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Agriculture, Viticulture et Développement rural
Conseil Agriculture – Désaccord sur le lait, accord sur les fruits et légumes, rejet d’une demande du Parlement sur l’étiquetage des viandes réfrigérées, inquiétudes sur le paquet "Air pur pour l’Europe" et entretiens sur le TTIP
16-06-2014


conseil-agri-etgenLes ministres de l'Agriculture de l'UE se sont réunis les 16 et 17 juin 2014 à Luxembourg, pour évoquer la mise en œuvre de la réforme de la politique agricole commune (PAC) au niveau national. Ils devaient adopter des conclusions sur le dossier du lait mais n’y sont pas arrivés. La Présidence grecque du  Conseil est par contre arrivée à faire l'adopter des conclusions sur le fonctionnement de l'organisation du marché des fruits et légumes. En ce qui concerne une résolution parlementaire du Parlement européen qui demandait à la Commission de revoir un règlement concernant l’étiquetage des viandes fraîches, réfrigérées et congelées des animaux des espèces porcine, ovine, caprine et des volailles, le Conseil a rejeté la demande du Parlement. Le Luxembourg a estimé que cette demande n'était pas fondée en droit et que l'acte d'exécution de la Commission, qui met en œuvre les dispositions adopté dans le cadre du règlement sur l'étiquetage des denrées alimentaires de 2011, devait être maintenu en l'espèce. Les ministres européens ont aussi eu un entretien avec leur homologue américain, Tom Vilsack, en tournée en Europe, qui s’est concentré sur le TTIP.

Lait

La Commission avait présenté aux membres du Conseil un rapport concernant l'évaluation de la situation du marché dans le secteur du lait, ce rapport étant prévu dans le cadre du règlement "paquet lait". Mais les ministres n’ont pas pu trouver un consensus sur un premier projet de conclusions sur l'avenir du secteur laitier dans lequel la Présidence grecque proposait un "atterrissage en douceur" en vue de la fin des quotas de lait en 2015 dans lequel il était demandé à la Commission européenne de réviser les coefficients de correction afin de limiter le superprélèvement pour dépassement de quotas. Il a été retenu que les discussions en vue d’un accord  se poursuivraient lors de la session du Conseil au mois de juillet 2014.

Deux camps s'étaient affrontés : celui des Etats membres qui veulent une baisse du coefficient de matière grasse du lait (ce qui revient à augmenter les quotas de production), parmi eux des Etats membres qui ont dépassé leurs quotas et qui ne veulent pas payer de superprélèvement (amendes en cas de dépassement des quotas laitiers). Le Luxembourg fait partie de ce camp qui compte une dizaine de pays, dont l'Autriche, l'Allemagne, le Danemark, l'Irlande, les Pays-Bas et la Belgique. Une dizaine d’autres Etats membres rejettent cette baisse du coefficient de matière grasse. Dacian Ciolos, le commissaire européen à l'Agriculture, qui est compétent pour fixer le taux de matière grasse, aurait fait une proposition de compromis si le Conseil n’était resté divisé.

Fruits et légumes

Le Conseil a par contre pu adopter à l’unanimité des conclusions sur le rapport de la Commission relatif à la mise en œuvre des dispositions concernant les organisations de producteurs (OP), les fonds opérationnels et les programmes opérationnels dans le secteur des fruits et légumes. Cet accord a été possible grâce à une déclaration de la Commission européenne prévoyant un rapport au plus tard en 2018 sur de possibles propositions législatives sur les règles communautaires dans ce secteur.

Ce rapport de la Commission fut prévu dans le cadre de la réforme du secteur des fruits et légumes de 2007, qui était notamment destinée à renforcer le rôle des organisations de producteurs.

Dans ses conclusions, le Conseil exprime un avis favorable vis-à-vis du rapport et partage l'évaluation de la Commission quant à l'augmentation de la valeur de production totale des fruits et légumes dans l'Union européenne. Le Conseil estime que les outils de la Commission en matière de prévention et de gestion des crises sont une base solide et efficace.

En ce qui concerne la procédure de mise en place d'une OP ayant accès aux fonds opérationnels, le Conseil suggère une simplification des procédures et l'établissement d'un cadre claire et transparent pour mieux répondre au marché. Finalement, le Conseil invite la Commission à annoncer ses intentions futures sur la PAC après 2020 pour ce secteur avant la fin de cette période financière.

Mise en œuvre de la réforme de la politique agricole commune (PAC) au niveau national

Les ministres de l'Agriculture ont aussi procédé à un échange de vues sur la mise en œuvre actuelle de la réforme de la politique agricole commune (PAC) au niveau national, notamment le volet des paiements directs dans les Etats membres respectifs.

En ce qui concerne le premier pilier de la PAC, le Luxembourg passera de 1 à 4 régimes. Le régime du verdissement présente le plus grand défi, à la fois pour les agriculteurs et les administrations: "Nous essayons de donner aux agriculteurs suffisamment de flexibilité dans leurs efforts de respecter leurs exigences, notamment en ce qui concerne les surfaces d'intérêt écologique", a précisé Fernand Etgen, le ministre luxembourgeois de l’Agriculture.

L'aide aux jeunes producteurs constitue, quant à elle, une aide précieuse lors du changement de génération au niveau des chefs d'exploitation. Afin de garantir un traitement égal entre différents types d'exploitations, ce régime d'aides aux jeunes producteurs sera mis en œuvre via un montant forfaitaire. "Nous allons également utiliser pleinement les possibilités prévues dans le cadre du développement rural en matière d'installation des jeunes", a déclaré le ministre de l'Agriculture.

Une aide couplée en faveur des cultures de légumineuses sera mise en œuvre, à la fois dans le souci de garantir un approvisionnement continu en protéagineux et fourrages protéiques et pour leurs effets bénéfiques en termes de fertilisation des sols.

Finalement, le régime d'aide direct sera maintenu tel qu'il existe depuis 2005.

Indication de l'origine de la viande porcine/volailles : le Conseil rejette la position du Parlement européen

La Commission européenne a informé le Conseil au sujet du règlement concernant l'indication du pays d'origine ou du lieu de provenance des viandes fraîches, réfrigérées et congelées des animaux des espèces porcine, ovine, caprine et des volailles.

En effet, suite à l'adoption des règles sur l'indication de l'origine pour différents types de viande et produits de viande via un règlement d'exécution de la Commission en décembre 2013, le Parlement européen a adopté en février 2014 une résolution qui demande la rétraction de l'acte d'exécution de la Commission.

Dans cette résolution adoptée par 368 voix pour, 207 voix contre et 20 abstentions, le Parlement européen invite la Commission européenne à revenir sur ce règlement d’exécution et à lui soumettre une version révisée afin d’étendre aux espèces porcine, ovine, caprine et aux volailles toutes les obligations d’étiquetage valables pour la viande bovine depuis plus de dix ans. Ainsi, l’étiquetage serait obligatoire pour le lieu de naissance, le lieu d'élevage et le lieu d'abattage de ces viandes. Le Parlement réclamait notamment une proposition législative pour rendre obligatoire la mention de l'origine de la viande dans les plats préparés, suite aux récents scandales. Les eurodéputés ont aussi réclamé que la Commission supprime toute dérogation aux exigences de traçabilité pour la viande émincée, la viande agglomérée, et les chutes de parage.

De son côté, la Commission européenne avait présenté en mars 2014 aux ministres un rapport datant de décembre 2013 sur la possibilité d'étendre l'indication obligatoire de l'origine à toutes les viandes utilisées comme ingrédient. L'une des principales conclusions de ce rapport est que les consommateurs sont intéressés par une indication de l'origine de la viande, mais qu'ils ne sont pas disposés à payer les hausses de prix inhérents à cet étiquetage, et que des hausses de prix inférieures à 10 % font chuter de 60 à 80 % la volonté du consommateur de payer davantage. D'après ce rapport, plus l'indication sera précise, plus les coûts seront élevés.

Si de nombreux Etats membres se sont déclarés favorables à l'introduction d'une indication obligatoire, aucune délégation ne s'est prononcée en faveur de la résolution du Parlement européen. La Commission a reçu le soutien de l'Irlande, de l'Espagne, de la France, des Pays-Bas, de la Belgique et du Portugal, pour qui le Parlement est allé trop loin. Le Luxembourg a estimé que la résolution parlementaire n'était pas fondée en droit et que l'acte d'exécution de la Commission, qui met en œuvre les dispositions adopté dans le cadre du règlement sur l'étiquetage des denrées alimentaires de 2011, devait être maintenu en l'espèce, rapporte un communiqué diffusé par le ministère luxembourgeois de l'Agriculture.

Le Luxembourg soutient la Hongrie sur le paquet législatif "Air pur pour l’Europe"

Les travaux du Conseil ont continué avec une information de la délégation hongroise, soutenue par les délégations belge, croate, estonienne, slovaque et lettone dans le cadre de la proposition législative dénommée "Clean Air Policy Package" ou "Air pur pour l’Europe".

Pour rappel : La Commission européenne a adopté le 18 décembre 2013 un train de nouvelles mesures qu’elle propose pour lutter contre la pollution atmosphérique. Ce train de mesures veut actualiser la législation en vigueur sur la qualité de l’air afin de réduire les émissions nocives de l’industrie, du transport, des installations de production d’énergie et de l’agriculture, ce pour limiter leur impact sur la santé humaine et sur l’environnement.

La Commission est partie du constat que la mauvaise qualité de l’air coûte plus cher en vies humaines que les accidents de la route, ce qui en fait la première cause de décès prématuré lié à l’environnement dans l’UE. La Commission estime qu’en 2010, 400 000 personnes sont décédées prématurément dans l’UE à cause de la pollution de l’air, et deux tiers de son territoire sont exposés à une qualité de l’air en-deçà des niveaux de sécurité. La pollution atmosphérique cause des dommages aux matériaux, aux bâtiments et certains polluants conduisent à des effets de serre et contribuent au changement climatique. L’impact économique des dommages causés à la santé des personnes se situe entre 330 et 940 milliards d’euros, donc entre 3 et 9 % du PIB de l’UE. À cause de l'asthme ou des problèmes respiratoires qu'elle engendre, elle a également une incidence sur la qualité de vie.

A noter que le Luxembourg se distingue dans le rapport annuel 2013 de l’Agence européenne de l’Environnement (AEE ou EEA) par ses dépassements en matière d’émissions d'oxydes d'azote et il fait partie d’un groupe de 17 pays où des concentrations de mercure critiques sont répandues à travers 90 % de leur écosystème.

La délégation hongroise a demandé au Conseil Agriculture que la discussion sur cette proposition visant de nouvelles obligations de réduction d'émissions nationales à partir de 2020 soit conduite en étroite collaboration avec le Conseil Environnement et le Conseil Compétitivité. Selon la délégation hongroise, la discussion devrait se baser sur les conclusions du Conseil Environnement et le Conseil Agriculture devrait être informé sur l'état d'avancement du dossier.

Fernand Etgen a soutenu ces demandes et a souligné l'importance d'une association étroite du Conseil Agriculture aux futurs débats sur ce dossier. 

Le TTIP a l’ordre du jour des entretiens avec le ministre de l’Agriculture américain, Tom Vilsack

Fernand Etgen a, lors d’une conférence de presse en marge du Conseil, commenté les entretiens des ministres de l’Agriculture avec leur homologue des USA, Tom Vilsack. Selon le ministre luxembourgeois, Tom Vilsack aurait reconnu le niveau élevé des normes de sécurité alimentaire européennes. Il aurait également reconnu que "si les négociations sur le TTIP doivent être acceptées, elles doivent être transparentes".

Pour Fernand Etgen, les discussions avec les citoyens sur le TTIP pendant la campagne électorale des européennes a montré "les conséquences émotionnelles" de ces négociations. "Ce serait un échec si ces négociations ne devaient pas aboutir", a-t-il déclaré. Or, estime-t-il, "le Luxembourg a du point de vue agricole un grand intérêt à ce qu’elles soient un succès, car il est un exportateur net de produits agricoles", a ajouté le ministre. Les normes européennes devront valoir pour les importations américaines et il est convaincu qu’elles ne souffriront pas d’une mise en œuvre du TTIP. Ce qu’il faut maintenant, c’est "créer la confiance chez les consommateurs" et faire passer le message que "le TTIP ne changera rien sur les normes de sécurité alimentaire, sur le bio et les OGM". Selon le ministre, la question du mécanisme de protection des investissements n’a pas été abordée.