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Déjugeant les propositions de la Commission européenne, le Parlement européen veut des règles d’étiquetage aussi strictes pour les viandes porcines, ovines, caprines et de volailles que pour la viande bovine
06-02-2014


etiquetage-tracabilite-viande (source: Parlement européen)Le Parlement européen a suivi l’avis de sa commission environnement, santé publique et sécurité alimentaire (ENVI) en adoptant, le 6 février 2014 en séance plénière, une résolution non législative invitant la Commission européenne à revenir sur un règlement d’exécution relatif à l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires, pour les animaux des espèces porcine, ovine, caprine et des volailles.

Dans la résolution adoptée par 368 voix pour (dont celles des eurodéputés luxembourgeois PPE Georges Bach et Astrid Lulling, du vert Claude Turmes et du socialiste Robert Goebbels), 207 voix contre (dont celles de l'eurodéputé PPE Frank Engel et celle de son homologue libéral Charles Goerens) et 20 abstentions, les députés ont souhaité que la Commission européenne retire sa proposition, publiée le 14 décembre 2013.

Les eurodéputés demandent que l'exécutif européen leur soumette une version révisée de son règlement d'exécution, afin d’étendre à ces espèces toutes les obligations d’étiquetage valables pour la viande bovine. Ainsi, l’étiquetage serait obligatoire pour le lieu de naissance, le lieu d'élevage et le lieu d'abattage de ces viandes, selon les principes de la législation sur l'étiquetage obligatoire de l'origine de la viande bovine et des produits de la viande bovine, en vigueur dans l'UE depuis le 1er janvier 2002.

Le projet de règlement de la Commission européenne

Le Parlement européen s’est donc opposé au système proposé par la Commission, qui prévoyait que les étiquettes indiqueraient uniquement les pays d'élevage et d'abattage. Selon ce texte, à compter du 1er avril 2015, les mentions de "Pays d’élevage" et de "Pays d’abattage" auraient dû figurer sur les étiquettes de ces viandes remises au consommateur. Une dérogation aurait toutefois été accordée pour la viande émincée et la viande agglomérée.

A ce sujet, le règlement de la Commission permettait de considérer comme lieu d’élevage le dernier pays dans lequel un porc fut élevé pendant quatre mois d’affilée, un poulet pendant un mois et un mouton ou une chèvre pendant six mois de suite. En outre, les exploitants prouvant aux autorités compétentes que les viandes étaient issues d’animaux nés, élevés et abattus dans un seul Etat membre ou pays tiers pouvaient indiquer ce pays comme pays d’"Origine". Pour les viandes en provenance de pays tiers, la mention "hors UE" était jugée suffisante pour indiquer le lieu d’élevage.

Le texte ne prévoyait en revanche pas l’obligation de mentionner le lieu de naissance des animaux, malgré les demandes répétées du Parlement à ce sujet. Le 14 janvier 2014, le Parlement avait ainsi réclamé une proposition législative pour rendre obligatoire la mention de l'origine de la viande dans les plats préparés, suite à de nouveaux scandales. Les eurodéputés avaient aussi déjà, à cette occasion, réclamé l'extension à toutes les viandes des règles déjà applicables pour l'étiquetage de la viande bovine.

Dans leur résolution, les eurodéputés ont aussi réclamé que la Commission supprime toute dérogation aux exigences de traçabilité pour la viande émincée, la viande agglomérée, et les chutes de parage, présente dans le règlement.

La position du Parlement européen

"Les consommateurs souhaitent avoir une vue d'ensemble de la chaîne d'approvisionnement de la viande. C'est pourquoi je demande que les lieux de naissance, d'élevage et d'abattage apparaissent sur l'étiquette. De nombreux citoyens veulent savoir si les animaux sont originaires de pays qui appliquent des normes de bien-être élevées et veulent connaître la distance parcourue par les bêtes pour des raisons d'éthique et d'environnement", a affirmé la rapporteure du texte, la britannique Glenis Willmott (S&D) selon un communiqué diffusé à l’issue du vote. Et la députée socialiste de préciser qu’il n’y a aucune raison que les règles appliquées pour la viande bovine ne le soient pas pour toutes les autres.

La députée socialiste a par ailleurs critiqué la position du Conseil pour avoir marqué son accord pour n’indiquer que l'endroit de l'élevage et de l'abattage avant même le vote du Parlement. "Je suis amèrement déçu que les Etats membres veuillent diluer cet étiquetage et priver les consommateurs de l'image complète. J'espère que la position du Parlement le fera réfléchir à nouveau."

"La bataille pour un étiquetage honnête des denrées alimentaires continue, et je vais maintenant concentrer mes efforts à m'assurer que nous obtenions l’étiquetage du pays d'origine de la viande dans les aliments transformés. Un an après le scandale de la viande de cheval, nous devrions faire des changements fondamentaux. Rendre la mention du pays d'origine obligatoire forcera les fabricants à avoir un meilleur contrôle sur leur chaîne d'approvisionnement, et permettrait d'éviter un autre scandale", a-t-elle ajouté.

Les réactions

Dans un communiqué diffusé sur le site du groupe des Verts/ALE, Michèle Rivasi, vice-présidente du groupe, poursuit: "Le scandale de la viande de cheval n'en finit plus de faire les grands titres et d'inquiéter les consommateurs, qui veulent savoir exactement ce qu'ils ont dans leur assiette. C'est pourquoi devons renforcer les règles d'étiquetage de la viande, avec des règles de traçabilité plus strictes. Un étiquetage complet et exhaustif permettrait non seulement de savoir combien de kilomètres l'animal a parcouru, mais aussi dans quelles conditions il a été abattu (s'il s'agit de pays qui respectent les normes relatives au bien-être des animaux)."

"Quant à l'argument de l'industrie, repris par la Commission selon lequel les prix vont s'envoler avec cet étiquetage plus complet, il ne tient pas : il n'y a qu'à voir ce qu'il s'est passé avec la viande bovine, cela fonctionne puisque les prix n'ont pas dramatiquement augmenté, donc pourquoi pas appliquer ces règles aux autres types de viande? Nous demandons donc à la Commission de revoir sa copie et de répondre aux attentes des consommateurs européens qui demandent plus de transparence", appuie la députée membre de la commission de l'industrie et membre suppléante de la commission ENVI du Parlement européen.

L’eurodéputé français Alain Cadec (PPE) s’est pour sa part félicité que "le Parlement [ait mis] son veto à la proposition de la Commission européenne qui consiste à demander que soient étiquetés de manière différente la viande bovine fraiche et les autres types de viandes congelées. Pour moi, cette différence n'est pas admissible, ce vote est donc une réelle victoire pour les éleveurs et les consommateurs", a souligné celui qui occupe la vice-présidence de la commission de la pêche du Parlement.

Dans un communiqué diffusé à l’issue du vote, celui-ci poursuit: "Pour les éleveurs, cet étiquetage ne représente pas de coût supplémentaire. De plus, il faut rendre cette information disponible au consommateur! Ils veulent connaitre l’origine de la viande, notamment le pays de naissance, d’élevage et d’abattage. Les mêmes règles doivent s'appliquer à la viande hachée, aux viandes porcines, ovines et caprines congelées, c'est une question de traçabilité et de transparence!"

Le 29 janvier 2014, dans un communiqué de presse, le Bureau Européen des Unions de Consommateurs (BEUC) a rappelé que les trois mesures mentionnées par la Commission européenne dans son plan d’action de mars 2013, en réaction au scandale de la viande de cheval, n’avaient toujours pas été adoptées. "La confiance des consommateurs dans le secteur alimentaire remonte mais le remède réside dans une plus grande transparence", a déclaré sa directrice, Monique Goyens, à cette occasion en appelant à "des labels plus clairs et des contrôles plus durs", ainsi que des amendes plus élevées.

Pour mémoire, le règlement d’exécution UE n° 1337/2013 en question fixe les règles relatives à l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance sur l’étiquette des viandes fraîches, réfrigérées et congelées des animaux des espèces porcine, ovine, caprine et des volailles, en vertu du règlement de l'UE relatif à l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires (règlement 1169/2011).