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Environnement
Traitement des eaux urbaines résiduaires – La Commission européenne a publié son 7e rapport sur la mise en œuvre de la directive de 1991
07-08-2013


Station d'épuration © Union européenneLe 7 août 2013, la Commission européenne a publié son 7e rapport sur la mise en œuvre de la directive relative au traitement des eaux urbaines résiduaires, datant de 1991. Cette dernière donne obligation aux agglomérations, villes et localités, dans toute l'Union européenne, de collecter et de traiter leurs eaux urbaines résiduaires. La directive désigne trois niveaux de traitement. Le premier consiste dans la collecte, le second en un traitement biologique appelé "traitement secondaire" et le troisième en un "traitement plus rigoureux", effectué dans les bassins versants des eaux particulièrement sensibles, destinées à la consommation humaine et à la baignade. Ce dernier traitement, dit aussi tertiaire, permet de lutter contre l'eutrophisation et de réduire la pollution bactériologique.  

"De bas niveaux de mise en œuvre peuvent conduire à une pollution biologique des rivières et lacs mais aussi à l’accumulation de charges en azote excessives, selon le principe de l’eutrophisation, qui touche principalement les lacs, eaux côtières et eaux marines", explique la Commission européenne en introduction à son rapport. Les risques, en cas de traitements insuffisants, résident également dans la perte de biodiversité, la détérioration de l’approvisionnement en eau potable et des eaux de baignade, sans oublier l’impact sur le tourisme.

La Commission européenne cite aussi le récent rapport sur la mise en œuvre de la directive-cadre Eau, qui a relevé que la pollution des sources concerne 22 % des étendues d’eau de l’UE et que l’eutrophisation constitue une "menace majeure pour 30 % des étendues d’eau dans 17 Etats membres".

Les nouveaux Etats membres doivent faire des "efforts croissants" pour respecter les délais de mise en conformité

24 000 villes de plus de 2000 habitants, qui génèrent une pollution correspondant à une population de 615 millions équivalents-habitants, ont fourni des informations qui nourrissent ce 7e rapport mesurant les progrès réalisés à l’issue de la période 2009-10. 18 000 d’entre elles, à l’origine de 81% de la charge polluante, sont situées dans les 15 Etats membres appartenant à l’UE avant 2004 (groupe nommé "UE-15" dans le rapport), les autres dans les 12 Etats membres qui l’ont rejointe en 2004 et 2007 ("UE-12"). Etant donné que la directive a été adoptée en 1991, le rapport fait la distinction constante entre les anciens Etats membres et les nouveaux, les premiers étant plus avancés et leurs délais de mise en œuvre étant échus en 2010, tandis que les seconds ont jusqu’à 2018 pour se conformer à la directive. Néanmoins, dans son rapport, la Commission européenne doute déjà de la possibilité de nombres d’Etats de "l’UE 12" de respecter les délais. "Sans efforts croissants à tous les niveaux, les délais attendus peuvent être les mêmes sinon plus longs que ceux pour l’UE 15", met-elle en garde.

Les principaux résultats

Dans le communiqué de presse diffusé à cette occasion, la Commission européenne met en avant le fait que la grande majorité (91 %) de la charge polluante des grandes villes de l’UE fait l'objet d'un traitement rigoureux ou tertiaire. Elle y voit un "progrès considérable au regard de la situation décrite dans le rapport précédent". Ce rapport, daté de 2011, faisait état de 77 % de charge polluante traitée ainsi.

La Commission européenne met aussi en avance l'exemple de trois pays pionniers, à savoir l’Autriche, l’Allemagne et les Pays-Bas, qui atteignent les 100 % de traitement dans les trois catégories.

Le rapport révèle que les taux de conformité pour la collecte se situaient en 2010 à un niveau très élevé (94 % en moyenne européenne contre 92 % lors du précédent rapport). Tous les États membres ont maintenu ou amélioré leurs résultats. L’UE-15 se distingue, avec un taux moyen de 97 %, bien plus élevé que l’UE-12 qui affiche 72 %. Par ailleurs, quinze États membres, dont le Luxembourg, collectent 100 % de leur charge polluante totale. A l'autre extrémité, les taux de conformité sont restés inférieurs à 30 % en Bulgarie, à Chypre, en Estonie, en Lettonie et en Slovénie.

Pour le traitement secondaire, les taux de conformité atteignent 82 %, en hausse de quatre points par rapport au rapport de 2011. Quatre Etats membres atteignent les 100 % et six autres sont au-dessus de 97 %. La moyenne de l’UE-15 atteint 88 %, celle de l’UE-12 39 %. Seuls la République tchèque, la Hongrie, la Lituanie et la Slovaquie atteignent des taux compris entre 80 et 100 % dans ce dernier groupe.

Pour le "traitement plus rigoureux" ou traitement tertiaire, le taux moyen de conformité dans l’UE est de 77 %. Mais il cache un écart très grand entre l’UE-15, qui affiche un taux de traitement de 90 %, et l’UE-12 qui atteint 14 %. Quatre Etats membres atteignent des taux de 100 % (Autriche, Allemagne, Grèce et Pays-Bas).

Par ailleurs, la part du territoire de l’UE désignée comme zone sensible et devant ainsi faire l'objet d'un traitement tertiaire, a augmenté de deux points depuis le dernier rapport, pour atteindre pratiquement 75 % du territoire européen. Les progressions les plus fortes ont eu lieu en France et en Grèce.

Le Luxembourg et la ville de Luxembourg à la traîne

Le Luxembourg, pour sa part, est à la traîne. S’il atteint 100 % de conformité pour la collecte des eaux résiduaires urbaines, il affiche un taux de 57% pour le traitement secondaire et de seulement 38 % pour le plus rigoureux, comme on le lit dans l’annexe à ce 7e rapport, qui détaille les résultats par pays mais décrit aussi les performances des capitales. Le Luxembourg se place ainsi en 15e position, entre la Hongrie et la Slovaquie.

Un autre souci mis en avant par le rapport est le manque de mise en œuvre dans un nombre significatif de "grandes villes". 585 villes sont désignées comme telles dans le rapport parce qu’elles produisent des eaux résiduaires en quantité équivalente ou supérieure à celle produite par une population de 150 000 personnes. Ces grandes villes produisent à elles seules 45 % du total de la charge polluante collectée. Si la Commission européenne met en avant le taux de 91 % de la charge polluante qui reçoit un traitement tertiaire, soit une hausse de 14 points par rapport à deux ans auparavant, elle déplore en même temps le retard de certaines villes symboliques. La Commission européenne constate en effet que seules "11 des 27 capitales européennes ont un système de collecte et de traitement correspondant à des standards de techniques pourtant vieux de plus de vingt ans". "Etant donné la grande charge polluante de ces importants déversements, cela continue de causer une pollution environnementale considérable", commente-t-elle. Par ailleurs la Commission constate que la non-conformité avec la directive représentait 15 % du volume d’azote et 35 % de celui de phosphore déversés dans les mers.

La ville de Luxembourg fait partie des grandes villes et des capitales qui ne sont pas encore en conformité avec la directive de 1991. Elle ne respecte pas cette dernière quant au traitement secondaire pour un volume de 15 % de la charge polluante et pour 84% quant au traitement tertiaire, lit-on dans l’annexe. Sur les cinq stations d’épuration, celle d’Uebersyren, traitant 15% de la charge polluante, était en situation de non-respect de la directive pour la pollution biologique, pollution contre laquelle le traitement secondaire est requis. Les résultats sont défaillants pour quatre stations d’épuration (traitant 84 % de la charge polluante) pour le traitement de l’azote et dans deux stations (traitant 58 % de la charge polluante) pour le phosphore. La ville de Luxembourg a déjà dû expliquer son retard en matière de traitement des eaux résiduaires, en février 2012, suite à un reportage de RTL Radio Lëtzebuerg. 

Soutiens financiers et actions judiciaires

"Le traitement des eaux résiduaires constitue un test fondamental pour la société: assainissons-nous les saletés que nous produisons, ou polluons-nous l’environnement dont nous dépendons? Je suis soulagé de constater l'amélioration de la situation et je suis également heureux de voir que l’action de la Commission, conjuguant des mesures de soutien financier avec, le cas échéant, des actions en justice strictes, a porté ses fruits pour les citoyens européens", a déclaré Janez Potočnik, le commissaire européen en charge de l'environnement, lors de la publication du rapport.

La Commission européenne rappelle que les investissements de soutien, à travers le Fonds de cohésion et le Fonds européen de développement régional, se sont élevés à 14,3 milliards d’euros pour la période 2007-2013, dont 9,7 milliards d’euros pour la seule année 2010. Cette année-là, la Pologne (3,3 milliards d’euros), la Roumanie (1,2 milliard d’euros) et la Hongrie (600 millions d’euros) ont été les plus grandes bénéficiaires.

Dix Etats du groupe EU-15 restent visés par des procédures d’infraction qui ne sont pas encore closes. La Commission européenne, dans l’annexe au rapport, met en avant l’efficacité de ces procédures. Ainsi, alors qu’à travers deux procédures lancées en 1998 et en 2000 contre la France, 682 villes étaient visées, elles sont aujourd’hui quasiment toutes en conformité avec la directive.

Le Luxembourg a lui aussi fait l’objet d'une procédure en infraction et pourrait être amené à payer, à partir de 2016, et ce pour la première fois de son appartenance à l'UE, une amende pour manquement. Cette amende serait constituée d'une somme forfaitaire de 2,2 millions d’euros et d'une astreinte journalière de 11 340 euros, comme le faisaient remarquer, le 6 mai 2013, le président du tribunal de première instance, Marc Jaeger, et le juge de la Cour de justice de l'Union européenne, Jean-Jacques Kasel.