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Concurrence
Abus de position dominante - La Commission prend de nouvelles mesures dans le cadre de son enquête sur la violation présumée des règles de l’UE par le service de comparaison de prix et les pratiques publicitaires de Google
14-07-2016


La Commission européenne a lancé le 14 juillet 2016 une nouvelle offensive contre le géant américain Google, l'accusant une nouvelle fois d'abus de position dominante.  L'exécutif européen a adressé à Google deux "communications des griefs"  - l'équivalent d'un acte d'accusation  -, pour pratiques anticoncurrentielles: l'une concernant son service de comparaison de prix, systématiquement favorisé dans ses pages de résultats selon la Commission, et l’autre concernant ses pratiques publicitaires, qui consistent à limiter artificiellement la possibilité, pour les sites web tiers, d’afficher les publicités contextuelles émanant de concurrents de Google.

Margrethe Vestager à Bruxelles le 14 juillet 2016 © European Union , 2016  / Source: EC - Audiovisual Service / Photo: Jennifer Jacquemart"Si nos enquêtes concluent à la violation, par Google, des règles de l'UE en matière de pratiques anticoncurrentielles, la Commission a le devoir d'agir pour protéger les consommateurs européens et l'exercice d'une concurrence équitable sur les marchés européens", a déclaré à la presse la commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager.  Il convient toutefois de préciser que l’envoi de communications des griefs ne préjuge pas de l’issue de l’enquête, la Commission ne prenant une décision finale qu’après que les parties ont exercé leur droit de la défense.

Google est dans le viseur de l’UE depuis novembre 2010, date à laquelle avait ouvert une procédure sur le traitement favorable réservé par Google à son propre service de comparaison de prix, ainsi que sur les restrictions imposées par l’entreprise quant à la capacité de certains sites web tiers d’afficher les publicités contextuelles émanant de ses concurrents. La Commission a également ouvert une procédure et continuera d’enquêter sur le traitement favorable que réserve Google, dans les résultats de recherche générale, à ses autres services de recherche spécialisée. Elle s’inquiète par ailleurs de l’extraction du contenu web de ses concurrents (le "scraping") et des restrictions indues appliquées aux publicitaires. En outre, la Commission mène actuellement une enquête sur le système d’exploitation Androïd de Google et certaines applications mobiles. À cet égard, la Commission a adressé une communication des griefs à Google et à Alphabet en avril 2016 et vient d’indiquer avoir accordé au géant américain un délai supplémentaire pour qu'il puisse répondre aux accusations concernant Android.

En ce qui concerne les accusations portant sur la comparaison de prix, la Commission revient à la charge avec de nouveaux griefs qui viennent renforcer les accusations qu’elle avait portées contre le géant du Net en avril 2015. La nouvelle communication des griefs fait suite à la réponse donnée par Google en septembre 2015 et présent, indique les services de presse de la Commission, "un large éventail d’éléments probants et de données supplémentaires qui renforcent la conclusion préliminaire de la Commission selon laquelle Google a abusé de sa position dominante en favorisant systématiquement son propre service de comparaison de prix dans ses pages de résultats de recherche générale".

"Les éléments supplémentaires ont trait, entre autres, à la manière dont Google favorise son propre service de comparaison de prix par rapport à celui de ses concurrents, à l’incidence de la place occupée par un site web dans la page de résultats de Google sur son trafic et à l’évolution du trafic vers le service de comparaison de prix de Google par rapport à ses concurrents", précise la Commission qui craint que les utilisateurs ne voient pas nécessairement les résultats les plus pertinents en réponse à leurs requêtes, ce qui porte préjudice aux consommateurs et entrave l’innovation. Google et Alphabet, la société mère de Google, ont 8 semaines pour répondre à la nouvelle communication des griefs.

Pour ce qui est du deuxième volet de l’enquête, la Commission a adressé une communication des griefs à Google portant sur les restrictions imposées par l’entreprise à la capacité de certains sites web tiers d’afficher les publicités contextuelles émanant de ses concurrents. Selon l’avis préliminaire de la Commission, ces pratiques ont permis à Google de protéger sa position dominante dans le domaine de la publicité contextuelle en ligne et d’empêcher ses concurrents existants et potentiels, y compris les autres fournisseurs de services de recherche et plateformes de publicité en ligne, d’accéder à ce secteur commercialement important et de s’y développer. 

Google place des publicités contextuelles directement sur le site web Google search mais aussi, en tant qu’intermédiaire, sur des sites web tiers grâce à sa plateforme "AdSense for Search" ("intermédiation publicitaire liée aux recherches"). Il s’agit notamment des sites web de détaillants en ligne, d’opérateurs de télécommunications et de journaux. Les sites web comprennent un champ de recherche qui permet aux utilisateurs de chercher des informations. À chaque fois qu’un utilisateur effectue une recherche, en plus des résultats de recherche, des publicités contextuelles s’affichent également. S’il clique sur la publicité, tant Google que le tiers reçoivent une commission.

La Commission estime à ce stade que Google occupe une position dominante sur le marché de l’intermédiation publicitaire liée aux recherches dans l’Espace économique européen (EEE), sa part de marché étant d’environ 80 % au cours des dix dernières années. Google tire une grande part de ses revenus provenant de l’intermédiation publicitaire liée aux recherches des accords qu’elle conclut avec un nombre limité de tiers importants, les "partenaires directs". La Commission craint que dans ces accords avec des partenaires directs, Google ait violé les règles de l’UE en matière de pratiques anticoncurrentielles en imposant les conditions suivantes:

  • exclusivité: les tiers ne peuvent afficher de publicités contextuelles émanant de concurrents de Google;
  • affichage en bonne place d’un nombre minimum de publicités contextuelles de Google: les tiers doivent accepter un nombre minimum de publicités contextuelles de Google et leur réserver les meilleures places sur leurs pages de résultats de recherche. En outre, des publicités contextuelles concurrentes ne peuvent être placées au-dessus ou à côté des publicités contextuelles de Google;
  • droit d’autoriser des publicités concurrentes: les tiers doivent obtenir l’autorisation de Google avant de modifier l’affichage des publicités contextuelles concurrentes.

La Commission est d’avis, à titre préliminaire, que ces pratiques, qui existent depuis dix ans, entravent la concurrence sur ce marché important sur le plan commercial. La communication des griefs dénonce la pratique d’exclusivité depuis 2006. Celle-ci a été progressivement remplacée à partir de 2009 dans la plupart des contrats par l’exigence d’un affichage en bonne place/d’un nombre minimum de publicités et par le droit pour Google d’autoriser les publicités concurrentes. La Commission s’inquiète du fait que ces pratiques aient artificiellement réduit le choix et freiné l’innovation sur le marché pendant toute cette période. Elles ont réduit artificiellement les possibilités des concurrents de Google sur ce marché important sur le plan commercial et donc la capacité des sites web tiers à investir dans la fourniture de choix et de services innovants aux consommateurs.

La Commission note que, dans le cadre des procédures pour abus de position dominante, Google a récemment décidé de modifier les conditions de ses contrats AdSense avec ses partenaires directs pour donner à ces derniers plus de liberté en matière d’affichage de publicités contextuelles concurrentes. La Commission examinera de près ces changements apportés par Google à ses pratiques afin d’évaluer leur impact sur le marché. 

Google et Alphabet ont 10 semaines pour répondre à la communication des griefs.