les bases pour un accord futur" grâce aux "progrès impressionnants réalisés sous présidence irlandaise", ainsi que le relate le communiqué diffusé par le Ministère luxembourgeois de la Justice.
Sur un certain nombre de points, comme le champ d’application, les modalités permettant de donner son consentement au traitement à l’utilisation de données, et surtout l’approche fondée sur les risques, le Luxembourg est d’ores et déjà prêt à donner son accord, tout en souhaitant éviter tout dispositif lourd sans valeur ajoutée en ce qui concerne les codes de conduite. Mais Octavie Modert a surtout plaidé auprès de ses collègues pour qu’ils marquent leur soutien à l’approche présentée par la présidence irlandaise, même si elle reconnaît que certaines questions mériteront d’être discutées en détail. Il importe en effet à ses yeux d’aller de l’avant car "l’économie attend ce règlement".
D’après le compte rendu du Bulletin quotidien de l’Agence Europe daté du 7 juin 2013, le Luxembourg n’était pas seul à soutenir aussi pleinement la présidence irlandaise, il avait à ses côtés la Suède et la Finlande.
En revanche, plusieurs délégations ont affiché une certaine réticence, appelant à poursuivre les travaux. C’est le cas de la délégation britannique, qui avait appelé à ne "précipiter aucune décision qui se révélerait nuisible aux PME" en amont du Conseil. Les Pays-Bas ont aussi fait part de leurs inquiétudes, demandant à la Commission une nouvelle étude d’impact sur les coûts qu’impliquerait la réforme pour les PME.
D’autres, à l’image de l’Allemagne ou de la France, se sont montrés prudents, trouvant qu’il était encore un peu tôt pour dégager une approche générale. Du côté allemand, c’est la notion de consentement qui mériterait d’être peaufinée, mais aussi le champ territorial, la flexibilité à donner au secteur public ou encore l’articulation avec le principe de liberté d’expression. La ministre française a souligné l’attachement de la France à la notion de "consentement explicite" que prévoyait la proposition de la Commission alors que la présidence irlandaise propose désormais un consentement "non ambigu". La France tient aussi à ce que l’application des règles aux réseaux sociaux soit davantage abordée dans la proposition. Mais surtout, et la délégation française est ici rejointe par l’Autriche, il faut selon ces deux pays éviter que le niveau de protection des données s'avère en-deçà de la directive de 1995 et que la réforme ne marque un recul par rapport au niveau de protection actuel.
Les ministres de la Justice ont par ailleurs approuvé une orientation générale sur la directive relative à la protection des intérêts financiers (PIF) de l’Union.
Cette directive a pour objet de mieux protéger les fonds provenant du budget de l’Union ainsi que les ressources propres par une protection équivalente des intérêts financiers dans tous les États membres par la définition d’infractions pénales dans le domaine des PIF et l’établissement de peines minimales applicables. Elle vise en outre à rapprocher les législations des États membres, entre autres en introduisant des sanctions pénales harmonisées.
Octavie Modert a appuyé l’orientation générale, alors qu’elle constitue aussi la base nécessaire pour la mise en place du futur parquet européen. Elle a exprimé le souhait que la définition de la notion de fraude aux intérêts financiers de l’Union soit plus large que celle retenue, afin de pouvoir améliorer les poursuites dans ce domaine.
Sur base de cette orientation générale, les négociations vont pouvoir s’engager entre le Conseil et le Parlement.
Après en avoir débattu une première fois en décembre 2012, les ministres de la Justice ont par ailleurs procédé à un deuxième débat d’orientation sur l’ordonnance européenne de saisie conservatoire des comptes bancaires.
La proposition de règlement prévoit d’introduire une procédure européenne de saisie des comptes bancaires, qui permettrait aux créanciers d’obtenir à coût et délai réduits des ordonnances sur la base de conditions identiques, quel que soit le pays où se trouve la juridiction compétente. L’ordonnance de saisie bloquerait les comptes du débiteur.
Octavie Modert a plaidé pour un renforcement des garanties procédurales visant à protéger contre le recours abusif à cette ordonnance.
Les ministres ont par ailleurs eu un débat d’orientation au sujet des modifications à apporter au règlement relatif aux procédures d'insolvabilité, qui établit un cadre européen pour les procédures d’insolvabilité transfrontalières.
Compte tenu de la réforme du droit national de la faillite, le Luxembourg soutient l’inclusion des procédures de pré-insolvabilité prévue par le règlement. Octavie Modert a soutenu l’objectif d’aller vers une culture européenne de sauvetage et de rétablissement des entreprises en difficulté.
Concernant l’insolvabilité de membres d’un groupe de sociétés, elle a lancé un appel à la prudence. L’idée préconisée d’une coordination entre curateurs entité par entité n’étant pas mauvaise en soi, il faudrait cependant éviter des automatismes à ce niveau et assortir cette coordination de conditions claires et précises.
La Commission a finalement présenté au Conseil le règlement visant à favoriser la libre circulation des citoyens et des entreprises en simplifiant l'acceptation de certains documents publics dans l'Union européenne. L’objet du règlement est de rationaliser les règles et procédures appliquées entre les États membres en ce qui concerne la vérification de l’authenticité notamment des actes de l’état civil.
Octavie Modert a salué cette initiative qui permettra de simplifier les démarches administratives pour les citoyens luxembourgeois se rendant ou vivant à l’étranger ainsi que pour les nombreux citoyens européens vivant au Luxembourg.
Les ministres ont adopté ensuite les conclusions du Conseil relatives aux droits fondamentaux et à l'État de droit, avant d’être renseignés sur l’état d’avancement de l’adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'homme.
Octavie Modert a souligné que le Luxembourg, conformément à l’obligation de résultat prévue par le traité de Lisbonne, soutenait activement l’accomplissement du processus d’adhésion qui permettra à l’Union européenne de devenir partie contractante à la Cour européenne des droits de l’homme. Par l’effet de l’adhésion, toute personne physique, organisation non gouvernementale ou groupe de particuliers aura le droit de soumettre directement les actes, les mesures et les omissions de l’Union européenne au contrôle juridictionnel de la Cour européenne des droits de l’homme.