En décembre 2012, la Commission présentait un projet de révision de la directive sur les produits du tabac. Un texte sur lequel le Parlement européen a adopté sa position le 8 octobre 2013, avant qu’un accord ne soit trouvé en trilogue en décembre 2013. Le compromis trouvé alors doit désormais passer les étapes d’une adoption officielle de la part du Conseil et du Parlement européen.
Le 22 janvier 2014, la commission Environnement, santé publique et sécurité alimentaire du Parlement européen a donné son feu vert. L’eurodéputée Astrid Lulling (PPE), qui n’est pas membre de cette commission, mais qui n’avait néanmoins pas manqué de faire entendre ses réserves à l’égard de la position adoptée par le Parlement européen en vue des négociations avec le Conseil, a réagi le 29 janvier 2014 par voie de communiqué pour dénoncer un compromis qui présente selon elle "des erreurs de facture qui auront pour conséquences insécurité juridique et grandes difficultés de mise en œuvre".
L’eurodéputée cite pour exemple l’obligation "irréalisable" qui incombera aux fabricants de prévoir sur un paquet de tabac à rouler des avertissements sanitaires couvrant 115 % de la face avant, un chiffre auquel elle arrive en ajoutant les 65 % de la surface que doit prendre un avertissement combinant texte et image et un message de mise en garde qui doit être ajouté sur 50 % de la surface – un chiffre qui concerne notamment les Etats membres ayant plus de deux langues officielles, comme c’est le cas du Luxembourg.
Astrid Lulling déplore ainsi que les eurodéputés de la commission ENVI aient adopté ce texte à une large majorité tout en sachant qu’il était inapplicable en l’état, et elle critique le fait que certains aient pu expliquer leur choix en se disant que la Commission éliminerait cette erreur par le biais d’un règlement d’application dont elle regrette le caractère "démocratiquement non contrôlable".
L’eurodéputée dénonce "un mauvais compromis" qui va induire des changements financièrement insoutenables pour les PME, puisqu’elles vont devoir introduire de nouvelles machines. Astrid Lulling cite notamment le cas de l’entreprise Heintz van Landewyck, où des centaines d’emplois risquent d’être menacés au Luxembourg. "Ce sont essentiellement des emplois de femmes peu qualifiées élevant seules leurs enfants pour lesquelles le marché du travail offre peu d’alternatives", souligne Astrid Lulling qui souligne que les grands groupes ne peuvent que se réjouir d’être ainsi débarrassés de la concurrence que représentent les PME et leurs produits de niche.
Astrid Lulling pointe aussi les désagréments que cette nouvelle directive va causer aux fabricants de cigares puisqu’ils vont devoir mettre des messages d’avertissement à l’intérieur des paquets de cigares, et ce dans la langue du pays où le produit est destiné à être vendu. Là encore, l’eurodéputée souligne combien cette obligation – qu’elle juge par ailleurs insensée puisqu’elle revient à mettre en garde un consommateur une fois qu’il a déjà acheté le produit – sera difficile à mettre en pratique. En effet, les cigares sont produits, emballés et stockés avant que l’on ne sache dans quels pays ils vont être vendus, explique l’eurodéputée qui imagine les difficultés que vont avoir les entreprises concernées, souvent très petites, pour rouvrir les paquets afin d’y glisser les messages d’avertissement dans la bonne langue. "Les coûts engendrés risquent de porter préjudice à la compétitivité de ces entreprises, et notamment des PME", dénonce Astrid Lulling.
L’eurodéputée critique enfin un compromis qui risque de faire disparaître du marché les cigarettes électroniques, un produit de transition qu’elle juge moins mauvais pour la santé des fumeurs. Ce qui réjouirait selon elle les grands groupes producteurs de tabac ainsi que l’industrie pharmaceutique qui serait débarrassée de la concurrence que représentent les cigarettes électroniques pour ses produits d’aide au sevrage tabagique.
Autant d’exemples qui sont pour Astrid Lulling une raison de ne pas voter ce texte lorsqu’il sera soumis au suffrage des parlementaires européens en plénière.