Le 8 juin 2015, les ministres européens en charge de l’Energie se sont réunis à Luxembourg pour le volet "Energie" du Conseil Transports, Télécommunications et Energie. Sécurité énergétique, Union de l’énergie et relations internationales en matière d’énergie et stratégie GNL ont été les principaux points à l’ordre du jour. Deux déclarations politiques visant à améliorer la coopération régionale en matière énergétique ont également été signées. Finalement, le Luxembourg a présenté ses priorités en la matière pour sa Présidence du Conseil au cours du second semestre 2015.
Les ministres ont adopté des conclusions sur la mise en œuvre du cadre stratégique pour une Union de l'énergie résiliente dotée d’un politique clairvoyante en matière de changement climatique qui avait été présentée par la Commission le 25 février 2015 et entérinée lors du Conseil européen du 19 mars 2015.
Les conclusions accordent une importance particulière aux consommateurs et à l’encouragement des investissements nécessaires dans le secteur de l’énergie. Elles définissent des lignes directrices qui doivent permettre d’offrir aux consommateurs (ménages et entreprises) une énergie sûre, durable compétitive et abordable. Elles soulignent également l’urgence d’établir un marché intérieur de l’énergie "pleinement opérationnel et connecté" et préconisent des initiatives visant à stimuler le rôle prépondérant de l'UE en matière technologique et d'innovation dans le domaine de l'énergie et du climat, tout en encourageant la croissance et l'emploi.
Pour mémoire, l’Union de l'énergie repose sur les trois objectifs de sécurité de l’approvisionnement, durabilité et compétitivité. Pour atteindre ces objectifs, l’Union de l'énergie comporte cinq dimensions : la sécurité énergétique, la solidarité et la confiance; la pleine intégration du marché européen de l’énergie; l’efficacité énergétique comme moyen de modérer la demande; la décarbonisation de l’économie; la recherche, l'innovation et la compétitivité.
La mise en œuvre des cinq dimensions nécessitera la mise en place d'un système de gouvernance conformément aux conclusions du Conseil européen de mars 2015. Dans ce contexte, Maros Šefčovič, vice-Président de la Commission en charge de l’Union de l’énergie, a informé les ministres des questions relatives à la gouvernance qui seront approfondies sous Présidence luxembourgeoise.
Etienne Schneider, ministre luxembourgeois de l’Economie, qui participait au Conseil, s’est félicité de l’adoption de ces conclusions et a déclaré que "ce qui fera la différence entre la politique énergétique d’avant et l’Union de l’énergie du futur est la gouvernance : une gouvernance forte mais flexible, précise mais simplifiée, coordonnée mais diversifiée où Commission européenne, États membres, Parlement européen et parlements nationaux et acteurs du marché entament un dialogue vertueux mais sans concession".
Les conclusions du Conseil insistent également sur le rôle important de la coopération régionale dans la mise en œuvre de l'Union de l'énergie, notamment en vue de réaliser des économies d’investissement. C’est dans ce contexte qu’ont été signées, en marge du Conseil, deux déclarations politiques, comme le rapporte un communiqué de la Commission :
Par ailleurs, l’Estonie, la Finlande, l’Allemagne, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la Suède, la Norvège et la Commission européenne ont signé un protocole d’accord concernant le renforcement du plan d’interconnexion des marchés énergétiques de la région de la Baltique (PIMERB) qui a pour objectif de mettre fin à l’isolement énergétique de la région de la mer Baltique et d’intégrer pleinement celle-ci aux marchés énergétiques de l’UE.
Pour Etienne Schneider, "la coopération régionale est un élément-clé de l'implémentation d'un marché européen qui fonctionne correctement". Ainsi, la signature de ces déclarations politiques permettra de "donner un nouvel élan au fonctionnement du marché de l'électricité dans notre région", ainsi que le rapporte un communiqué du gouvernement.
Lors de la réunion du Conseil, les ministres avaient été invités à évaluer les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la stratégie européenne pour la sécurité énergétique proposée le 28 mai 2014 par la Commission et à réfléchir aux prochaines étapes, en abordant en particulier la question de la sécurité d'approvisionnement.
L'UE importe 53 % de l'énergie qu'elle consomme, dont près de 90 % de pétrole brut, 66 % de gaz naturel, 42 % d'autres combustibles solides et 40 % de combustible nucléaire. La stratégie pour la sécurité énergétique vise, à court terme, à renforcer la résilience de l'UE aux chocs et aux ruptures dans l'approvisionnement énergétique et, à long terme, à réduire la dépendance à l'égard de certains combustibles, fournisseurs et voies d'acheminement.
Elle propose des mesures destinées à améliorer l'efficacité énergétique, à accroître la production d'énergie dans l'UE, à diversifier les voies et les sources d'approvisionnement et à compléter le marché intérieur en mettant en place les infrastructures manquantes. Elle recommande par ailleurs de parler d'une seule voix sur la scène internationale en matière de politique énergétique et de consolider les mécanismes d'urgence et de solidarité.
Lors de la réunion du Conseil européen des 19 et 20 mars 2015, les chefs d'État ou de gouvernement avaient abordé ces questions, insistant notamment sur la nécessité de renforcer le cadre législatif pour la sécurité de l'approvisionnement en électricité et en gaz, de faire en sorte que l'ensemble des accords liés à l'achat de gaz auprès de fournisseurs extérieurs soient pleinement conformes au droit de l'UE et aux règles en matière de sécurité des approvisionnements et d'évaluer les possibilités de mécanismes volontaires d'agrégation de la demande.
Les résultats du débat du 8 juin sont censés contribuer aux travaux préparatoires que la Commission mène actuellement sur le réexamen prévu du règlement sur la sécurité de l'approvisionnement en gaz.
Les ministres se sont montrés d’accord qu’il fallait diversifier les routes d’approvisionnement, entamer des coopérations régionales, revoir la configuration du marché de l’énergie et développer des infrastructures pour avancer en direction d’un marché intérieur de l’énergie.
Un débat "très ouvert" selon la ministre lettonne de l’Economie, Dana Reizniece-Ozola, qui a présidé la session, a eu lieu sur la stratégie GNL que la Commission projette dans le cadre de l’Union pour l’énergie et comme maillon de la sécurité de l’approvisionnement de l’UE en énergie. La Commission s’est proposée en février 2015 d’étudier tout le potentiel du gaz naturel liquéfié (GNL), y compris comme solution de secours en cas de crise, lorsque l'Europe ne reçoit pas suffisamment de gaz par le réseau de gazoducs existant. Elle est convaincue que "le développement des échanges de GNL contribuera à homogénéiser les prix du gaz naturel à l'échelle du monde entier".
Dans sa communication de février 2015, la Commission souligne qu’"au cours de ces dernières années, les prix du GNL ont dépassé ceux du gaz acheminé par gazoduc, en raison, notamment, des frais élevés de liquéfaction, de regazéification et de transport, ainsi que de la demande asiatique". Mais " afin de résoudre tous ces problèmes", la Commission veut élaborer "une stratégie globale relative au GNL qui tiendra aussi compte des besoins en infrastructures de transport pour connecter les points d’accès au GNL au marché intérieur." Elle veut également examiner "le potentiel de stockage de gaz en Europe et le cadre réglementaire nécessaire pour garantir la disponibilité de stocks de gaz suffisants pour l’hiver". Et de plus, elle "s’efforcera (…) de lever les obstacles aux importations de GNL en provenance des États-Unis et d’autres producteurs".
La ministre lettonne a parlé des interventions des ministres qui ont mis en avant que "le nerf de la guerre, c’est le prix", que le GNL ne pourra jamais être une source d’énergie exclusive, mais que si l’UE arrivait à mettre en place des infrastructures adéquates, ce serait bon pour la concurrence et les marchés. Elle a évoqué le Qatar, l’Algérie et les USA comme des fournisseurs potentiels. Pour elle, un sur-approvisionnement de l’UE en GNL peut faire baisser le prix du gaz qui lui parvient par les gazoducs, à condition de disposer de capacités de stockage adéquates.
Miguel Arias Cañete, le commissaire à l’Energie, a précisé que dans ce cadre il fallait aussi tenir compte des changements survenus sur les marchés, où l’Australie et les USA sont devenus des acteurs mondiaux et où les structures d’approvisionnement des marchés ont changé, avec moins de contrats à long terme et des prix qui se resserrent, alors que les deux nouveaux acteurs cherchent à atteindre les plus élevés. "Il faut donc une stratégie claire pour le GNL", a insisté Miguel Arias Cañete.
La Commission informé le Conseil de l'état d'avancement des travaux concernant les pourparlers trilatéraux entre l'Ukraine, la Russie et l'UE et la Communauté de l'énergie. Au cours de la conférence de presse, à laquelle le commissaire en charge, Maroš Šefčovič, n’a pas participé, car prenant part à des dialogues citoyens au Luxembourg, l’objectif de permettre à l’Ukraine de disposer d’assez de réserves a été évoqué et l’espoir a été émis que les négociations avec l’Ukraine et la Russie débouchent sur un accord.
Au cours de la réunion, le ministre luxembourgeois de l’Economie, Etienne Schneider, a présenté les priorités de la Présidence luxembourgeoise du Conseil. "La Présidence luxembourgeoise priorisera l’implémentation d’une gouvernance basée sur un dialogue vertueux entre la Commission européenne et les États membres en mettant en avant la dimension régionale, tout en approfondissant la dimension UE", a-t-il souligné.
La Présidence luxembourgeoise mettra également en avant la dimension innovation, recherche et nouvelles technologies et notamment la question-clé du financement d'une transition énergétique durable dans le contexte de la mise en œuvre du plan Juncker. Ceci permettra d'avoir selon le communiqué du gouvernement luxembourgeois, "une vision claire et globale" de tous les instruments financiers communautaires prévus pour la mise en œuvre des politiques énergétiques. Dans le cadre de la transition énergétique, les secteurs de l’énergie renouvelable ainsi que de l’efficacité énergétique seront des catalyseurs importants mais aussi des créateurs d’emploi et de croissance.
"Sur le plan international, nous ferons le point sur le Corridor Sud, sur les relations avec l'Ukraine et nous nous intéresserons à nos relations avec l'Amérique du Nord. D'ailleurs, nous nous attarderons sur le partenariat énergétique euro-méditerranéen", a déclaré Étienne Schneider lors de la présentation des priorités.