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Justice, liberté, sécurité et immigration
Le Parlement européen a adopté un rapport formulant des suggestions et demandant des précisions sur le projet de parquet européen
12-03-2014


Le 12 mars 2014, les eurodéputés réunis en plénière ont adopté le rapport de Salavatore Iacolino (PPE) sur le futur parquet européen. La Commission européenne a présenté en juillet 2013 un projet de parquet européen sur les fraudes au budget de l’UE, un projet qui intéresse tout particulièrement le Luxembourg qui revendique le siège de ce futur parquet.

Dans ce dossier qui requiert l’unanimité du Conseil, le Parlement européen dispose d’un droit de veto, puisqu’il doit donner son consentement au projet par un vote d’approbation.

En attendant, le Parlement européen a formulé un certain nombre de suggestions et à fournir des précisions politiques sur le texte proposé par la Commission, qui sera amené à faire l'objet d'une analyse par le Conseil.

Les députés souhaitent que le Parlement européen soit pleinement associé aux débats et à la définition de la proposition et que ses observations soient prises en compte par le colégislateur. Ils invitent par conséquent le Conseil à tenir compte des recommandations suivantes :

  • préciser clairement en amont les critères non discrétionnaires qui déterminent la juridiction compétente;
  • accorder au Parquet européen une indépendance totale, tant par rapport aux gouvernements nationaux que par rapport aux institutions européennes ;
  • clarifier le champ de compétence du Parquet européen au moyen d’une révision des définitions visées de la proposition de la Commission sur la compétence accessoire ;
  • mentionner spécifiquement que le Parquet européen ne peut engager des poursuites concernant des infractions qui ne sont pas encore prévues par la législation pertinente des États membres au moment de l'infraction ;
  • définir de manière détaillée les critères permettant l'utilisation des mesures d'enquête afin d'exclure toute "recherche de la juridiction la plus favorable" ;
  • faire en sorte que les conditions d'admissibilité des preuves respectent tous les droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, par la Convention européenne des droits de l'homme et par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme;
  • maintenir le droit à un recours juridictionnel effectif à tout moment dans le cadre de l'action du Parquet européen dans l'ensemble de l'Union ;
  • préciser que, après le classement sans suite par le Parquet européen d'une affaire liée à des délits mineurs, les autorités nationales chargées des poursuites peuvent poursuivre l'enquête et les poursuites si elles y sont autorisées en vertu de leurs législations et que le classement sans suite est obligatoire lorsqu'il n'est pas possible de remédier de manière prévisible à l'absence de preuves pertinentes par des mesures d'enquête proportionnée.

Le rapport recommande également au Conseil de tenir compte du fait que toutes les activités du Parquet européen devront respecter les normes les plus élevées en termes de droits de la défense, de veiller au respect du principe "ne bis in idem" et enfin de faire en sorte que le modèle organisationnel central du Parquet européen garantisse un niveau suffisant de compétences, d'expérience et de connaissances des systèmes juridiques des États membres.

Enfin, le Conseil est invité à préciser les compétences de chacun des organes qui sont chargés aujourd'hui d'assurer la protection des intérêts financiers de l'Union. Aux yeux des parlementaires, il importe à cet égard de définir plus finement les relations entre le Parquet européen et les autres organes en place, comme Eurojust et l'OLAF, et de délimiter clairement leurs attributions.

Le rapport de Salvatore Iacolino a été adopté par 487 voix pour, 161 contre et 30 abstentions. Les eurodéputés luxembourgeois ont tous voté en faveur de ce texte, à l’exception de Robert Goebbels (S&D), qui s’en est expliqué par voie de communiqué. "Le Parlement européen, comme à son habitude, y voit une possibilité d'accroitre ses pouvoirs", estime l’eurodéputé socialiste qui juge "plus que douteux qu'une politisation de la nomination du procureur européen et de ses délégués à travers le Parlement soit dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice européenne". Il exprime par ailleurs ses doutes à l’idée que la création d'un seul parquet européen soit judicieuse en l'absence d'un droit pénal et d'un code de procédures européens ainsi qu'en l'absence d'un tribunal pénal européen.