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Emploi et politique sociale - Transports
Limitation des temps de vol des pilotes: les détracteurs du projet de la Commission européenne se félicitent de son rejet par la commission transports du Parlement européen
01-10-2013


temps-de-volSuite au rejet de la proposition de la Commission européenne en matière de limitation des temps de vol des pilotes, le 30 septembre 2013, par la commission Transports (TRAN) du Parlement européen, les réactions des différents acteurs se sont multipliées alors que l’avenir du projet semble désormais incertain.

Pour mémoire, en vertu de la procédure de comitologie appliquée pour ce projet législatif, le Parlement européen ne dispose pas du droit d’amender le texte, mais uniquement de l’accepter tel quel ou de le rejeter en bloc. Le groupe des Verts européens et celui de la Gauche unitaire européenne GUE/NGL, ainsi que l’eurodéputé luxembourgeois Georges Bach (PPE) en son nom propre, avaient dès lors déposé une motion de rejet.

Selon ces derniers, la proposition de la Commission ne tenait pas compte des recommandations scientifiques disponibles en la matière et impliquait des nombres d'heures de vol, de prestation et de garde trop importantes et par conséquent des risques inacceptables liés aux conditions de travail et de repos des pilotes. Restera désormais à voir si les eurodéputés qui seront appelés à se prononcer en séance plénière dans le courant du mois d’octobre suivront l’exemple des membres de la commission TRAN, ce qui ne semble pas assuré tant le sujet suscite des réactions tranchées.

Si dans un communiqué, le commissaire européen aux Transports, Siim Kallas, avait immédiatement regretté ce vote qui selon lui "met en danger des mesures-clés pour améliorer la sécurité aérienne", du côté des détracteurs du projet, l’on se félicite en tout cas d’une première victoire.

L’Association Luxembourgeoise des Pilotes de Ligne (ALPL) et le syndicat LCGB (dont l’ALPL est membre) ont salué le vote dans un communiqué daté du 1er octobre, s’alignant en grande partie sur le syndicat européen des pilotes ECA (European Cockpit Association) qui avait également applaudi cette décision. "L'harmonisation des limites de temps de vol dans tous les États membres est souhaitable. Cependant, s’agissant de sécurité aérienne, l'Europe doit se soumettre aux normes les plus élevées, basées sur les meilleures pratiques et connaissances scientifiques", a jugé  Darrell Myers, président du syndicat des pilotes ALPL. "Soumettre l'équipage à des périodes de service de veille ou de vol de 22 heures n'est tout simplement pas sûr. Les citoyens luxembourgeois attendent une harmonisation au niveau le plus élevé", a poursuivi Aloyse Kapweiler, le secrétaire général du LCGB.

Le syndicat luxembourgeois OGBL ne dit pas autre chose. Dans un communiqué, l’OGBL se félicite ainsi d'un vote "clairement en faveur de la sécurité du personnel navigant et des passagers" et rappelle avoir "soutenu activement les efforts menés par l’ETF (European Transport Workers’ Federation) pour contrecarrer les plans de la Commission visant une dégradation des conditions de travail du personnel navigant".

Pour Francois Ballestero, secrétaire politique de l'ETF, "la Commission a désormais la possibilité de s’appuyer sur les preuves scientifiques existantes. Les ignorer délibérément en essayant de faire passer son projet au Parlement européen n'a pas fonctionné. Nous espérons que la Commission a reçu le message et agira en conséquence".

Du côté des Verts/ALE  l’eurodéputé luxembourgeois Claude Turmes s’est réjoui de l’appui d’une "écrasante majorité des membres de la commission TRAN du PE à la motion déposée par les Verts" et donc du rejet "des propositions irresponsables de la Commission" qui sont "dangereuses et antisociales pour les pilotes", selon l'eurodéputé. Et celui-ci d'insister sur le fait qu’à l’heure actuelle, un cinquième des incidents au sol ou en vol seraient déjà attribuables à la somnolence des pilotes. "Selon des sondages, près de 36 % des pilotes auraient déjà connu des situations d’endormissement en vol", a-t-il poursuivi.

L’eurodéputé luxembourgeois Georges Bach, également signataire de la motion et en opposition avec son groupe (PPE) sur ce sujet, a aussi manifesté sa satisfaction. "Pour moi c'est important de continuer le débat sur les points qui posent problème et de soumettre la question en final à un vote démocratique en plénière, de manière à ce que chaque député européen soit obligé de se prononcer ouvertement sur cette question et de prendre ses responsabilités", a-t-il estimé

Du côté du PPE justement, l'issue du vote en commission est, au contraire, considérée "regrettable" et due à "de fausses rumeurs répandues pour donner l'illusion que voler deviendrait moins sûr à cause des nouvelles règles européennes", a déploré le député européen belge Mathieu Grosch qui juge que "dans presque tous les cas", les niveaux nationaux de sécurité sont maintenus voir améliorés, selon des propos rapporté par l’Agence Europe.

Une position également défendue par l’industrie aérienne et les représentants des compagnies aériennes.

Pour sa part, le député européen socialiste Saïd El Khadraoui (Belgique), juge que les propositions de la Commission constituent un "compromis acceptable" mais que de nouvelles garanties aux exigences des syndicats des pilotes et membres d'équipage seraient bienvenues.

L’avenir de la proposition se trouve désormais dans les mains des eurodéputés qui devraient se prononcer lors de la séance du 21 octobre 2013. L’issue du vote reste en tout cas bien incertaine, comme le soulignait Georges Bach, selon lequel il se pourrait que "la majorité des députés rejette encore la motion, nombreux étant ceux qui ne veulent pas que le résultat de trois ans de négociations difficiles soit anéanti et aussi parce que la proposition actuelle représente une amélioration de la situation existante dans un certain nombre de pays".

Nombreux sont donc les eurodéputés qui espèrent que la Commission fera un pas pour modifier les points litigieux et plafonner les temps de vol de nuit à 10 heures (contre 11 heures) et à 18 heures la combinaison de temps de veille et vol (actuellement à 22 heures) comme le demandent les syndicats. Si la séance plénière rejette le texte, les législations nationales resteraient alors en vigueur jusqu’à l’adoption d’une nouvelle proposition.