La présidence italienne et le commissaire européen sortant au Commerce, Karel de Gucht, ont plaidé pour la finalisation de l’accord avec les Etats-Unis sur le TTIP en 2015, lors d’une réunion informelle le 14 et 15 octobre 2014 des ministres européens du Commerce à Rome. "Nous ne pouvons pas négocier à cette intensité pendant cinq ans", a déclaré Karel de Gucht dans une interview avec l’agence de presse Reuters, en référence aux négociations avec le Canada sur un accord de libre-échange (CETA) qui ont été lancées en 2009. "Je pense que nous devrions essayer de profiter de l'année prochaine. Techniquement, cela est possible ... Ensuite, tout dépend de la volonté politique et c'est très difficile à prédire", a-t-il dit.
La fenêtre d'opportunité pour un accord sur le sur le partenariat transatlantique d'investissement et de commerce se situe entre 2015, après les élections américaines à mi-mandat qui ont lieu le 4 novembre 2014 et lors desquelles la Chambre des représentants ainsi qu’un tiers du Sénat sont renouvelés, et début 2016, avant la campagne présidentielle américaine, a pour sa part estimé le vice-ministre italien délégué au Commerce extérieur, Carlo Calenda, selon la même source. "On a seulement quelques mois pour sortir de l’impasse", a-t-il averti sur son compte Twitter, où il a réitéré son appel à œuvrer pour un "accord intérimaire" pour débloquer les discussions.
Il y ajoute que le mécanisme de protection des investisseurs (RDIE ou ISDS en anglais) serait "limité sur certains thèmes" et "ne touchera pas les services publics tels que la santé ou l’environnement" et que cela serait inscrit dans le mandat de négociation qui a été publié le 9 octobre 2014 face à la pression grandissante de la société civile qui dénonçait un manque de transparence. Des manifestations ont notamment eu lieu le 11 octobre 2014 dans plusieurs capitales européennes, rapporte Euractiv,alors que l’alliance "Stop TTIP", qui "auto-organise" une initiative citoyenne européenne (ICE) suite au refus d'enregistrement de son ICE par la Commission européenne, affirme avoir recueilli plus de 600 000 signatures contre le traité.
Le commissaire Karel de Gucht, mais aussi les Etats-Unis, sont opposés à l’idée d’un accord partiel. "Il s’agit vraiment d’une démarche globale", a-t-il soutenu, selon ses propos retransmis par Reuters. Quant au RDIE, il a reproché à l’Allemagne, qui est contre le RDIE, de pratiquer une politique deux poids, deux mesures, vu que Berlin aurait conclu 14 accords incluant un mécanisme RDIE avec des pays européens de l’Est. "Ils doivent réaliser qu’il n’y aura pas d’accord TTIP sans le mécanisme RDIE", a-t-il insisté, ajoutant que le TTIP servira de norme pour d’autres accords, comme avec la Chine.
Un des points d’achoppement est, selon lui, de convaincre les Etats-Unis d’ouvrir leurs marchés publics aux investisseurs européens, un aspect déjà compliqué dans les négociations avec le Canada. Le représentant américain au Commerce, Mike Froman, présent à la réunion, a pour sa part souligné que les Etats-Unis ne souhaitent pas un affaiblissement des normes dans le TTIP, selon son compte Twitter.
Lors de la réunion à Rome, le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, a exprimé la réticence du Luxembourg quant à l’inclusion d’un mécanisme de règlement des différends dans le TTIP, tout en mettant en avant l’importance d’un renforcement des relations économiques dans l’intérêt mutuel des deux rives de l’Atlantique, selon un communiqué.
Dans une interview au quotidien Tageblatt, publiée le 16 octobre 2014, il a affirmé avoir adressé une lettre au commissaire Karel de Gucht, comme l’ont fait l’Allemagne et la France, pour exprimer ses réticences vis-à-vis du mécanisme RDIE. Selon lui, il y a un accord sur le fait que le TTIP devrait passer un vote au Parlement européen et aux Parlements nationaux alors que des doutes subsistaient sur le caractère "mixte" du traité qui imposerait une ratification par les 28 Etats membres. Le ministre estime que les négociations ne reprendront qu’au début de l’année prochaine, à cause des élections aux Etats-Unis et du renouvellement de la Commission européenne. Il s’est également dit opposé à un abaissement de normes européennes.
Un nouveau livre, publié par deux Européens et deux Américains, réfute la thèse que les normes européennes seront plus élevées que celles aux Etats-Unis, écrit Euractiv. Selon eux, aucun des deux ensembles d’États ne peut revendiquer une plus grande prévention des risques sanitaires et environnementaux, qui sont différents mais pas forcément plus importants. D’après l’étude, les États-Unis prennent souvent une approche préventive sans endosser formellement le principe de précaution alors que l'Europe approuve formellement le principe de précaution sans pour autant appliquer cette précaution à tous les risques.