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Economie, finances et monnaie
Après analyse de la liste de réformes livrée par le gouvernement grec, jugée "suffisamment exhaustive pour être un point de départ valable", l’Eurogroupe a donné son feu vert au principe d’une extension du programme d’aide à la Grèce
24-02-2015


Les ministres des Finances de la zone euro ont donné leur feu vert à la prolongation de quatre mois du programme d’aide à la Grèce à l’occasion d’une conférence téléphonique qui s’est tenue le 24 février 2015. Cette décision fait suite à l’accord trouvé le 20 février dernier.

En vertu de l’accord trouvé lors de cet Eurogroupe extraordinaire, la Grèce devait en effetLe président de l’Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, lors d'une réunion extraordinaire de l'Eurogroupe le 20 février (Source : Conseil) soumettre le 23 février au plus tard à ses partenaires de la zone euro une liste des réformes que le nouveau gouvernement souhaitait mettre en œuvre dans le cadre du programme conditionnant l’aide financière dont bénéficie la Grèce. Le porte-parole de la Commission,  Margaritis Schinas, twittait dans la matinée du 24 février que la liste des réformes du gouvernement grec était "arrivée dans les temps", ce que confirmait un peu plus tard le président de l’Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, devant les eurodéputés de la commission des Affaires économiques et monétaires (ECON). "Le gouvernement grec est très sérieux dans sa volonté de réformes", mais "il s'agit juste d'un premier pas", y précisait-il toutefois aussi.

Dans une déclaration publiée à l’issue de la conférence téléphonique du 24 février, les ministres des Finances de la zone euro indiquent avoir discuté de la première liste de réformes présentée par les autorités grecques qui devra être précisée en vue d’un accord avec les institutions au plus tard fin avril, ainsi que le prévoyait l’accord trouvé le 20 février. "Les institutions nous ont fait savoir qu’elles considèrent à première vue la liste de mesures comme suffisamment exhaustive pour être un point de départ valable en vue d’une conclusion fructueuse de la mission" de suivi du programme d’aide, indique la déclaration des ministres des Finances.

La même formule est utilisée dans la lettre que Christine Lagarde, directrice du Fonds monétaire international (FMI), a adressée à Jeroen Dijsselbloem, ainsi que dans la lettre adressée au président de l’Eurogroupe juste avant cette réunion téléphonique par le vice-président de la Commission, Valdis Dombrovskis, et le commissaire Pierre Moscovici. "Notre première impression est que le document couvre un large champ de réformes et en ce sens, il est suffisamment complet pour être un point de départ valide",  a indiqué lui aussi Mario Draghi, le président de la Banque centrale européenne (BCE), dans son courrier au président de l’Eurogroupe.

Les deux représentants de la Commission européenne indiquent dans leur missive que les services de la Commission avaient "analysé soigneusement" les propositions grecques. Les deux commissaires s’y disent notamment "encouragés par l’engagement de lutter contre l’évasion fiscale et la corruption, entre autres par des efforts de modernisation des administrations fiscales et douanières", ainsi que par l’engagement de "poursuivre les réformes visant à moderniser l’administration publique". Autre élément relevé par la Commission, les engagements en matière de statistiques, dans la mesure où la Commission considère d’une importance vitale le respect de l’indépendance de l’office grec de statistiques en toutes circonstances.

Christine Lagarde, qui suggère que la liste est certes "exhaustive, mais pas très précise" du fait que le gouvernement grec vient d’entrer en fonctions, se dit elle aussi encouragée par la détermination affichée par les autorités grecques en matière de lutte contre la fraude fiscale et la corruption. Mais elle pointe aussi le fait que "dans certains domaines, parmi lesquels peut-être les plus importants, la lettre ne donne pas des assurances claires que le gouvernement a l’intention d’entreprendre les réformes" prévues dans le programme qui conditionne l’aide à la Grèce. La directrice du FMI pointe notamment le manque d’engagement clair à "concevoir et mettre en œuvre les réformes envisagées en matière de retraite et de TVA", à "poursuivre les politiques d’ouverture des secteurs qui ne le sont pas, les réformes administratives, la privatisation et les réformes du marché du travail". Autant d’engagements que le FMI juge "critiques pour la capacité de la Grèce à remplir les objectifs de base" de son programme d’aide. Christine Lagarde indique ainsi que les discussions qui vont suivre "ne pourront être limitées dans le périmètre des politiques esquissé dans la liste du gouvernement".

Le président de la BCE souligne pour sa part que les autorités grecques n’ont pas pu, faute de temps, "établir des propositions et des engagements concrets".  "Les engagements esquissés par les autorités [grecques] diffèrent des engagements existants du programme dans un certain nombre de domaines", relève Mario Draghi qui indique qu’il va s’agir d’évaluer "si les mesures qui ne sont pas acceptées par les autorités sont remplacées par des mesures de qualité égale ou meilleure permettant d'atteindre les objectifs du programme". Le président de la BCE invite par ailleurs les autorités grecques à "agir rapidement pour stabiliser la culture du paiement et à s'abstenir de toute action unilatérale allant dans le sens contraire".

Comme l’a résumé le commissaire européen Pierre Moscovici, "l'accord de l'Eurogroupe ne veut pas dire approbation des réformes" telles que présentées par Athènes. "Aujourd'hui, il s'agissait de vérifier si on pouvait aller plus loin et la réponse est oui", a-t-il expliqué à la presse, reconnaissant que les autorités grecques ne pouvaient de toute façon "pas bâtir un programme chiffré en trois jours".

"Nous nous sommes par conséquent entendus pour lancer les procédures nationales requises afin de finaliser la décision sur l’extension de quatre mois" du programme actuel, indique la déclaration des ministres des Finances de la zone euro. L’Allemagne doit en effet encore obtenir le feu vert de son parlement. Dès la veille, le ministre des Finances allemand, Wolfgang Schäuble, avait demandé officiellement par écrit aux parlementaires du Bundestag de voter en faveur de cette extension du programme. Le vote y est prévu le 27 février 2015. En Estonie, la commission parlementaire en charge des Affaires européennes doit aussi donner son accord. Aux Pays-Bas, il est aussi d’usage que le Parlement soit consulté, tandis qu’en Grèce, le parlement devra adopter le nouveau programme de réformes.

 "Nous appelons les autorités grecques à continuer à développer et à élargir la liste des réformes sur la base de l’accord trouvé, en étroite coordination avec les institutions de façon à permettre une conclusion rapide et fructueuse de la mission", concluent les ministres des Finances dans leur déclaration.

La liste des réformes

La liste des réformes transmise par le gouvernement grec est disponible sur le site de l’agence de presse Reuters. Aucune mesure n’y est chiffrée, mais elle comporte beaucoup de mesures de renforcement de l’efficacité fiscale et des structures de l’Etat. Le ministre grec des Finances, qui signe le document, insiste sur la volonté du gouvernement de coopérer avec ses partenaires et les institutions européennes, ainsi qu’avec le FMI.

En ce qui concerne le salaire minimum, "l'ampleur et le calendrier" de la progression du salaire minimum, une promesse du gouvernement, "se feront en consultation avec les partenaires sociaux et les institutions européennes et internationales", indique le document et "de manière à préserver la compétitivité et les perspectives d'emploi".

Les privatisations déjà réalisées ne seront pas remises en question, tandis que pour celles qui sont déjà lancées "le gouvernement va respecter les processus en conformité avec la loi", précise la liste transmise par les autorités grecques. Les privatisations qui sont prévues doivent être "examinées avec pour objectif de maximiser les bénéfices à long terme pour l'Etat", indique encore le gouvernement.

Le gouvernement grec s'engage à faire "de robustes efforts" dans la collecte des impôts et la lutte contre l'évasion fiscale en "utilisant pleinement les moyens électroniques et autres innovations technologiques". Le tout doit cibler "particulièrement les plus nantis" afin de "les faire participer de manière juste au financement des politiques publiques" et se faire "sans impact négatif sur la justice sociale".

Le code fiscal doit être modernisé, l'indépendance de l'administration centrale des impôts renforcée, ses moyens élargis.

Le gouvernement prévoit aussi un dispositif de lutte contre la contrebande d'essence et de cigarettes, un renforcement de la lutte contre la corruption et la mise en place d'un système permettant le paiement rapide des arriérés fiscaux et de contributions à la sécurité sociale. 

Selon la liste présentée par le gouvernement, le nombre de ministères doit passer de 16 à 10, les avantages et primes des ministres, parlementaires et haut-fonctionnaires vont être réduits, la grille des salaires dans la fonction publique sera remaniée.

Le gouvernement veut tarifer "aux prix du marché" l'utilisation par les médias des fréquences de radio-télévision, mais aussi réformer les règles d'attribution des marchés publics.

Sur le plan social, un élément central du programme du gouvernement nouvellement élu, les autorités grecques disent vouloir "éliminer la pression sociale et politique pour partir en pré-retraite", notamment en mettant en place "un soutien ciblé des salariés entre 50 et 65 ans". Mais elles veulent surtout mettre en place des mesures "très ciblées" pour améliorer la couverture sociale, l'approvisionnement en énergie et l'accès à la nourriture au logement des plus pauvres, par exemple avec des bons d'alimentation.

La liste prévoit aussi la dépénalisation du surendettement pour les petites sommes, le soutien aux "plus vulnérables" ne pouvant rembourser leurs emprunts et une collaboration avec les banques pour "éviter les mises aux enchères de résidences principales en-dessous d'un certain seuil" de défaut de paiement.  Autant de mesures intégrées à la liste sous le titre "crise humanitaire".