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Énergie
Lors d’un événement organisé par EurActiv, Claude Turmes s’en prend à Gazprom et à la Commission européenne au sujet du projet de construction du gazoduc Nord Stream 2
24-02-2016


Euractiv.comLors d’un événement organisé par le journal d’actualité européenne EurActiv le 24 février 2016 au Parlement européen à Bruxelles, l’eurodéputé luxembourgeois Claude Turmes (Les Verts/ALE) a fait des révélations concernant la stratégie de Gazprom pour faire aboutir le projet de gazoduc Nord Stream 2 et le revirement d’attitude de la Commission européenne dans ce contexte, indique le média dans un article publié dès le lendemain sur sa page anglaise.

Lors de cette conférence marquant le lancement d’ "EurActory40", un classement des 40 principaux experts dans la politique de l’Union de l’énergie, Claude Turmes, qui est aussi coordinateur pour les questions énergétiques au sein du groupe des Verts/ALE, a été consacré cinquième leader institutionnel le plus influent en la matière, après Maroš Šefčovič, le vice-président de la Commission européenne en charge de l’Union de l’énergie, la chancelière allemande Angela Merkel, le député européen (PPE) et ancien Premier ministre de Pologne Jerzy Buzek et le commissaire européen à l’Action climatique et à l’énergie, Miguel Arias Cañete.

Sans vouloir révéler ses sources, Claude Turmes a indiqué que Gazprom avait posé une condition aux cinq entreprises occidentales (en particulier à Shell, Wingas et Engie) qui co-investissent dans Nord Stream 2 pour gagner le projet, à savoir arrêter de faire transiter du gaz par l’Ukraine. L’eurodéputé a dénoncé un "machiavélisme russe qui fonctionne bien avec les lobbies", "un projet politique pour diviser l’Europe".

Au départ critiqué par la Commission européenne pour aller à l’encontre des objectifs de l’Union de l’énergie qui vise à assurer la sécurité énergétique et réduire la dépendance énergétique de l’UE, Nord Stream est un gazoduc de la mer Baltique qui relie la Russie à l’Allemagne, en passant par l’Ukraine.

Nord Stream 2 vise à acheminer 55 milliards de mètres cubes de gaz supplémentaires par an de Russie vers l’Allemagne via la mer Baltique. Le projet est détenu à 50 % par Gazprom et par BASF, E.On, Engie, OMV et Shell à raison de parts de 10 % chacune. Ce projet soutenu par l’Allemagne divise l’UE depuis qu’un accord-cadre a été signé en septembre 2015 avec le Russe Gazprom.

Les pays d’Europe centrale s’inquiètent du fait que Nord Stream implique l’arrêt du transit russe de gaz via l’Ukraine, privant ainsi le pays de taxes de transit gazier à hauteur de 2 milliards d’euros par an.

Le revirement d’attitude de la Commission

Selon Claude Turmes, Nord Stream 2 est la "plus grande erreur" européenne en matière de politique énergétique, indique EurActiv.

L’eurodéputé a révélé qu’il avait suffi d’un seul coup de fil de la chancelière allemande à Martin Selmayr, le directeur de cabinet du président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, de nationalité allemande, pour "changer complètement l’attitude de M. Šefčovič envers Nord Stream". La Commission avait au départ eu des réticences envers le projet.

Claude Turmes a ajouté que le commissaire à l’Action climatique et à l’énergie, Miguel Arias Cañete avait ensuite cédé lui aussi et que les services juridiques de la Commission avaient "produit un document disant que l’Allemagne peut s’occuper de Nord Stream et que nous cela nous sera égal".

"Si la Commission n’est pas assez forte pour aller à l’encontre des intérêts allemands, alors j’ai bien peur que cela fasse beaucoup de dégâts", a ajouté l’eurodéputé, qui s’est aussi demandé quelle était la cohérence à injecter des milliards en Ukraine et à permettre à la Russie de tuer l’Ukraine via Nord Stream.

Maroš Šefčovič, qui avait quitté l’événement avant que Claude Turmes ne fasse ses révélations, n’a pas été en mesure de répondre, a indiqué EurActiv, qui avait publié une interview du commissaire le 11 février 2016, dans laquelle ce dernier avait explicitement dit que Nord Stream n’était pas en conformité avec les objectifs de l’Union de l’énergie.

Claude Turmes n’en est pas à sa première prise de position contre la Commission européenne dans le contexte de l’Union de l’énergie. Le 16 février 2016, alors que la Commission avait présenté un train de mesures sur la sécurité énergétique, visant à préparer l'Union à la transition énergétique mondiale et à d'éventuelles ruptures d'approvisionnement énergétique, l’eurodéputé avait réagi dans un commentaire publié sur le site d'EurActiv, en estimant que la stratégie de la Commission constituait "un affront à l'accord de Paris". "La première initiative prise par la Commission européenne après la COP 21 est un paquet sur un combustible fossile, promouvant le gaz en Europe, comme si Paris n'avait jamais existé", avait-il constaté.