Dans un article paru le 12 novembre 2014, le quotidien allemand TAZ révèle que Viviane Reding, ancienne vice-présidente de la Commission Barroso désormais eurodéputée, va siéger au Conseil de surveillance (Kuratorium) de la Fondation Bertelsmann ainsi qu’au Conseil d’administration de l’entreprise minière Nyrstar. La Fondation Bertelsmann précise dans un communiqué de presse publié le 13 novembre 2014 que Viviane Reding rejoindra son conseil de surveillance au 1er janvier 2015.
"L’ancienne commissaire à la Justice ne connaît pas de délai de carence", commente le quotidien allemand qui relève que l’eurodéputée siège désormais au sein de la commission du Commerce international et se demande donc, au vu de ses nouvelles attributions, "comment elle y sera indépendante". Le quotidien allemand cite l’eurodéputé Fabio De Masi (GUE), qui est membre de l’intergroupe pour l’intégrité et la lutte contre la corruption au Parlement européen et qui souligne que "travailler pour Nyrstar et les lobbyistes de la Bertelsmann-Stiftung, qui sont de grands amis de l’accord de libre-échange TTIP, sent le conflit d’intérêt et les revenus annexes douteux".
Le journal allemand note aussi que les nouvelles fonctions de l’ancienne commissaire ont été validées par la Commission le 29 octobre 2014, quelques jours à peine avant l’entrée en fonction du nouveau collège présidé par Jean-Claude Juncker.
Selon le procès-verbal de cette réunion, la Commission a conclu "que les activités après cessation de fonctions envisagées par Mme REDING en tant que membre du Kuratorium (conseil de surveillance) de la Fondation Bertelsmann et en tant que membre du conseil d'administration (Board of Directors) de l'entreprise Nyrstar sont compatibles avec l'article 245, § 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, compte tenu de la nature de ces activités et de l'avis du 27 octobre 2014 du comité éthique ad hoc sur les activités précitées, et sous réserve des conditions suivantes :
Interrogée par les journalistes du Tageblatt et du Luxemburger Wort, Viviane Reding récuse tout conflit d’intérêt dans ses nouvelles fonctions : " C’est la chose la plus normale du monde et tout s’est fait en toute transparence et en concertation avec la Commission européenne", rapporte ainsi le Tageblatt dans son édition datée du 13 novembre 2014. Viviane Reding a souligné auprès du quotidien luxembourgeois que sa demande a été analysée par un comité d’éthique avant d’être validée fin octobre.
Viviane Reding estime que ces nouvelles activités n’influenceront en rien son indépendance en tant qu’eurodéputée, a-t-elle insisté auprès du Luxemburger Wort. Si par exemple un amendement doit porter sur une branche industrielle concernant Nyrstar, Viviane Reding a assuré qu’elle signalerait son risque de partialité et s’abstiendrait de voter sur ce texte, ainsi que le prévoit le Code de conduite des eurodéputés. Le code de conduite prévoit aussi que tous les revenus des eurodéputés doivent être déclarés. La déclaration d’intérêts de Viviane Reding de juin 2014 n’avait pas été modifiée à la date de publication de cet article et elle ne mentionnait aucun revenu provenant de telles activités.
Si la Commission avait vu le moindre problème, elle n’aurait pas donné son autorisation pour qu’elle puisse exercer ces nouvelles fonctions, a argué l’ancienne commissaire au Tageblatt. Viviane Reding n’a toutefois pas voulu donner plus de détails sur la façon dont elle est entrée en contact avec Nyrstar, dont le CEO n’est autre que l’ingénieur luxembourgeois Roland Junck, ancien PDG d’ArcelorMittal.
Les Pirates luxembourgeois ont aussitôt fait part de leur étonnement quant à la rapidité avec laquelle la commissaire est devenue "parlementaire à temps partiel et lobbyiste à plein temps".
Pour le président du parti, Sven Clement, ce changement rapide de carrière montre pourquoi "des règles de carence plus strictes sont nécessaires en politique". Il souligne qu’après l’engagement dont a fait preuve Viviane Reding en tant que commissaire, elle dévoue moins d’énergie à ses fonctions de parlementaire européenne, puisque "depuis juillet elle a séché un vote sur trois au Parlement européen". Et il s’inquiète du fait qu’en commission INTA, Viviane Reding va avoir à prendre des décisions liées plus ou moins directement aux activités de ses nouveaux patrons.