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Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale
L’économiste Heiner Flassbeck, en visite à Luxembourg, condamne la politique économique de l’Allemagne et tente de dégager des solutions à "l’interminable crise de l’euro"
21-05-2015


Heiner Flassbeck en conférence sur "l'interminable crise de l'euro" le 21 mai 2015 à LuxembourgInvité par la Chambre des salariés du Luxembourg le 22 mai 2015 pour parler de "l’interminable crise de l’euro", Heiner Flassbeck, économiste keynésien et défenseur d’une économie basée sur la demande et non sur l’offre, a  présenté une nouvelle fois les positions qu’il avait déjà défendues lors de ses interventions à Luxembourg les 7 mai 2014 et 9 février 2012.

Tout au long de son exposé, l’économiste a tenté de démontrer que la doctrine qui détermine la politique économique actuelle de l’UE et qui est celle de l’Allemagne, doctrine selon laquelle le chômage élevé est dû à des salaires trop élevés, est fausse. Ainsi, Heiner Flassbeck s’est insurgé contre la politique économique de son pays, la qualifiant de "stupide" et d’"illogique", ajoutant qu’elle conduirait à une "crise sans fin".

Le conférencier a débuté son propos en dressant le tableau de la situation politique et économique en Grèce. Pour lui, si les Grecs ont voté pour un parti populiste lors dernières élections législatives du 25 janvier 2015, ce n’est "pas un hasard" et le gouvernement Syriza est un "gouvernement du désespoir".  Entre 1999 et 2007, la Grèce réalisait la meilleure croissance d’Europe, a rappelé Heiner Flassbeck, c’était "le" pays qui réussissait en Europe. Mais depuis 2008, la Grèce vit une "‘Grande Dépression’, comparable à celle des Etats-Unis dans les années 1930", a-t-il poursuivi, et cela est dû aux programmes d’ajustement imposés par la Troïka qui ont conduit à la "chute" du pays.

Et que se passe-t-il quand un pays vit une "situation catastrophique" comme la Grèce actuellement ?, a demandé Heiner Flassbeck. "Les gens sont désespérés, votent différemment et c’est leur bon droit", a-t-il indiqué. 

Au sujet de la politique économique de l’Allemagne, qui dicte actuellement la politique économique européenne, le conférencier a indiqué qu’elle était "vouée à l’échec" car l’Allemagne ne respecte pas l’objectif de 2 % d’inflation fixé dans le cadre de l’Union monétaire, à la différence des autres pays européens, notamment la France. L’Allemagne pratique des salaires trop bas, qui n’augmentent pas en fonction de la hausse de la productivité, a ajouté Heiner Flassbeck. De plus, les Allemands ne consomment pas assez et le pays a une balance commerciale excédentaire. A ce propos, Heiner Flassbeck en a profité pour indiquer que le ratio entre l’excédent commercial et le PIB en Allemagne était de 7,5 % alors que la limite au sein de l’UE est fixée à 6 %. Bien que cela soit passible d’amendes, au titre des règlements "Prévention et correction des déséquilibres macroéconomiques", "personne n’a jamais imposé de sanctions à l’Allemagne !", s’est-il insurgé. A noter cependant que dans le cadre de la procédure de déficit macro-économique (PDM), la Commission européenne a demandé à l’Allemagne un examen approfondi de sa situation économique le 28 novembre 2014, jour où elle a lancé le semestre européen 2015. Le 26 février 2015, elle a conclu que le déséquilibre macroéconomique identifié nécessitait de passer au stade suivant de la procédure, requérant "l’adoption de mesures décisives et une surveillance".  

Mais le pire selon Heiner Flassbeck, c’est que les Etats du sud de l’Europe ont été contraints de se conformer à la logique allemande, aboutissant à un résultat "catastrophique". Les Grecs ont baissé leurs salaires de 20 % depuis 2009 mais le chômage n’a pas diminué. "Les économistes pensent que lorsque l’on baisse les salaires, le chômage diminue mais cela est faux", a martelé Heiner Flassbeck. "Au contraire, les gens ne consomment plus et le chômage augmente", a –t-il ajouté.

La solution donc pour sortir de la crise ? L’Allemagne doit "vivre au-dessus de ses moyens" et "créer du déficit" pour avoir de la croissance et permettre aux économies des autres pays de se redresser. Mais malheureusement, les "politiques de haut rang ne semblent pas l’avoir compris", a déploré l’économiste.