Le 2 octobre 2012, le Parlement européen a mis au point sa stratégie dans les négociations qu'il mènera avec le Conseil, la Commission, la BCE et l'Eurogroupe, au sujet du futur de l'Union économique et monétaire. La discussion commence le 4 octobre 2012 et prend pour base la feuille de route intitulée "Vers une Union économique et monétaire" livrée en juin 2012 par le président du Conseil Herman Van Rompuy, et réalisée en collaboration avec les présidents de la BCE, de l'Eurogroupe et de la Commission.
Alors que Herman Van Rompuy a publié de nouveau le 20 septembre 2012 un doccument de travail intitulé "Achever l'Union économique et monétaire" qui fait le point sur l'avancement des projets et les questions en suspens, l'adoption formelle de la feuille de la route doit intervenir lors du Conseil européen de décembre 2012.
Il faudra d'ici là compter avec le Parlement européen, qui avait été échaudé de ne pas être associé à la rédaction de la feuille de route, pour défendre "la démocratie, la responsabilité et la légitimité". En effet, le président du PE, Martin Schulz, les trois "sherpas" qui l'entoureront lors des négociations, à savoir Elmar Brok (PPE), Roberto Gualtieri (S&D) et Guy Verhofstadt (ADLE), et les représentants des différents groupes du Parlement ont donné mandat à lancer un appel à un renouvellement de la démocratie dans le cadre du développement d'une "vraie Union économique et monétaire".
Pour les députés, la démocratie et la légitimité forment même la "condition préalable" au succès de l'UEM. Et les institutions devant lesquelles les responsables peuvent rendre des comptes, à savoir le Parlement européen et les parlements nationaux, existent déjà, ce qui relativise l'urgence de rédiger une nouvelle constitution.
Le Parlement européen est d'avis qu'il pourrait obtenir des pouvoirs de contrôle plus étendus que ceux qu'il détient actuellement dans les domaines économique et monétaire. Il pourrait ainsi être chargé de "l'examen approfondi" de tous les systèmes et mécanismes liés à la nouvelle UEM tels le mécanisme européen de stabilité, les troïkas et le superviseur financier, lit-on dans le communiqué de presse publié à cette occasion.
"Toutes les décisions concernant l'euro ont besoin d'une légitimité parlementaire. Les tendances récentes visant à passer outre le Parlement sont très préoccupantes. Ceux qui perçoivent les procédures parlementaires comme un exercice fastidieux faisant perdre du temps, sont sur une voie dangereuse. Les politiques ont besoin de rallier la confiance des citoyens encore davantage que celle des marchés. Nous pouvons créer cette confiance grâce à un contrôle parlementaire et au débat. Le Parlement européen ne va pas rester les bras croisés si des décisions sont prises de plus en plus souvent dans des domaines excluant le Parlement", a déclaré Martin Schulz, à l'issue des discussions entre députés.
A côté de l'exigence d'une légitimité démocratique renforcée, le mandat de négociation met aussi en avant la priorité à donner à la croissance et à l'investissement. Pour ce faire, le Parlement considère qu'il faudrait renforcer le budget de l'UE afin d'être en mesure "de mieux cibler la croissance, la cohésion et de contrer les tendances cycliques".
Le Parlement estime qu'il pourrait être bien plus impliqué dans l'examen annuel de la croissance et de la politique économique ainsi dans l'analyse des lignes directrices pour l'emploi, dans le cadre du semestre européen. Cela épouserait ses désirs d'un renforcement de la transparence et de la représentativité nécessaires aussi bien pour le budget national que pour la coordination des politiques économiques.
Le mandat souligne également la nécessité d'une "sphère politique européenne", en imaginant en premier lieu la tenue d'élections européennes au cours desquelles les partis politiques européens présenteraient leurs candidats à la présidence de la Commission.
Enfin, le mandat souligne les avantages d'une coopération entre le Parlement européen et les parlements nationaux afin de s'assurer que l'intégration économique s'accompagne d'une responsabilité à tous les niveaux. De même, le Parlement européen défend l'idée que les parlements nationaux devraient être impliqués plus souvent dans le champ de l'UEM afin de leur permettre de demander des comptes à leurs gouvernements sur ces questions.
Même si le changement constitutionnel leur paraît inévitable, les eurodéputés considèrent que de nombreuses choses peuvent être déjà réalisées dans le cadre des traités actuellement en vigueur. Ils suggèrent également un recours plus fréquent à la coopération renforcée dans le domaine budgétaire.