Le 15 janvier 2013, les eurodéputés participaient à un débat tenu en urgence avec la responsable de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, suite à l'engagement militaire de la France au Mali. Décidée subitement en réaction à une offensive des rebelles occupant la partie septentrionale du Mali, la contre-offensive française a reçu l'assentiment des différentes sensibilités politiques représentées au Parlement européen.
Le 10 janvier 2013, une déclaration du Conseil de sécurité avait autorisé une intervention immédiate au Mali pour stabiliser la situation. La France s'était engagée dès le lendemain sur le terrain, craignant de voir la capitale malienne prise par les rebelles. Les quelques réserves formulées par les eurodéputés ont concerné, d'une part, l'absence de structures européennes d'intervention dans les crises, d'autre part, l'incertitude pesant sur les conséquences de cette entrée en guerre.
"Nous sommes en déficit de construction européenne, c'est pourquoi la France joue un rôle qui dépasse ses capacités", a fait remarquer l'eurodéputé écologiste, Daniel Cohn-Bendit, déplorant que l'UE n'ait pas de force d'intervention civile ou militaire. José Ignacio Salafranca Sanchez-Neyra (PPE) s'est pour sa part demandé pourquoi l'UE avait tant tardé à réagir à une menace qui pouvait être anticipée. "Depuis un an, nos amis maliens ont appelé au secours. Cette guerre est un effet collatéral de la guerre de Libye où des bandes criminelles de type Al Qaïda on traversé la frontière. Je salue le courage du gouvernement français", a pour sa part déclaré l'eurodéputé socialiste, Véronique De Keyser.
"Une grande partie de la planification a été faite. Ne sous-estimez pas le travail accompli pour garantir un avenir politique aux peuples de cette région. Certains voudraient des troupes, mais il y a des États membres qui réagissent rapidement. Tout cela a été fait, en liaison avec les autorités européennes", leur a rétorqué Catherine Ashton. Elle a aussi mis de côté le débat sur une force militaire européenne : "Nous avons des Etats membres qui réagissent rapidement, efficacement et maintenant nous devons montrer notre solidarité."
Le Parlement européen a justement enjoint les autres Etats membres à témoigner leur solidarité envers la France, au nom de la crédibilité de l'action de l'UE. L'Italie, le Royaume-Uni, l'Allemagne, le Danemark et la Belgique avaient déjà répondu favorablement aux demandes d'aide de la France.
L'intervention française devrait également précipiter l'exécution de programmes que l'UE ficelait depuis plusieurs mois. Des eurodéputés ont regretté que la mission de formation des militaires maliens, dite EUTM-Mali, n'ait pu être déjà déployée sur place. Huit Etats membres ont depuis lors proposé 400 à 500 militaires pour cette mission. Catherine Ashton a garanti, face aux eurodéputés, qu'il serait paré au plus pressé : "Nous voulons la déployer la mission plus tôt que prévue. Bien que les circonstances aient changé, le besoin du Mali d'avoir une armée efficace et professionnelle, sous le contrôle civil, est l'élément le plus urgent, et le plus essentiel à long terme, pour sa viabilité et son intégrité territoriale."
Dans son discours, Catherine Ashton a souligné la nécessité pour l'UE d'agir, au vu des "violations horribles des droits humains, la profanation de sites sacrés et culturels, le piétinement des libertés religieuses et politiques et la menace posée aux pays voisins", mais également l'UE. "Nous sommes directement touchés par la situation là-bas. Les groupes terroristes basés dans le Nord du Mali usent de ce territoire qu'ils contrôlent pour toute sorte de trafic, la contrebande de drogue et d'armes. Ils ont pris beaucoup d'otages, beaucoup d'entre eux venant des Etats membres de l'UE. Nous ne pouvons rester indifférents. Nous devons agir. Manquer de le faire serait une grande erreur politique, stratégique et humanitaire."
"La communauté internationale est unanime pour venir en aide au Mali", a-t-elle aussi souligné en évoquant les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies des 10 et 14 janvier 2013. Et "l'UE doit être à la pointe de l'effort international d'appui au Mali."
Elle a indiqué vouloir nommer un représentant spécial de l'UE pour le Sahel tandis qu'un Conseil Affaires étrangères extraordinaire sur le Mali est convoqué le 17 janvier 2013, conformément à la décision que la plateforme de crise sur le Mali avait prise la veille. Ce Conseil, qui aura rencontré au préalable le ministre des Affaires étrangères malien à Bruxelles, adoptera un plan d'action. L'UE pourrait ainsi soutenir les forces terrestres africaines déployées sous la houlette des Nations unies, à travers, d'un côté, un soutien financier à travers la Facilité pour la paix en Afrique, et, de l'autre, un soutien logistique pour le déploiement de la Mission internationale de soutien au Mali (AFISMA).
Le Conseil devrait également valider l'envoi de la mission EUTM-Mali, ainsi décrite dans la note d'information sur le Conseil Affaires étrangères du 17 janvier 2013 : "L'EUTM Mali vise à contribuer à restaurer la capacité militaire des forces armées maliennes, le but tant de leur permettre, sous le contrôle des autorités civiles, de rétablir l'intégrité territoriale du pays. La mission fournira une formation militaire de base, et elle formera et conseillera les forces armées maliennes en ce qui concerne le commandement et le contrôle, la logistique, les ressources humaines ainsi que, dans le domaine du droit humanitaire international, la protection des civils et des droits de l'homme. La mission ne participera pas à des opérations de combat. Son état-major sera installé à Bamako et la formation se déroulera dans un lieu affecté à cet effet dans le sud du Mali. La durée initiale du mandat de la mission est fixée à quinze mois. Il est prévu de déployer quelque 200 instructeurs, ainsi que du personnel d'appui et une force de protection, faisant au total environ 450 personnes. Le montant des coûts communs de l'opération est estimé à 12,3 millions d'euros pour la durée du mandat."
Outre les 58 millions d'euros mobilisés en 2012, l'effort humanitaire est pour sa part rallongé de 20 millions d'euros "immédiatement disponibles". Catherine Ashton a en effet souligné qu'"une intervention militaire n'est pas suffisante" et qu'il ne peut aller sans un développement économique et social, pour pallier à la famine, l'analphabétisme et le manque de représentation politique de certaines communautés ethniques.
Le Luxembourg n'a pour l'instant pas fait part de son intention d'apporter une aide directe. Le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, a très tôt apporté son soutien à la France. Ainsi, le 12 janvier, au lendemain de l'intervention française, il expliquait au micro de RTL Radio Lëtzebuerg, que "nous ne pouvons pas admettre, en tant que communauté internationale, que les [exactions des rebelles] s'étendent à tout le Mali. Et dans toute la région. "
Jean Asselborn avait souligné la légitimité de cette intervention militaire. Elle repose d'abord sur l'article 51 de la Charte des Nations-Unies dans lequel "est clairement affirmé que quand un pays est victime d'une agression militaire comme c'est le cas ici, les autres pays de l'ONU peuvent lui porter assistance, s'il en fait la demande, ce qui est aussi le cas ici". Ensuite, la résolution du Conseil de sécurité 2085, du 12 octobre 2012, dit que tout doit être fait pour soutenir les Forces maliennes, pour qu'elles soient en mesure de stopper les organisations extrémistes. "La France se base là-dessus et le Luxembourg l'a complètement soutenue au Conseil de sécurité", a fait savoir Jean Asselborn. D'ailleurs, dans son premier discours en tant que représentant d'un pays membre du Conseil de Sécurité, Jean Asselborn a, le 15 janvier 2013, désigné le Sahel en exemple de l'extension de la menace terroriste, laquelle forme "une des menaces les plus graves à la paix et à la sécurité internationales", contre laquelle il faut combattre.