Alors que les négociations en cours à Athènes, tant avec la troïka qu’avec les représentants des créanciers privés du pays, tenaient en haleine l’Europe entière ces derniers jours, Jean-Claude Juncker avait annoncé dans la soirée le 8 février la tenue le lendemain d’une réunion de l’Eurogroupe. Au terme d’une nuit de discussions, un accord entre les autorités grecques et les représentants de la troïka BCE-UE-FMI était annoncé le 9 février au petit matin, tandis que le ministre grec des Finances annonçait peu de temps avant la réunion des ministres des Finances un accord sur la participation des créanciers privés.
La réunion de l’Eurogroupe présidée par Jean-Claude Juncker a donc surtout été l’occasion d’informer les ministres des Finances sur les résultats des pourparlers qui ont eu lieu ces derniers jours. "Les discussions ont eu lieu sur la base de l’accord trouvé au petit matin entre troïka et gouvernement ainsi que sur la base du projet d’accord avec les créanciers privés", a ainsi expliqué Olli Rehn, membre de la Commission européenne en charge des Affaires économiques et monétaires.
L’accord avec le secteur privé, dont le succès conditionne celui de l’ensemble du plan d’aide à la Grèce, dont il est une partie intégrante, est "pratiquement finalisé", a rapporté Olli Rehn. L'objectif de cet accord qui porte sur un effacement d’une partie de la dette grecque est de réduire d’ici 2020 le niveau de la dette publique de la Grèce à un niveau jugé soutenable, soit 120 % du PIB.
L’accord trouvé avec la troïka sur un ensemble de mesures politiques est basé sur les décisions des chefs d’État et de gouvernement d’octobre 2011, l’objectif étant de restaurer la stabilité et la compétitivité de la Grèce, en sachant que la capacité de la Grèce à rembourser sa dette est considérée comme une priorité. Le programme est donc basé sur des mesures de consolidation budgétaire, sur l’exécution d’une stratégie de privatisations et sur un agenda de réformes structurelles portant notamment sur le marché du travail.
Il a semblé essentiel d’insister sur le renforcement de la capacité des autorités grecques à assurer la pleine exécution de ce programme, et les ministres des Finances se sont donc prononcés pour un renforcement de l’assistance technique apportée à la Grèce, ainsi que de la capacité de suivi de l’exécution du programme. C’est un des sujets qui a fait l’objet de discussions intenses aujourd’hui, a confié Olli Rehn à la presse. La Commission est chargée de mettre sur la table des propositions dans ce sens. Olli Rehn, interrogé sur l’idée de prévoir un compte bloqué pour une partie de l’aide à la Grèce afin de s’assurer que l’argent soit bien dédié au service de la dette, a reconnu que cette solution était "sérieusement envisagée" par ses services.
Mais, malgré les efforts considérables déjà réalisés, malgré les importants progrès faits ces derniers jours, Jean-Claude Juncker a expliqué à l’issue de la réunion que les ministres n’avaient pas encore "tous les éléments nécessaires" pour pouvoir prendre une décision sur le deuxième programme d’aide à la Grèce.
Le parlement grec doit en effet encore approuver le paquet de mesures sur lequel se sont entendus troïka et gouvernement, ce qui pourrait être fait dimanche.
Par ailleurs, le gouvernement grec se doit d’identifier "des économies supplémentaires à hauteur de 325 millions d'euros" dans le budget 2012.
Enfin, les ministres des Finances attendent de la part des partis de la coalition gouvernementale une assurance forte de leur engagement à mettre en œuvre ces mesures, y compris après les élections.
Jean-Claude Juncker a annoncé la tenue le 15 février prochain d’une nouvelle réunion de l’Eurogroupe - à condition que les autorités grecques remplissent ces trois conditions - qui devrait permettre de prendre des décisions. "L’avenir de la Grèce est entre les mains du parlement et du gouvernement", a insisté Olli Rehn, soulignant que les décisions que les responsables politiques grecs vont prendre dans les prochains jours vont être déterminantes pour les perspectives du pays.
"La soutenabilité de l'endettement grec sera atteinte lorsque nous nous serons rapprochés le plus possible du seuil de 120 % du PIB. Et nous continuons à dire que nous essayons de limiter le nouveau programme à la Grèce à 130 milliards d'euros. Mais ces deux aspects devront être encore une fois réexaminés dans le cadre de la solution globale mercredi prochain", a précisé Jean-Claude Juncker.
La troïka est en train de finaliser une analyse de la stabilité de la dette grecque qui sera un élément à prendre en compte dans les décisions finales.
"Nous avons réuni aujourd’hui tous les éléments qui nous permettront de prendre une décision globale la semaine prochaine", a expliqué Jean-Claude Juncker qui a souligné la complexité d’un dossier dans lequel il convient d’avoir "une capacité d’écoute pour entendre ce que les citoyens et le gouvernement grecs ont à dire". "Nous sommes encore dans les temps", a assuré Olli Rehn.
Le ministre grec des Finances, Evangelos Venizelos, a reconnu à la fin de la réunion que "de nombreux pays ont trouvé des lacunes" dans le plan de rigueur qui leur a été présenté, et il en a tenu responsable le chef des conservateurs grecs Antonis Samaras, qui "n'a pas encore signé" l'intégralité des mesures prévues à l'origine. A présent, "il faut que le parti (conservateur) décide s'il veut que la Grèce reste dans la zone euro, il faut le dire clairement. S'ils ne le veulent pas, il faut le dire aussi", a-t-il lancé. Le montant de 325 millions d'euros d'économies correspond en effet à des coupes dans les dépenses refusées tout particulièrement par les conservateurs grecs.