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Après un rapport de la Commission européenne qui constate de "légères lacunes" dans les contrôles officiels des OGM dans les Etats membres, une ONG dénonce quant à elle des "contrôles défectueux ou absents"
03-02-2015


Le Parlement européen a confirmé l’accord informel qui accorde aux États membres le droit de l'interdire les cultures OGM sur leur territoire, comme la maïs (Source : Commission)Un rapport de la Commission européenne sur une série d'audits menés dans les États membres entre 2011 et 2013 pour évaluer les contrôles officiels des OGM, y compris leur dissémination volontaire dans l'environnement, fait état de carences graves, a indiqué le 3 février 2015 l'ONG Food & Water Europe dans un communiqué qui dénonce des "contrôles défectueux ou absents".

Selon Food & Water Europe, certains Etats "autorisent la contamination de semences par des OGM dont la culture n'est pas autorisée dans l'UE, ce qui enfreint à la fois la législation sur la pureté des semences et celle sur l'étiquetage des semences". Elle critique que "les autorités permettent la contamination illégale de produits non OGM avec des OGM sans respecter l'exigence d'étiquetage et évoque des "lacunes" dans l'échantillonnage et la communication des résultats.

Le rapport publié par la Commission européenne en décembre dernier constate de "légères lacunes" dans les systèmes de contrôles, notamment le fait que certains États membres "n’appliquent pas la tolérance zéro" pour des OGM autorisés pour l’alimentation humaine et animale, mais pas pour la culture. Ces Etats appliqueraient un seuil "de minimis" qui "entrave la législation européenne".

Le rapport indique que seulement quatre des six Etats membres qui cultivent le maïs de Monsanto MON810 ont des "systèmes adéquats de contrôles officiels". Selon le texte du rapport de la Commission, dans l'un des pays, les autorités n'étaient même pas au courant de la culture MON810 sur son territoire, de sorte qu’il n’y avait pas eu de contrôle officiel.

Ceci est "particulièrement préoccupant pour les pays qui souhaitent interdire les cultures OGM", souligne de son côté l'ONG. Dans l’Etat membre où la culture de MON810 est la plus grande, les contrôles se limitent à l’évaluation des rapports de suivi émis par le titulaire de l’autorisation. Le rapport de la Commission note d’ailleurs à ce sujet que la surveillance des effets environnementaux à long terme du maïs MON 810 par Monsanto est "limitée à des observations anecdotiques".

Pour rappel, les Etats membres disposent depuis peu du droit d’interdire des OGM sur leur territoire. L’accord sur cette "culture à la carte" avait été approuvé par le Parlement européen le 13 janvier 2015 et met fin à une longue période d’incertitudes pour les Etats qui refusent des cultures OGM autorisés au niveau européen. Au total, quatre maïs OGM, dont MON810 et TC1507 du groupe Pioneer, ont reçu un avis favorable de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA). Six Etats membres cultivent le maïs de Monsanto (MON810), le seul à être autorisé dans l’UE à ce stade. La Commission met régulièrement à jour une liste sur les OGM autorisés dans l’UE – soit pour la culture, soit pour l’alimentation.

Le rapport de la Commission note également que des agriculteurs achètent des semences du MON810 en dehors des frontières de l'UE mais les cultivent en Europe. En raison d’une absence d’un système d’enregistrement de ces champs, leur localisation est inconnue des pays concernés, souligne le texte. Le rapport d'audit de 2011 sur les cultures de ce maïs en Espagne montre en outre que l'absence de recours à des laboratoires accrédités pour tester les OGM remonte au moins à 2005.

"On fait beaucoup de bruit autour des modifications récentes de la législation européenne qui régit les autorisations de culture des OGM dans l'UE mais on ne souffle mot de l'incapacité actuelle à respecter la législation en vigueur. L'audit de la Commission elle-même n'augure rien de bon pour les agriculteurs et les autres citoyens qui sont en droit de se demander s'ils sont vraiment protégés", a déclaré Eve Mitchell de Food & Water Europe. "Si l'échantillonnage n'est pas fait correctement fait ou si les règles d'étiquetage sont simplement ignorées, les consommateurs ne peuvent pas faire confiance à ce qu'ils achètent", souligne l’experte.

Des ONG appellent la Commission à ne pas exempter les produits issus de nouvelles techniques de modification génétique des règles applicables aux OGM

Des ONG ont par ailleurs lancé un appel à la Commission pour demander que les produits issus de nouvelles techniques de modification génétique des plantes et des animaux n'échappent pas à la procédure d'évaluation des risques et aux règles d'étiquetage imposées par la législation de l'UE. La lettre, datée du 26 janvier 2015 et signé par huit ONG, dont Friends of the Earth et Greenpeace, est adressée à Vytenis Andriukaitis, commissaire européen à la Santé et à la Sûreté alimentaire.

Les ONG accusent l'industrie des biotechnologies et les développeurs de ces nouvelles techniques d'avoir appelé les autorités publiques à les exempter des règles applicables aux OGM et appellent la Commission européenne à rejeter toute tentative dans ce sens. Il s’agit notamment des techniques d'oligonucléotides, les nucléases (restrictions nucléases) et les interventions directes dans la régulation des gènes (épigénétique).

"La plupart de ces techniques sont tellement nouvelles qu'il n'y a pas suffisamment d'information disponible pour en évaluer correctement les risques. Certaines permettent même des changements plus radicaux du génome des plantes que les méthodes d'ingénierie génétique couramment utilisées dans les produits commercialisés", écrivent les signataires. Ils rappellent que tous les processus non traditionnels qui modifient la structure de l'ADN par le recours à des technologies de manipulation génétique ou qui interfèrent avec la régulation des gênes sont actuellement couverts par la réglementation européenne.

Un des signataires, l’ONG allemande TestBiotech, accuse par ailleurs l’industrie agroalimentaire et OGM d’exercer leur influence sur les administrations allemandes en charge de l’évaluation des risques liés aux OGM et de les entraîner dans des conflits d’intérêts, indique un communiqué. Le rapport de TestBiotech reproche à des membres de ces administrations  et des instituts de recherche d’avoir des contacts étroits avec l’industrie OGM, notamment le lobby ILSI (International Life Science Institute), basé à Washington. La manière dont ces conflits d’intérêts sont gérés, serait "plus discutable" qu’à l’EFSA, note le rapport.

Pour rappel, la CJUE avait jugé en octobre 2012 que l’EFSA et trois autres agences européennes n’ont pas géré les situations de conflit d’intérêts de manière appropriée. Deux membres du conseil d'administration de l’EFSA, dont sa présidente Diana Banati, avaient démissionné du fait de leurs responsabilités au sein de l’ILSI.