Les ministres luxembourgeois du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration Nicolas Schmit, et de l’Intérieur, Jean-Marie Halsdorf, ont participé le 9 juin 2011 à Luxembourg.
Nicolas Schmit a assisté à la partie de la session du Conseil consacrée aux questions d’immigration et d’asile du Conseil "Justice et Affaires intérieures" (JAI). Lors d’un point de presse, il a abordé les questions liées aux migrations et à l'asile dans l'Union européenne ainsi qu’au dialogue pour les migrations, la mobilité et la sécurité avec les pays du Sud de la Méditerranée, tout cela sur base de plusieurs communications de la Commission. Il a aussi évoqué le régime des visas de la Serbie et de la Macédoine, l’acquis Schengen et la modification en vue de son renforcement des dispositions relatives à Frontex, l'agence chargée de la gestion des frontières extérieures de l'UE.
Si la situation est tendue aux frontières extérieures de l’UE, ce n’est pas pour le ministre Schmit une chose nouvelle. Il y a du « stress aux frontières depuis plus de vingt ans, depuis la chute du Mur de Berlin, depuis les guerres dans les Balkans, depuis les migrations des Africains des pays subsahariens, et maintenant avec le "printemps arabe", après les événements en Tunisie, en Libye et en Syrie, où les gens fuient massivement leur pays. Face à ces évolutions, "l’UE doit agir et agir ensemble, de manière solidaire", pense le ministre.
Nicolas Schmit estime qu’il y a beaucoup de confusion dans ces dossiers. Il faut donc lancer des messages clairs.
Le premier, c’est de dire que face à la situation en Méditerranée, il faut être solidaire entre Etats membres et utiliser pleinement les instruments dont l’UE dispose, comme Frontex, mais aussi recourir à ses ressources en politique étrangère. Car pour le ministre, les migrations sont aussi une affaire de politique étrangère.
Entre Etats membres, il faut ensuite se comporter de manière à ne pas mettre en cause des acquis comme Schengen et la libre circulation des personnes. "Il est faux de croire qu’en instaurant des contrôles aux frontières intérieures, l’on arrivera à maîtriser les problèmes qui ont surgi", a-t-il lancé. Ces problèmes ont leur origine dans les pays d’origine des migrations. Et ils continuent de se poser aux frontières extérieures.
Mais les frontières intérieures ? "Il est dangereux de lancer le débat d’une certaine manière en prônant pour les Etats membres de l’espace Schengen la liberté d’instaurer des contrôles aux frontières intérieures selon leur bon vouloir ou leur calendrier électoral, sans consulter les autres", a mis en garde le ministre de l’Immigration. "Il ne fait pas jouer avec un des biens les plus précieux de l’UE, la libre circulation des personnes." Reste que le gouvernement danois, qui veut réinstaurer dans les prochains jours les contrôles aux frontières intérieures avec l’Allemagne et la Suède suite à un accord avec l’extrême droite, a menacé de renforcer les mesures unilatérales si l’UE ne faisait pas un pas en sa direction et lançait un signal clair. Mais à ce stade, c’est la Commission en tant que gardienne des traités qui est compétente selon Nicolas Schmit pour lancer une éventuelle plainte voire une action devant la CJUE.
Nicolas Schmit admet qu’il peut y avoir, et le cadre actuel les prévoit déjà, des cas de figure qui rendent ce type de contrôle nécessaire. Mais il doit être instauré dans un cadre communautaire et rester un dernier recours en cas de grande urgence. "La proposition de la Commission va d’ailleurs dans ce sens", a-t-il jugé, tout en exprimant l’espoir que le Conseil européen des 23 et 24 juin n’aboutisse pas à une mise en cause de l’acquis Schengen.
Un autre souci, c’est les régimes – libéralisés - de visas de la Serbie et de la Macédoine, conçus comme moyens d’européaniser ces pays, mais qui ont conduit à de multiples abus en matière de demandes d’asile politique. L’Allemagne, la Suède et la Belgique se sont plaintes, le Luxembourg a eu de multiples réunions avec le gouvernement serbe à ce sujet. Nicolas Schmit a rappelé qu’un tel régime implique des droits et des devoirs, et il revient aux pays bénéficiaires de prendre des mesures pour éviter les abus en amont. Mais de l’autre côté, il incombe aux pays limitrophes de l’espace Schengen (la Hongrie, la Grèce, n.d.l.r.) de veiller au respect des règles d’entrée dans la zone au moyen de contrôles selon les normes qui devraient prévaloir à ces frontières extérieures.
Les ministres s’étaient aussi penchés sur le processus d'évaluation Schengen concernant le degré de préparation de la Bulgarie et de la Roumanie en vue de la mise en œuvre de l'ensemble des dispositions de l'acquis de Schengen. On va ici vers une adhésion pleine par étapes en 2012. Nicolas Schmit a signalé une ouverture de la France, qui s’opposait tout comme les Pays-Bas, l'Allemagne, la Suède, la Finlande et le Danemark fermement à l’entrée dans Schengen de ces deux pays à cause des problèmes de corruption. Une ouverture confirmée par la déclaration du ministre français de l’Intérieur, Claude Guéant, qui a parlé d’une première étape, l’ouverture des frontières aériennes en présence d'officiers de police d'autres Etats en 2011, et puis d’une seconde étape qui interviendrait plus tard, en 2012, avec l'ouverture des frontières terrestres, là encore avec l'aide de garde-frontières d'autres pays de l'UE. Les gouvernements des l'espace Schengen attendent par ailleurs un rapport que la Commission européenne doit publier en juillet 2011 sur l'état des réformes menées dans les deux pays en matière de justice et de lutte contre la corruption.
Il ressort par ailleurs d’un communiqué du ministre de l’Intérieur, Jean-Marie Halsdorf, que les ministres ont décidé de la création d’une agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information de l’espace Schengen comme le Système d’information Schengen de deuxième génération (SIS II), le Système d’information sur les visas (VIS) et EURODAC. Le siège de l’agence a été attribué à Tallinn (Estonie). L’exploitation des systèmes informatiques s’effectuera à partir de Strasbourg, hébergeant déjà l’actuel SIS I.