Le 17 mars 2011, Claude Turmes et Henri Kox convoquaient la presse au sujet du nucléaire. Un mois plus tard, le 15 avril 2011, alors qu’a eu lieu entretemps le discours sur l’état de la Nation et le débat qui a suivi à la Chambre, le parlementaire européen et le député ont souhaité soumettre la politique anti-nucléaire annoncée par le gouvernement à une sorte de "stress-test". Le bilan qu’ils en ont tiré devant la presse va d’insuffisant à très mauvais.
Le premier point soulevé par déi gréng concerne le financement du projet de recherche ITER. Lors de son discours sur l’état de la Nation, le Premier ministre Jean-Claude Juncker a clairement appelé à remettre en question la contribution luxembourgeoise au financement de la construction de ce réacteur à fusion nucléaire.
Pourtant, d’après ses contacts à Bruxelles, Claude Turmes a pu constater que jusqu’ici, les fonctionnaires luxembourgeois n’en ont rien dit au sein du groupe de travail "Recherche" du Conseil, qui s’est réuni notamment les 21 et 28 mars 2011. Les ministres Biltgen, Frieden et Krecké n’auraient selon l’eurodéputé luxembourgeois, pas donné d’instruction dans ce sens. De même, les eurodéputés CSV et LSAP ne se sont pas prononcés clairement pour une sortie du projet ITER le 7 avril dernier, à l’occasion du vote d’une résolution du Parlement européen sur la politique énergétique de l’UE, toujours selon Claude Turmes.
Les deux parlementaires, qui octroient un "très mauvais" au gouvernement sur ce point, appellent ce dernier à s’en tenir à sa position, ce qui, selon Claude Turmes, ne pourra se faire que par le biais d’une lettre officielle adressée par la voie diplomatique aux autres Etats membres et à la Commission. Un courrier qui devrait s’inscrire dans le cadre des négociations budgétaires qui sont sur le point de commencer.
Le projet ITER aurait en effet besoin pour 2012 et 2013 de fonds supplémentaires à hauteur de 2,6 milliards d’euros, des fonds qui, selon les Verts, et selon le discours du Premier ministre, devraient plutôt servir au financement de la recherche en matière d’énergies renouvelables. Claude Turmes attend aussi que les ministres luxembourgeois affichent clairement leur position lors du Conseil Compétitivité des 30 et 31 mai 2011.
Quant à l’intention annoncée par le gouvernement de sortir du nucléaire, les Verts commencent par appeler le gouvernement à stopper la construction de la ligne électrique directe qui relierait Arcelor Mittal au réseau français, et donc à l’énergie produite par la centrale nucléaire de Cattenom. Au niveau national, le gouvernement est invité, en tant qu’actionnaire principal d’Enovos, à mettre fin d’ici la fin de l’année aux contrats d’achat d’électricité qui n’excluent pas explicitement le nucléaire et le charbon. Claude Turmes a aussi plaidé pour une stratégie d’investissement favorisant la production d’énergie renouvelable au Luxembourg.
Ensuite, de façon plus générale, les parlementaires appellent le gouvernement luxembourgeois à se positionner clairement au niveau européen pour un passage à une énergie 100 % renouvelable d’ici 2050. La Commission est en train de préparer pour l’automne 2011, sur les bases notamment d’une consultation publique qui vient de se clore, un document qui va s’appeler "Energy roadmap 2050". Plusieurs pays, parmi lesquels le Danemark, l’Irlande ou la Grèce, mais aussi l’Allemagne et la Belgique, ont soumis des propositions et pris position dans les débats sur l’avenir énergétique de l’UE. Claude Turmes appelle donc le Luxembourg à se joindre à ces initiatives et à faire en sorte que des scénarios prévoyant 100 % d’énergies renouvelables pour 2050 et 65 % dès l’horizon 2030 soient pris en compte. Claude Turmes a ainsi rappelé l’opportunité offerte au gouvernement de plaider cette cause à l’occasion du Conseil informel des ministres de l’Energie qui se tiendra en Hongrie les 2 et 3 mai prochain.
L’existence de la centrale de Cattenom n’a jamais été acceptée par les Luxembourgeois. La catastrophe de Fukushima a conduit l’UE à envisager de soumettre les 143 réacteurs nucléaires sur son territoire à des tests de sécurité dont les critères sont en train d’être définis. La centrale de Cattenom est concernée. Le 6 avril 2011, le Premier ministre Juncker avait dit dans sa déclaration sur l’état de la nation que si la preuve était apportée que la centrale de Cattenom ne résisterait pas à l’impact d’un gros avion de réaction, elle devrait être débranchée. Le 13 avril, le ministre français des Affaires européennes, Laurent Wauquiez, a confirmé l’attachement de la France au nucléaire, mais que si des failles dans la sécurité devaient être constatées, la France en tirait des conséquences.
Le problème, ce sont les critères des tests de sécurité. Pour les Verts, aucune lettre de ministre Affaires étrangères à son homologue français comme celle de Jean Asselborn à Alain Juppé le 21 mars 2011, aucune visite du Premier ministre luxembourgeois à son homologue François Fillon comme celle prévue le 28 avril 2011 ne seront utiles à elles toutes seules. "La France se soucie très peu des préoccupations de ses voisins", a déclaré le député Henri Kox, qui sortait d’une réunion du Conseil interparlementaire de la Grande Région avec la direction de la centrale. Selon Claude Turmes, les tests de sécurité devraient pour la France avant tout être axés sur les risques liés aux catastrophes naturelles. Il a dénoncé "une politique perfide de la France et d’EDF" qui bloqueraient la prise en compte des risques liés aux chutes d’avion, aux attaques terroristes et aux cyber-attaques. L’ASN, l’Agence de sûreté nucléaire française, qui devrait mener les tests, n’est pas pour lui une agence indépendante, contredisant ainsi une déclaration du ministre français dans ce sens l’avant-veille à Luxembourg. Elle empêche selon lui des experts indépendants d’avoir accès aux centrales et se compose depuis 35 ans des mêmes personnes qui ont propagé le nucléaire en France. "De plus, il y a le syndrome des grandes écoles. Tous se connaissent entre camarades de promotion", a-t-il ajouté.
"Sur ce dossier, le Luxembourg ne pourra obtenir un succès qu’avec d’autres, en développant une stratégie d’alliances", a lancé le député européen Claude Turmes. Une telle alliance devrait se nouer au niveau européen. Comme les États membres et la Commission ont invité le 21 mars 2011 le Groupe européen de haut niveau sur la sûreté nucléaire et la gestion des déchets (ENSREG) et d'autres organismes compétents à définir l'étendue et les modalités de ce type de tests, en s'appuyant sur l'expertise disponible et, le moment venu, sur les leçons à tirer du récent accident. Ce groupe se réunira le 12 mai 2011, et c’est là que le Luxembourg doit selon les deux parlementaires verts se manifester et donner des instructions à ses représentants pour formuler ses revendications et chercher des alliés. Puis fin mai, au COREPER, une deuxième manche devrait se jouer.
Les deux parlementaires verts ont, comme lors de leur conférence de presse du 17 mars 2011, réitéré leurs reproches que le gouvernement reste en deçà de l’étude LUXRES, qu’ils jugent "conservatrice", et qui rend l’avis que le Luxembourg pourrait aller vers les 8,6 % d’énergies renouvelables. Mais bien que l’étude date de 2007, il n’y a toujours pas de plan gouvernemental Les Verts sont d’ais que le gouvernement devrait soumettre un plan sectoriel pour l’énergie éolienne. Dans ce cadre, ils ont rejeté l’idée qu’il faudrait aller vers les 1 500 éoliennes sur le territoire luxembourgeois. Ils ont insisté sur le fait que l’on devrait d’abord remettre les sites actuels au niveau des nouvelles technologies, jusqu’à plus de dix fois puissantes en termes de production électrique, et si les nouvelles technologies avec leurs 7,5 mégawatts/heure étaient appliquées, un tel parc d’éoliennes ne dépasserait pas les 500 unités.