Le Parlement européen réuni en séance plénière le 10 mars 2015 à Strasbourg, a confirmé l’accord négocié en trilogue avec la Commission et le Conseil sur la création de fonds européens d’investissement à long terme (dits FEILT) en adoptant le rapport du député européen Alain Lamassoure (PPE, FR) par 546 voix pour, 93 voix contre et 28 abstentions.
Lors du scrutin en plénière, cinq des eurodéputés luxembourgeois ont voté en faveur du texte (Georges Bach, Frank Engel et Viviane Reding pour le PPE, Mady Delvaux pour les S&D et Claude Turmes des Verts/ALE) tandis que Charles Goerens (ALDE) n’a pas participé au vote.
Pour mémoire, de tels fonds ont vocation à servir l'économie réelle et la société en acheminant les fonds d'origine non bancaire vers des projets à long terme en faveur des infrastructures, de la propriété intellectuelle ou de la recherche.
La Commission européenne avait mis sur la table une proposition en juin 2013 : l’idée était de créer des fonds d’investissement pour les investisseurs qui souhaitent placer leurs capitaux dans des entreprises et des projets à long terme. Les FEILT sont ainsi conçus pour répondre aux besoins d’investisseurs institutionnels et privés prêts à immobiliser leur capital dans des actifs à long terme, tels les projets d’infrastructure, en échange d’un revenu régulier. Ils devront par ailleurs satisfaire à un ensemble strict de règles communes pour être considérés comme tels.
Dans ce contexte, le Parlement européen avait arrêté sa position sur ce texte législatif en avril 2014, tandis que le Coreper s’était accordé sur la position du Conseil en juin 2014. Les négociations en trilogue entamées dans la foulée entre les institutions, et qui ont surtout porté sur la possibilité de remboursement des investisseurs, s’étaient conclues par un accord en novembre 2014.
Dans un communiqué diffusé par le service de presse du Parlement européen à l’issue du vote, le député Alain Lamassoure, rapporteur du texte, se félicite du lancement d’un "nouvel outil efficace qui favorisera non seulement le financement d'investissements à long terme, comme le soutient le plan Juncker, mais aidera aussi à construire l'union des marchés de capitaux".
Le même communiqué rappelle par ailleurs que les députés européens avaient veillé à ce que l’accord introduise des dispositions pour garantir que les FEILT n'investissent pas dans des actifs spéculatifs et que tout investisseur de détail soit correctement informé et protégé. Le Parlement a également prévu une possibilité de sortie pour les investisseurs de détail, alors que selon la proposition de la Commission, tous les investisseurs des FEILT devaient être prêts à s'engager à long terme.
Dans une tribune publiée le 10 mars sur le site du magazine mensuel luxembourgeois Paperjam, Chrystelle Veeckmans, partner chez KPMG Luxembourg et présidente de l'Association luxembourgeoise des fonds de pension (ALFP), estime que les FEILT sont une opportunité pour le Luxembourg. "En tant que centre d’excellence pour l’administration des fonds d’investissement destinés aux particuliers ainsi qu’aux investisseurs institutionnels, le Luxembourg est idéalement placé pour domicilier, conseiller et administrer ces fonds européens d’investissement à long terme", assure-t-elle.
Selon Chrystelle Veeckmans, ceux-ci "répondent à de nombreux besoins actuels de création de rendement, d’emploi, de croissance, de financement des pensions". "L’idée politique est donc excellente, il reste maintenant à s’assurer que le cadre législatif mis en place favorisera sa mise en application pratique. L’un des objectifs de la création d’un marché européen des capitaux est également de veiller à ce que le cadre réglementaire européen ne soit pas dans son ensemble contre-productif et favorise in fine la croissance en Europe", indique-t-elle.
Dans un entretien publié dans l’édition du 11 mars du quotidien Luxemburger Wort, Chrystelle Veeckmans apporte par ailleurs quelques précisions concernant la mise en place de tels fonds au Luxembourg. Elle indique ainsi qu’un groupe de travail ad hoc, dont elle est membre, a été constitué auprès de l'Association luxembourgeoise des fonds d'investissements (ALFI). Ce groupe, "en collaboration avec la Commission de Surveillance du Secteur Financier et le Haut Comité de la place financière, est en train de voir si on appliquera directement la réglementation européenne ou s'il vaudrait mieux implémenter une loi spécifique pour le Luxembourg", dit-elle.
Après le vote en plénière, ces dispositions, déjà conclues de manière informelle avec les États membres, devront être approuvées officiellement par le Conseil et elles devraient entrer en vigueur six mois après leur publication au Journal officiel de l’UE.