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Droits fondamentaux, lutte contre la discrimination - Emploi et politique sociale
Les députés européens pressent la Commission de ne pas retirer le projet de directive européenne sur le congé de maternité, même s'il est bloqué depuis quatre ans
20-05-2015


Le Parlement européen à l'issue du vote sur le rapport Estrela le 20 octobre 2010 © European Parliament / Pietro Naj-OleariLes députés européens ont pressé dans une résolution adoptée le 20 mai 2015 en séance plénière la Commission de ne pas retirer le projet de directive européenne sur le congé de maternité, même s'il est bloqué depuis quatre ans. Ils ont également exhorté les ministres à reprendre les négociations et à s'accorder sur une position officielle. Les députés réitèrent leur volonté de sortir de l'impasse et demandent à la Commission de réconcilier les positions du Parlement et du Conseil, dans une résolution adoptée par 419 voix pour, 97 contre et 161 abstentions, indique un communiqué du Parlement européen.

Le contexte

Pour rappel, ce dossier est en souffrance depuis 2008, date de la proposition de révision de la Commission de la directive qui date de 1992. Le Parlement a adopté sa position en octobre 2010, sans qu’il soit depuis possible d’avancer. La Commission proposait de porter la durée minimale du congé maternité de 14 à 18 semaines, tandis que le Parlement entend pour sa part porter le congé maternité à 20 semaines, avec l’intégralité du salaire. Les Etats membres n’ont pas trouvé de consensus et n’ont pas adopté de position.

La Commission européenne avait envisagé de retirer la proposition dans le cadre de son programme d'allégement administratif (REFIT), suscitant l’émoi du lobby européen des femmes et du groupe S&D au Parlement européen ainsi que l’inquiétude du Luxembourg. Le possible retrait du projet avait incité la Présidence italienne du Conseil de l’UE (juillet – décembre 2014) à relancer le débat. Mais elle avait ensuite dû constater que les 20 semaines intégralement payées sont "inacceptables" aux yeux du Conseil et constituent "une base irréaliste pour des discussions ultérieures", tout en recommandant au Parlement européen de "faire un premier pas pour fournir une base de négociation acceptable".

En cas de retrait, le Parlement européen souhaite une nouvelle initiative législative avant la fin de l'année

"Dans quelle Europe vivons-nous, si celles qui y créent la vie sont pénalisées? Dans quelle Europe vivons-nous, si accouchement est synonyme de pauvreté? Nous ne pouvons pas aider les mères en jetant simplement cette directive", a déclaré la rapporteure Maria Arena (S&D). "Depuis 1992, lorsque la directive sur le congé de maternité a été approuvée, nous n'avons fait aucun progrès. Les femmes ne peuvent pas attendre, elles méritent, si elles le souhaitent, d'être des femmes, des mères et des travailleuses en même temps sans subir de discrimination", a-t-elle ajouté. "Nous demandons à la Commission de ne pas laisser tomber les femmes enceintes. Il y a beaucoup de raisons de les soutenir. De nombreuses jeunes femmes mettent de côté leur projet d'avoir des enfants, alors que la population européenne vieillit", a-t-elle encore dit.

Si la Commission européenne retire le projet de loi, alors les députés l'exhorteront à déposer une nouvelle initiative législative avant la fin de l'année, indique le Parlement européen.

Le Parlement réitère également sa demande du droit pour les pères à un congé paternel rémunéré d'une durée minimale de 10 jours ouvrables, en plus du congé de la mère.

Réactions

L’eurodéputée socialiste Iratxe García Pérez a déclaré dans un communiqué : "La Commission a déjà annoncé en décembre dernier qu'elle abandonnerait la proposition après une période de six mois dans le cas où aucun progrès substantiel n'est fait au Conseil des Ministres. Nous déplorons fortement l'attitude du Conseil et nous pressons les Etats membres de reprendre les négociations".

Les libéraux de l’ALDE ont déploré le manque d'engagement des États membres et de la Commission européenne et exhortent cette dernière à sortir de l'impasse et à respecter le rôle du Parlement européen en tant que co-législateur. "Le blocage du Conseil est contraire à l'esprit de l'UE. En fait, ceci est contraire à l'esprit de la procédure de codécision établie par les traités. Le Conseil devrait accepter de négocier avec le Parlement comme nous l'avons demandé à plusieurs reprises", a déclaré dans un communiqué l’eurodéputée espagnole Beatriz Becerra. Elle accuse les Etats membres de ne pas être à la hauteur de leurs responsabilités et demande à la Commission de renoncer à son rôle passif.

Pour l’eurodéputée verte Karima Delli, la directive est "primordiale" car elle "constitue l'une des rares avancées sociales au plan européen". Elle rappelle dans un communiqué que le congé de maternité de plus de 20 semaines existe déjà dans 11 États membres et accuse les Etats membres qui sont contre d’être "profondément réactionnaires". "Au lieu de retirer sa proposition, la Commission doit se battre pour une harmonisation des standards sociaux vers le haut", insiste-t-elle. La députée allemande Terry Reintke juge "inacceptable" le fait que le possible retrait du projet de directive "récompense" les Etats membres pour leur attitude de blocage ce qui constitue un "signal désastreux" pour le processus démocratique des institutions européennes, vu qu’une "proposition constructive est sur la table".