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Environnement - Transports
Les eurodéputés de la commission ENVI adoptent leur position sur l’application du SEQE à l’aviation civile et se préparent à négocier en trilogue
30-01-2014


Le système européen d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre (EU ETS, ou SCEQE) inclut depuis le 1er janvier 2012 les activités de transport aérien. Ainsi, en principe, toutes les compagnies aériennes – y compris celles des pays tiers – doivent désormais acquérir et restituer des quotas d’émission pour leurs vols au départ et à l’arrivée des aéroports européens.

La validité de cette décision vivement contestée, notamment par la Chine, l’Inde, la Russie ou les Etats-Unis, a été confirmée par un arrêt de la CJUE en décembre 2011.

Toutefois, la Commission a proposé de suspendre pour un an l’application de cette mesure pour les vols intercontinentaux au départ et à l’arrivée de l’Union européenne de façon à permettre à l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) de trouver un accord qui satisfasse l'ensemble des parties. Cette suspension, qui avait un effet immédiat, a été votée au Parlement européen en avril 2013. Le projet de loi actant cette décision était adopté par la Chambre des députés en juillet 2013.

Le 16 octobre 2013, dans la foulée d’un accord trouvé par l’OACI à Montréal en vue d’élaborer un instrument de marché mondial sur la réduction des émission de CO2 du secteur de l’aviation qui serait finalisé en 2016 pour entrer en vigueur en 2020, la Commission européenne a mis sur la table une proposition visant à n’appliquer sa législation qu’au seul espace aérien régional européen à dater du 1er janvier 2014.

En vertu de cette proposition, le système ETS serait ainsi appliqué de manière transitoire à tous les vols entre les aéroports de l'Espace économique européen (EEE), soit les 28 États membres de l'UE, plus la Norvège et l'Islande, jusqu’à ce que le mécanisme de l’OAIC ne s’applique à l’ensemble des émissions mondiales en 2020.

Pour ce qui est des vols entre l’EEE et les pays tiers (départ ou arrivée dans l’un des aéroports de l’espace régional), la proposition de la Commission prévoit de les faire contribuer à hauteur de la distance parcourue au sein de l’espace aérien européen, et donc de les faire bénéficier d’une exemption générale  pour les émissions produites en dehors de l’espace aérien européen. Ce qui va donc plus loin que le système appliqué actuellement qui restreint l’application de la directive aux vols intra-européens.

Les eurodéputés de la commission ENVI soutiennent l’approche de la Commission, vont même plus loin et ouvrent les négociations avec le Conseil

Le 30 janvier 2014, les eurodéputés de la commission de l’Environnement (ENVI) ont apporté leur soutien à l’approche de la Commission en adoptant par 41 voix pour, 7 contre et 6 abstentions le rapport de Peter Liese (PPE).

La commission a décidé d'ouvrir par la même occasion les négociations avec la présidence grecque du Conseil par 46 voix pour, 6 voix contre et une abstention. Le vote final en plénière devrait avoir lieu en avril, afin de publier la législation au Journal officiel de l'UE avant la fin de la législature.

Ainsi, le système européen d'échange de quotas d'émission (SEQE) couvrirait les émissions de CO2 des vols intercontinentaux en provenance ou à destination d'aéroports européens, pour les émissions au-dessus de l'espace aérien de l'UE et de l'EEE entre avril 2015 et 2016. Le régime suspensif actuel ("stop the clock"), qui couvre uniquement les vols intra-européens, se poursuivra jusqu'en avril 2015.

"Cette approche est beaucoup plus positive que la solution actuelle, car non seulement les vols intra-européens sont inclus mais également les vols vers des pays tiers, même s'il s'agit Peter Liese devant la presse le 30 janvier 2014 © European Union 2014 - EPuniquement de la partie du voyage qui couvre l'espace aérien européen", a expliqué le rapporteur Peter Liese. "Un vol de Paris ou Londres vers le nouvel aéroport d'Istanbul sera presque complètement inclus, alors qu'avec le régime actuel, il ne l'est pas du tout. La même logique s'applique aux aéroports des Émirats, qui ne font pas partie du système suspensif mais qui sont partiellement couverts par la proposition de la Commission européenne", a-t-il ajouté.

Les députés soulignent que la dérogation s'appliquera uniquement jusqu'en 2016, afin de faciliter un accord international sur un mécanisme de marché mondial. Ce mécanisme aurait pour objectif d'inclure le secteur de l'aviation dans les efforts de lutte contre le changement climatique.

Le temps gagné grâce à l'application du système suspensif ("stop the clock") pendant une année supplémentaire avant la fin de la dérogation, devrait être utilisé pour convaincre les pays tiers d'adhérer à une approche basée sur l'espace aérien, que l'UE appliquerait après 2016.

Faute d’un accord à l’OACI en 2016, les parlementaires proposent d’appliquer automatiquement le SEQE original en 2017

Les parlementaires précisent qu'une nouvelle législation européenne sera uniquement nécessaire si l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) adopte un accord lors de son assemblée en 2016. Si ce n’était pas le cas, la dérogation expirerait et le SEQE original s'appliquerait automatiquement dans son entièreté à compter de 2017, les paiements étant à effectuer en 2018.

"Nous devons nous préparer à une mise en œuvre totale de notre système en 2016 en cas d'absence d'accord à l'échelle internationale. Cela signifierait que notre système couvrirait aussi totalement les vols intercontinentaux. En cas d'accord majeur à l'OACI en 2016, nous devrons à nouveau analyser la situation", a expliqué Peter Liese.

Cette proposition va plus loin que la proposition de la Commission qui proposait d'appliquer l'ETS à l'espace aérien européen jusqu'en 2020, date prévue pour l'entrée en vigueur du mécanisme de marché mondial. Et elle risque de se heurter à quelques résistances dans les négociations avec le Conseil où certains Etats membres souhaiteraient maintenir le gel pratiqué actuellement au moins jusqu’en 2016. Toutefois, comme l’a expliqué Peter Liese, "il n’y a pas encore de position officielle au Conseil".

Les parlementaires veulent que les Etats membres allouent les revenus du SEQE à des mesures de lutte contre le changement climatique

Autre initiative des parlementaires, la volonté de voir les États membres utiliser les revenus générés par le système d'échange de quotas d'émission pour financer les efforts de lutte contre le changement climatique. Ces mesures devraient être prises au niveau international, en particulier, dans le but de réduire les émissions de gaz à effet de serre, de permettre aux pays en développement de s'adapter aux effets du changement climatique, et de financer la recherche et le développement en la matière. "Les recettes des enchères sont actuellement reversées dans les budgets des États membres. Il faut une affectation juridiquement contraignante pour ces crédits", estime en effet Peter Lies. Un sujet qui risque d’être une pierre d’achoppement dans les négociations avec le Conseil, car "les ministres des Finances ne sont pas d'accord". Pour le rapporteur, qui a aussi été mandaté par ses pairs pour négocier en trilogue, "ce n'est pas un impôt mais un instrument environnemental".