Le 8 novembre 2011, le gouverneur de la BCL, Yves Mersch, a présenté aux députés de la commission des Finances et du Budget de la Chambre l’avis de la Banque centrale du Luxembourg sur le projet de loi concernant le budget des recettes et des dépenses de l’Etat pour l’exercice 2012.
Au vu du contexte international et des projections de croissance qui ont été revues à la baisse dans la zone euro, au vu de la révision des comptes nationaux, qui fait apparaître que l’activité économique au Luxembourg a évolué dans un passé récent nettement moins favorablement que ce qui était admis jusqu’à présent, au vu de la croissance économique atone du Luxembourg depuis début 2011,Yves Mersch estime les 2 % de croissance sur lesquels table le projet de budget 2012 du Gouvernement ne seront jamais atteints. Il se dit même convaincu qu’avec la dégradation conjoncturelle à venir, il sera impossible aux autorités d’entrevoir à l’horizon 2014 des finances publiques à l’équilibre à moins de procéder à des assainissements budgétaires conséquents qui, selon les projections de la BCL, devraient se situer aux alentours de 350 millions d’euros par an, soit environ 0,8 % du PIB, et ce dès 2012.
Dans son avis, la BCL analyse dans un premier temps les grandes lignes du projet de budget 2012 et note d’emblée que les efforts sont "insuffisants pour retrouver l’équilibre budgétaire ou pour satisfaire l’Objectif budgétaire à moyen terme (OMT)".
La BCL se penche ensuite longuement sur le contexte macro-économique, notant que les indicateurs conjoncturels tendent à montrer que l’environnement macro économique international s’est sensiblement dégradé depuis le début de l’été 2011.
Les plus récentes données témoignent d’une baisse généralisée de la confiance dans la zone euro, aussi bien au niveau des ménages que des entreprises, observe la BCL. De même, l’indice PMI composite (Purchasing Managers Index) relatif à la situation conjoncturelle dans la zone euro n’a cessé de se dégrader lors des derniers mois, pour s’établir en octobre bien en deçà des 50 points, seuil en dessous duquel l’activité économique est considérée en contraction. Pour la BCL, cette situation est particulièrement préoccupante, étant donné qu’elle concerne à la fois le secteur industriel et le secteur des services.
De plus, en raison de la dégradation rapide de la situation conjoncturelle mondiale au cours de l’été, les prévisions de croissance économique établies en septembre 2011 par le FMI pour l’ensemble des économies ont été sensiblement revues à la baisse pour 2011 et 2012 par rapport à celles émises trois mois plus tôt. De même, les plus récentes prévisions de l’OCDE attestent également d’un ralentissement abrupt de la croissance économique, en particulier dans la zone euro. Les prévisions d’automne de la Commission européenne, qui ont été publiées le 10 novembre 2011, après la rédaction de cet avis de la BCL, semblent confirmer cette tendance.
Le Luxembourg n’est pas épargné par cette évolution, note la BCL, faisant état de perspectives à court terme qui "demeurent bien sombres". La croissance économique a été atone depuis le début de l’année 2011 (0,2 % de croissance par trimestre en moyenne) et le climat de confiance dans l’industrie ainsi que le moral des consommateurs n’ont cessé de se replier lors des tout derniers mois d’observation, observent les auteurs de l’avis. Ils rappellent d’une part que l’économie luxembourgeoise est extrêmement dépendante de l’évolution de l’activité dans le secteur financier, qui est actuellement soumis à rude épreuve, et que d’autre part, il s’agit d’une petite économie très largement ouverte dont la majorité des marchés à l’exportation se trouvent au sein de la zone euro, qui constitue l’épicentre de la crise actuelle.
La BCL pointe aussi le fait que les difficultés de l’économie luxembourgeoise consécutives à la grave crise économique et financière de 2008-2009 ne sont toujours pas refermées : la récente révision des comptes nationaux fait apparaître qu’en ce début d’année 2011, le niveau du PIB luxembourgeois se trouvait toujours en deçà du niveau qui était le sien juste avant le déclenchement de la crise précédente, contrairement à la majorité des autres économies industrialisées. La croissance potentielle annuelle pour la période 2010-2013 devrait se situer, selon les différentes méthodes d’estimation envisagées, dans une fourchette comprise entre 2 et 3 % alors que celle-ci s’est affichée quasi systématiquement à un minimum de 4 % entre 1980 et le déclenchement de la crise, ce taux de 4 % étant traditionnellement considéré comme le taux permettant d’assurer l’équilibre de nos systèmes sociaux.
L’activité économique au Luxembourg a évolué dans le passé récent nettement moins favorablement que ce qui était admis jusqu’à présent, remarquent encore les auteurs du rapport qui soulignent le fait que la croissance en fin d’année 2010 et au début de 2011 a été sensiblement plus faible que ce qui était inféré il y a peu, impliquant que l’effet de seuil ("carry over effect") pour la croissance économique en 2011 est beaucoup plus faible que ce qui avait été considéré à l’occasion des projections de la BCL de juin 2011. Dans ce contexte, la BCL annonce d’ailleurs qu’elle devra revoir nettement à la baisse les projections d’évolution du PIB pour les années 2011 et 2012.
L’année 2010 s’est caractérisée pour les Administrations publiques par une nouvelle détérioration du solde, cependant moins importante qu’initialement escomptée, observe la BCL. En 2011, le solde s’améliorerait quelque peu et accuserait un déficit de 0,3 % du PIB pour se détériorer à nouveau en 2012. Le solde passerait en effet de -0,3 % du PIB en 2011 à -0,8 % en 2012 selon les projections d’automne de la BCL. Cette dégradation s’explique principalement par un ralentissement de la croissance économique mais également par une croissance moins importante des recettes de l’Etat.
Selon la BCL, le ratio de dépenses courantes de l’Administration publique passerait de 37 à 37,7 % du PIB tandis que les recettes se stabiliseraient. La situation se détériorerait davantage en 2013, et le déficit de l’Administration publique passerait de 0,8 % à 1,4 % du PIB en raison du moindre dynamisme de certaines recettes. L’Administration centrale présenterait un déficit de 2,9 % du PIB en 2012 et de 3,4 % du PIB en 2013.
En ce qui concerne la dette publique, le ratio a nettement augmenté en 2010 pour se situer à 19,1 % du PIB, suite notamment à une nouvelle émission obligataire de l’Etat pour un montant total de 2 milliards d’euros incluant un emprunt pour un montant total de 200 millions d’euros en faveur du Fonds du rail et du Fonds des routes. La garantie financière de trois milliards d’euros accordée au groupe Dexia en 2008 a pris fin au 30 juin 2010 à la demande même du groupe et ne représente donc plus aucun risque pour le niveau de la dette publique. Selon la BCL, en 2011, le ratio d’endettement devrait légèrement diminuer – grâce notamment aux entrées de recettes plus importantes qu’initialement escomptées par le Gouvernement - pour se situer à 18,9 % du PIB avant de repartir à la hausse en 2012 et 2013. La dette publique atteindrait 19,5 % du PIB en 2012 et 19,7 % du PIB en 2013. Des chiffres qui dépassent les prévisions du ministre des Finances pour 2012, mais restent en-deçà de ceux avancés par la Commission dans ses prévisions d’automne quelques jours après la publication de cet avis.
Si la situation budgétaire semble plus favorable qu’initialement prévu dans une perspective de court terme, la situation fondamentale (de long terme) est loin de l’être, poursuit la BCL qui fait remarquer que le Luxembourg a vu sa situation se détériorer, même à court terme, par rapport à celle de la zone euro et par rapport aux trois pays limitrophes au cours des années récentes.
Les Administrations publiques ont accusé un déficit de l’ordre de 1,1 % en 2010 selon la dernière notification transmise par le Statec à Eurostat. Pour la BCL, ce résultat est "emblématique de la détérioration structurelle de la situation budgétaire du Luxembourg". Pour la banque centrale, "une impasse de 1,1 % constitue une incontestable contre-performance, même si ce solde est en définitive plus favorable que le solde correspondant escompté au plus fort de la crise". En 2011, ce solde devrait s’améliorer légèrement selon les estimations de la BCL (solde de -0,3 % du PIB), mais il restera déficitaire.
Les auteurs de l’avis observent que l’avantage que constituait le solde budgétaire que le Luxembourg a enregistré sur l’horizon 1995-2010 s’est fortement estompé par rapport à ses voisins. La BCL évoque même "une certaine banalisation du Luxembourg par rapport à l’Allemagne du point de vue des finances publiques" : un des avantages traditionnels du Luxembourg, qui a notamment permis au pays d’assurer une grande stabilité de la législation fiscale, est en train de disparaître.
Sur ce point, la BCL se montre particulièrement critique, jugeant que le solde des Administrations publiques est un indicateur "particulièrement peu exigeant" dans le cas du Luxembourg. Il résulte en effet de la somme des soldes de l’Administration centrale, des Administrations locales et de la sécurité sociale, et cette dernière présente actuellement des excédents que la BCL qualifie de "plantureux", tout en notant qu’ils ne sont pas appelés à durer et devraient même à l’avenir laisser la place à de substantiels déficits. Selon les estimations préliminaires de la BCL, l’excédent des Administrations de sécurité sociale luxembourgeoises a atteint 1,6 % du PIB en 2010 et atteindrait 1,8 % du PIB en 2011. Selon l’analyse de la BCL, ce surplus est de nature virtuelle, car il résulte quasi intégralement du décalage entre d’une part les cotisations alimentées par les frontaliers (environ 40 % du total des cotisations de pension) et d’autre part les dépenses de pension induites par des non-résidents (20 % des dépenses du régime général de pension). Un décalage appelé à s’atténuer au fil du temps, comme en témoigne d’ailleurs l’accroissement, observé au cours des années récentes, de la part des transferts de pensions à l’étranger, qui est passée de 14 % en 1995 et 16 % en 2000 à 21 % en 2010 selon l’IGSS. "Il en résultera immanquablement une fonte des excédents, qui ne sera que le prélude à l’apparition de significatifs déficits de la sécurité sociale", déduit la BCL qui estime que la réalité budgétaire intrinsèque du Luxembourg est mieux rendue par les soldes hors sécurité sociale, d’autant que ce sont ces derniers qui déterminent l’évolution de la dette publique.
Ainsi, si le Luxembourg présentait une situation budgétaire favorable au cours de la période 2000-2009 en se caractérisant, contrairement aux trois pays limitrophes, par des excédents, cette situation n’est "plus aussi évidente", déplore la BCL : Le solde global des Administrations publiques demeure certes significativement plus favorable qu’en Belgique, en Allemagne ou en France, mais le solde équivalent hors sécurité sociale n’est désormais pas beaucoup plus favorable que dans deux des pays voisins. Ce dernier solde (hors sécurité sociale) accuserait en effet un déficit de quelque 2,7 % du PIB, contre 4,1 % du PIB en Belgique et 4,4 % du PIB en Allemagne. "Ce résultat est emblématique de la perte graduelle, par le Luxembourg, de ce gage de stabilité que constituent des finances publiques saines", conclut la BCL, pour laquelle la soutenabilité à terme des finances publiques est très compromise en l’absence de nouvelles mesures structurelles.
Convaincue du fait qu’une gestion correcte des finances publiques doit s’étayer sur un horizon de temps plus long, qui seul permet d’appréhender la soutenabilité des finances publiques, la BCL a effectué des simulations d’ici 2040. Effectuées sur la base notamment des projections de l’Ageing Working Group (AWG), ces simulations "mettent en exergue le dérapage prévisible des finances publiques en l’absence de nouvelles mesures de consolidation budgétaire et de réforme des pensions", estime la BCL.
Selon le scénario graduel sur lequel a travaillé la BCL, les finances publiques luxembourgeoises risquent d’être confrontées à un triple choc au cours de la période 2013-2040, du moins en l’absence de mesures nouvelles. En premier lieu, elles devraient faire face à la déperdition de trois recettes qui se monterait au total à 4,8 % du PIB à l’horizon 2040 : 1,8 % du PIB pour les impôts sur les sociétés, 1 % pour la TVA électronique et 2 % pour le tourisme à la pompe. En second lieu, les dépenses liées au vieillissement augmenteraient de quelque 12 % du PIB sur l’horizon de simulation. En troisième lieu, les charges d’intérêt progresseraient à raison de 6 % du PIB d’ici 2040, ce qui représenterait environ la moitié de l’effet du "vieillissement".
Résultat, le Luxembourg dépasserait la valeur de référence d’un endettement de 60 % du PIB avant 2030.
Au vu de ces simulations, la BCL juge qu’un important effort de consolidation budgétaire s’impose. Les Administrations publiques luxembourgeoises doivent mettre en œuvre dès 2012 le processus de transition vers l’Objectif budgétaire à moyen terme d’un surplus supérieur à 1 % du PIB. Cet effort de consolidation, qui se monterait à 0,8 % du PIB – soit à 350 millions d’euros – pour la seule année 2012, doit s’accompagner d’une réforme en profondeur des systèmes de pension. Seule une telle stratégie permettrait d’éviter le déclenchement d’une funeste spirale de l’endettement. Elle s’impose d’urgence, juge la BCL, car une consolidation budgétaire est d’autant plus douloureuse socialement qu’elle est tardive.
La BCL cite la 12e actualisation du Programme de Stabilité du Luxembourg : "Le Gouvernement a approuvé un paquet de mesures de consolidation portant sur les exercices budgétaires 2011 et 2012. Une revue à mi-parcours de la situation des finances publiques est prévue pour l’année 2012. En cas de besoin, c'est-à-dire si le Gouvernement estime que la convergence vers l’objectif d’un solde budgétaire équilibré en 2014 progresse à un rythme insuffisant, des mesures supplémentaires de consolidation budgétaire seront spécifiées lors de cette revue à mi-parcours".
L’objectif d’équilibre budgétaire en 2014 mentionné par les auteurs de la 12e actualisation diffère de l’objectif recommandé par la BCL à un double titre, en ce qui concerne le montant (0 % du PIB contre un surplus de 1 % pour la BCL) et la définition (solde non-ajusté d’une part, solde structurel pour la BCL). La définition privilégiée par la BCL est conceptuellement proche des objectifs budgétaires à moyen terme (OMT) inhérents au volet préventif du Pacte de Stabilité. Les autorités européennes considèrent que compte tenu de l’impact escompté du vieillissement sur les dépenses publiques futures du Luxembourg, ce dernier devrait opter pour un OMT se situant entre 0,75 et 1,5 % du PIB, ce qui correspond à un taux central de pratiquement 1,15 % du PIB.
Cependant, dans la 12e actualisation du Programme de Stabilité du Luxembourg, les autorités indiquent que "dans le cas du Luxembourg la réalisation de l’objectif budgétaire à moyen terme de 0,5 % du PIB en termes structurels et la mise en réserve des excédents budgétaires ainsi dégagés devraient permettre de couvrir les dépenses supplémentaires occasionnées par le vieillissement démographique d’ici à l’horizon 2040".
Pour la BCL, un effort de consolidation visant simplement à garantir un surplus structurel des Administrations publiques de 0,5 % du PIB en 2015 livrerait des résultats assez mitigés, les finances publiques luxembourgeoises se caractérisant toujours par un emballement de l’endettement. Ainsi, le seuil des 60 % du PIB serait franchi dès 2032, le ratio dépassant toujours allégrement les 100 % du PIB tendanciel en 2040. La trajectoire d’endettement serait par ailleurs toujours explosive, comme l’atteste un déficit des Administrations publiques de quelque 18 % du PIB en 2040.
La BCL prescrit donc, comme dans son avis de 2010 sur le projet de budget 2011, une stratégie d’assainissement basée sur un surplus des Administrations publiques de 1,15 % du PIB en 2015 et une réforme d’envergure du régime de pension, consistant par exemple en une suspension pendant l’intégralité de l’horizon de projection (2013-2040) du mécanisme d’ajustement des pensions aux salaires réels.
Cette double stratégie permettrait, selon la BCL, d’éviter un ratio d’endettement supérieur ou égal au seuil des 60 % durant la quasi intégralité de la période de simulation. Par ailleurs, l’endettement du régime de pension ne dépasserait pas les 11 % du PIB en 2040. Le déficit des Administrations publiques serait toujours trop élevé en fin de période et les systèmes de pension feraient toujours face à une tendance à la dégradation, mais la situation des finances publiques ne revêtirait plus le même caractère explosif que dans le cadre des scénarios précédents.
Aux yeux de la BCL, un surplus d’au moins 1 % du PIB s’impose dans une optique de soutenabilité à terme des finances publiques. La forte volatilité inhérente aux finances publiques luxembourgeoises impose également un tel objectif, qui est pour la BCL seul à même de circonscrire le risque de violation de la valeur de référence de 3 % de déficit.
La BCL observe en effet que l’écart type mesuré au cours de la période 1991-2006 des soldes des administrations publiques a atteint quelque 2,2 % du PIB au Luxembourg, soit nettement plus que dans des pays de plus grande taille tels que l’Allemagne et la France, où l’écart type s’est limité à respectivement 1,3 et 1,4 % du PIB au cours de la même période. Pour les auteurs de cet avis, la forte volatilité des soldes luxembourgeois impose le choix d’un objectif à moyen terme particulièrement exigeant, afin de prémunir le Luxembourg contre une violation de la valeur de référence d’un déficit de 3 % du PIB prévue au Traité. L’OMT actuellement annoncé par les autorités, à savoir un surplus structurel de 0,5 % du PIB, paraît bien insuffisant aux yeux de la BCL qui estime que le Luxembourg devrait opter pour un surplus structurel significativement supérieur à 1% du PIB et ce afin de ramener la probabilité de violation de la valeur de référence à un niveau de probabilité qui correspond peu ou prou à l’équilibre budgétaire en Allemagne et en France (soit une probabilité de l’ordre de 2 %). La marge de sécurité inhérente à un tel surplus est indiquée dans un contexte économique particulièrement incertain, estime la BCL qui cite l’exemple de l’Irlande qui présentait en 2007 un ratio d’endettement limité à 25 % du PIB avant qu’il n’atteigne, quatre ans plus tard, plus de 100 % du PIB dans la foulée de la crise économique et financière. Pour la BCL, cette évolution met en exergue la forte vulnérabilité d’une petite économie ouverte et à forte spécialisation sectorielle, en particulier dans le présent contexte économique
Selon les comptes financiers, les actifs financiers nets des Administrations publiques luxembourgeoises atteignent plus de 49 % du PIB fin 2010. Pour la BCL, cette situation ne peut cependant que se détériorer sensiblement en l’absence de nouveaux efforts de consolidation et de réformes de la sécurité sociale. Par ailleurs, observent les auteurs de l’avis, la garantie de financement accordée récemment à Dexia BIL – à hauteur de 2,7 milliards d’euros – ne fait qu’augmenter l’exposition du Gouvernement luxembourgeois dans un environnement déjà très incertain. Celle-ci n’est pas incluse dans la dette publique en 2011 ni en 2012, étant donné qu’elle serait enregistrée seulement si elle devait être exécutée. Pourtant, en cas d’exécution, elle induirait une augmentation de la dette publique pouvant aller jusqu’à 6,4 % du PIB (données 2011).
La marge de manœuvre étant insignifiante sur le versant fiscal, le Luxembourg doit, selon la BCL, impérativement maîtriser les dépenses de ses administrations publiques.
L’analyse des dépenses en niveau menée par la BCL révèle que ces dernières sont bien plus élevées que dans les autres pays de la zone euro. Elles tendent par ailleurs à augmenter très rapidement en comparaison internationale. Les dépenses des Administrations publiques luxembourgeoises se sont en effet accrues de quelque 7,5 % par an en moyenne depuis 2000, soit le taux de loin le plus élevé parmi les pays considérés. A titre de comparaison, en Allemagne, les dépenses des Administrations publiques ont augmenté de 1,7 % de 2000 à 2010. Le PIB a certes davantage augmenté au Luxembourg que dans les pays limitrophes ou dans l’ensemble de la zone euro. Cependant, même à cette aune le message est "mitigé" aux yeux de la BCL. La hausse moyenne des dépenses nominales a atteint 7,5 % de 2000 à 2010, soit davantage que la hausse moyenne du PIB en valeur courante sur la même période (+7 %), la crise n’étant bien entendu pas étrangère à ce résultat.
Pour la BCL, l’assainissement budgétaire doit donc surtout porter sur le volet dépenses, d’autant que le niveau absolu de ces dernières est également très élevé en comparaison internationale. Une norme budgétaire intégrant l’aspect dépense est essentielle dans un tel contexte.
A l’occasion du Conseil européen et de la réunion des Chefs d’Etat ou de gouvernement de la zone euro du 26 octobre 2011, les Etats membres de la zone euro se sont engagés à mettre en œuvre au niveau national certaines mesures supplémentaires, qui vont au-delà du semestre européen, du Pacte pour l’euro plus et du paquet législatif concernant la réforme de la gouvernance économique.
Ces mesures supplémentaires visent notamment l’adoption, d’ici la fin 2012, de règles relatives à l'équilibre structurel des finances publiques, traduisant dans la législation nationale, de préférence au niveau constitutionnel ou à un niveau équivalent, les règles du Pacte de stabilité et de croissance. Il a également été décidé de renforcer les cadres budgétaires nationaux au-delà de ce que prévoit la directive sur les exigences applicables aux cadres budgétaires des Etats membres.
La BCL observe donc que, pour respecter ces engagements, une règle relative à l’équilibre structurel des finances publiques devra figurer dans la Constitution et/ou dans une loi spéciale et ce avant la fin de l’année couverte par le projet de budget sous revue. La BCL se réjouit de cet engagement contracté au niveau européen qui ne peut selon elle que "mieux asseoir la crédibilité de la politique budgétaire luxembourgeoise, tout en ancrant pleinement cette dernière dans le processus de réforme de la gouvernance au niveau européen".
La BCL appelle donc le Luxembourg à lancer sans plus attendre ce processus de réforme et à entamer un débat portant sur la nécessaire réforme du cadre budgétaire national.
Selon les auteurs de l’avis, ce cadre devrait au moins renfermer les éléments suivants :