Les ministres européens de la Santé ont ajouté en urgence une discussion sur l'aspect sanitaire des arrivées massives de migrants sur les côtes méditerranéennes de l'Europe à l'agenda de la réunion informelle consacrée à la santé, à la suite des naufrages survenus ces derniers jours. L’agenda initial de cette rencontre qui s'est tenue à Riga les 20 et 21 avril 2015 était consacré à un débat sur une nouvelle stratégie en matière d’alcool et la politique nutritionnelle de l’UE.
Quatre pays du sud (Italie, Grèce, Malte et Chypre), dont les structures hospitalières sont submergées par des réfugiés, ont demandé aux autres États membres d'être solidaires, a indiqué le 21 avril 2015 lors d’une conférence de presse Ladislav Miko, le directeur général à la DG Santé et Consommateurs au nom du commissaire en charge de la Santé, Vytenis Andriukaitis, qui n'a pas pu se déplacer pour la réunion.
Ladislav Miko a insisté sur le fait qu’il faut prendre des mesures urgentes à propos des défis sanitaires, tout en rappelant que la santé relève de la compétence des Etats membres. "Certains petits pays comme Malte ne sont pas préparés à l’arrivée de cent migrants par jour", a-t-il expliqué. La Commission a, selon lui, activé le processus dans le cadre du Comité de sécurité sanitaire (HSC), tout en appelant les Etats concernés à communiquer rapidement les besoins concrets. Le HSC devait se réunir le même jour pour évaluer précisément les besoins des pays méditerranéens concernés. Ladislav Miko a évoqué des kits sanitaires d'urgence, la fourniture de vaccins ou encore l’accueil d'une partie des réfugiés dans les infrastructures sanitaires des autres États membres.
"Les pays européens méditerranéens sont très préoccupés par les flux de migrants. Ce n'est pas un sujet qui concerne uniquement la politique migratoire, l'aspect sanitaire est également en jeu", a ajouté le ministre letton de la Santé, Guntis Belevics, qui préside le Conseil. Plusieurs Etats ont, selon lui, demandé de partager les dépenses, dont Chypre et la Grèce. Cette dernière a insisté sur le manque de ressources de son système de santé et sa situation économique difficile. Chypre, qui ne dispose pas de plus de 4000 lits d’hôpitaux, selon Eurostat, aurait demandé l’aide des autres Etats membres pour prendre en charge des migrants, notamment ceux avec des maladies infectieuses, une demande appuyée par la Grèce.
La Grèce aurait également regretté que l’aspect sanitaire ne figure pas dans le plan en dix points, présenté le 20 avril 2015 par la Commission européenne lors du Conseil conjoint des ministres des Affaires étrangères et de l’Intérieur de l’UE comme une réponse d’urgence aux drames en Méditerranée, et proposé que le prochain Conseil formel Santé qui aura lieu en juin 2015 aborde la dimension santé publique de l’afflux de tant de réfugiés. Tous les États membres se sont exprimés sur la question lors de la réunion informelle, a encore indiqué le ministre letton.
Les ministres de la santé ont discuté d’une nouvelle stratégie de l’UE en matière d’alcool, vu les coûts énormes que la consommation excessive d’alcool entraîne pour les budgets des Etats membres qui s’élèvent à près de 160 milliards d’euros par an. La moitié des suicides et un quart des accidents sont d’ailleurs liés à l’alcool, a indiqué Guntis Belevics. Les discussions se sont focalisées sur la question s’il faut une nouvelle politique européenne en matière d'alcool, alors que la mise en œuvre de la stratégie d’alcool de 2006 a été évaluée en 2009 et en 2013. La grande majorité des Etats membres s’est exprimée en faveur d’une nouvelle stratégie et personne ne s’y est opposé, a indiqué le ministre.
Interrogé sur de nouvelles mesures dans cette stratégie, le ministre a évoqué un étiquetage plus détaillé, notamment sur les calories et les additifs, pour lutter contre l’obésité. "Les gens ne se rendent pas compte du fait que l’alcool contient beaucoup de calories. Il faut sensibiliser l’opinion publique à cela", a-t-il insisté. Cette indication des calories sur les boissons alcoolisées est également demandée par la commission de l’Environnement du Parlement européen, qui vient d’adopter une résolution sur une nouvelle stratégie d’alcool. Selon la législation en vigueur, la déclaration nutritionnelle n’est pas obligatoire pour les boissons titrant plus de 1,2 % d’alcool en volume.
Si la consommation d'alcool a diminué d’environ 10 % en Europe en 25 ans, le continent reste le premier consommateur au monde et 120 000 personnes entre 15 et 64 ans en meurent chaque année en Europe, a indiqué le haut représentant de la Commission européenne, Ladislav Miko. Il estime qu’une obligation de lister les calories des boissons alcoolisées pourrait inciter les citoyens à faire le "bon choix" en termes de nutrition. Il s’est également félicité de l'initiative volontaire du secteur des brasseurs européens des de procéder à un tel étiquetage.
La ministre luxembourgeoise Lydia Mutsch s’est prononcée, tout comme une très large majorité de ses homologues, en faveur d’une action au niveau européen, surtout en relation avec les aspects transfrontaliers comme le marketing, la publicité, la vente par Internet, et respectueuse des spécificités socio-culturelles et des compétences nationales, a indiqué le Ministère de la Santé luxembourgeois dans un communiqué. La forme et le contenu exact de ce cadre européen seraient définis au courant de la Présidence luxembourgeoise, ajoute le Ministère.