Le second train de mesures restrictives économiques de l’UE contre la Russie en raison des actions imputées à Moscou dans la crise ukrainienne est entré en vigueur, le 12 septembre 2014, suite à la publication des nouvelles sanctions au Journal officiel de l’UE.
Pour rappel, le Conseil européen extraordinaire du 30 août avait demandé un renforcement des sanctions économiques déjà en place contre la Russie, condamnant notamment "l'agression des forces armées russes sur le sol ukrainien". Le Comité des Représentants permanents (COREPER) avait validé de nouvelles propositions le vendredi 5 septembre 2014, mesures qui ont été confirmées par le Conseil le lundi 8 septembre et devaient entrer en vigueur dans la foulée.
Or, une nouvelle réunion des ambassadeurs des Etats membres auprès de l’UE le même jour avait mis en évidence des divergences sur le moment opportun de l’entrée en force des nouvelles sanctions, notamment en raison d’un accord de cessez-le-feu signé à Minsk le 5 septembre entre l’Ukraine et les séparatistes ukrainiens pro-russes.
Le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, avait alors expliqué dans une déclaration que leur mise en œuvre interviendrait dans les "prochains jours", sans toutefois apporter plus de précisions. Le COREPER s’est donc à nouveau réuni les 10 et 11 septembre, pour finalement s’accorder sur la date du 12 septembre pour appliquer les nouvelles sanctions. Celles-ci se composent d’un ensemble de mesures renforcées liées à l'accès aux marchés des capitaux, à la défense, aux biens à double usage et aux technologies sensibles.
Les restrictions relatives à l'accès de la Russie aux marchés des capitaux de l'UE ont tout d’abord été renforcées, lit-on dans un communiqué diffusé par le service de presse du Conseil. Ainsi sont "interdites les opérations, directes ou indirectes, d'achat, de vente, de prestation de services d'investissement ou d'aide à l'émission, de valeurs mobilières et d'instruments du marché monétaire dont l'échéance est supérieure à 30 jours [contre 90 jours lors de la première vague de sanctions économiques du 1er août 2014, ndlr], émis après le 12 septembre 2014, ou toute autre transaction portant sur ceux-ci", lit-on dans le Journal officiel.
Ces restrictions s’appliquent notamment "à cinq grandes banques publiques russes" auxquelles "les ressortissants et les entreprises de l'UE ne peuvent plus accorder de prêts", poursuit le communiqué du Conseil. Les mêmes restrictions s'appliqueront à trois grandes entreprises russes du secteur de la défense (OPK Oboronprom, United Aircraft Corporation et, Uralvagonzavod) et de trois autres du secteur de l'énergie (Rosneft, Transneft et Gazprom neft). La fourniture de services liés à l'émission des instruments financiers susmentionnés, comme le courtage, entre aussi dans le cadre de l'interdiction.
En outre, après avoir subordonné l’exportation vers la Russie de certains équipements et technologies liés à l'énergie à l’autorisation des Etats membres, il est désormais "interdit de fournir, directement ou indirectement, certains services nécessaires à l'exploration et à la production de pétrole en eaux profondes, à l'exploration ou à la production de pétrole dans l'Arctique et à des projets dans le domaine du schiste bitumineux en Russie". Il s'agit du forage, des essais de puits, de la diagraphie et de la complétion, ainsi que de la fourniture d'unités flottantes.
L'interdiction frappant l'exportation de biens et de technologies à double usage à des fins militaires en Russie a qui plus est été élargie afin d'inclure également "une liste de neuf sociétés mixtes du secteur de la défense" auxquelles des biens à double usage originaires de l'UE ne peuvent plus être fournis. Les sociétés visées ne pourront par ailleurs bénéficier d’aucune assistance technique ou financière pour la fourniture, la fabrication, l'entretien et l'utilisation de ces biens et technologies.
Par ailleurs, 24 personnes ont été ajoutées à la liste de celles qui font l'objet d'une interdiction de pénétrer sur le territoire de l'UE et d'un gel de leurs avoirs. "Il s'agit notamment de personnes associées à des actions menées contre l'intégrité territoriale de l'Ukraine, dont les nouveaux dirigeants du Donbass, les membres du gouvernement de Crimée ainsi que des décideurs et des oligarques russes", lit-on dans le communiqué diffusé par le Conseil. Sont ainsi visés plusieurs "ministres" des "Républiques populaires" autoproclamées de Donetsk et Lougansk, des chefs de milices, ainsi que plusieurs députés russes pour leur soutien à l’annexion de la Crimée.
Cela porte à 119 le nombre total de personnes faisant l'objet de sanctions, tandis que 23 entités demeurent soumises à un gel de leurs avoirs dans l'UE.
Par ailleurs, la base juridique a été élargie pour pouvoir imposer un gel des avoirs et une interdiction de pénétrer sur le territoire de l'UE à des personnes ou des entités effectuant des transactions avec des groupes séparatistes dans la région du Donbass.
Dans une déclaration diffusée le 11 septembre 2014, le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, a souligné que le Comité des représentants permanents devrait effectuer "avant la fin du mois" un examen complet de la mise en œuvre du plan de paix en Ukraine sur la base d'une évaluation effectuée par le Service européen pour l'action extérieure (SEAE).
"Nous avons toujours insisté sur la réversibilité et l'évolutivité de nos mesures restrictives. Par conséquent, à la lumière de l'examen et si la situation sur le terrain le justifie, la Commission et le SEAE sont invités à présenter des propositions en vue de modifier, de suspendre ou d'abroger l'ensemble des sanctions en vigueur, en tout ou en partie", a-t-il déclaré, notant que le Conseil examinera ces propositions urgence en vue de prendre des mesures le cas échéant.
La Commission européenne a annoncé le 10 septembre la suspension des mesures d'urgence en faveur des marchés des fruits périssables et des légumes (d’une valeur de 125 millions d’euros) qui avaient été présentées le 18 août 2014 à la suite de l'embargorusse interdisant l'importation de certains produits agricoles de l'UE. La Commission a souligné dans un communiqué que si ces mesures ont suscité "un vif intérêt des secteurs concernés", le système a été confronté à une "hausse disproportionnée dans les revendications", la contraignant donc à le suspendre. Ainsi les chiffres présentés pour certains produits étaient plusieurs fois plus élevés que le total des exportations annuelles moyennes de l'UE vers la Russie. Selon des sources journalistiques sérieuses et concordantes, ces revendications venaient avant tout du secteur maraîcher polonais.
Afin de prolonger l'efficacité des mesures d'urgence et d'atteindre encore l'objectif de stabilisation des marchés pour ces produits dans tous les Etats membres concernés par l'embargo russe, la Commission européenne promet néanmoins qu’elle va présenter "un programme plus ciblé dans un proche avenir", en tenant compte de l'expérience des dernières semaines.
"La Commission européenne reste déterminée à soutenir les producteurs qui ont soudainement perdu un marché important en raison des mesures russes. J'ai l'intention de présenter un nouveau régime dans les jours à venir, qui sera plus ciblé et efficace", a déclaré le commissaire en charge de l’agriculture, Dacian Cioloş, cité dans le communiqué.