Le 30 septembre 2013, la question de la limitation du temps de vol des pilotes a passé une nouvelle étape: la commission Transports (TRAN) du Parlement européen a adopté avec une majorité de presque deux tiers et à la grande surprise des observateurs avec 21 voix pour et 13 voix contre une motion qui rejette la proposition de la Commission européenne qui vise à introduire de nouvelles limites pour les temps de vol des pilotes.
Le dossier occupe depuis plusieurs années déjà la Commission européenne, son agence spécialisée sur la sécurité dans l'aviation (EASA), le Parlement européen et les acteurs industriels et syndicaux du secteur de l'aviation.
Le texte réglementaire qui est actuellement tablé a été élaboré pendant presque 3 ans par des experts de l'EASA, de concert avec les acteurs professionnels concernés. La majorité des points problématiques ont trouvé une solution entretemps, à l'exception de certaines questions, dont celle d'une harmonisation européenne de la "Flight Time Limitation" pour les pilotes et les membres d´équipage, qui pour certains pays serait plus avantageuse que la situation actuelle et pour d´autres – dont le Luxembourg – moins avantageuse. La durée du "standby" des pilotes et le "Fatigue Risk Management System" continuent également à poser problème.
La proposition de l'EASA passe au Parlement européen par une procédure de comitologie, ce qui signifie que le Parlement ne peut pas amender le texte, mais uniquement l’accepter ou le rejeter en bloc au moyen d'une résolution.
Une telle résolution, signée par les députés européens Eva Lichtenberger, Michael Cramer, Keith Taylor, Jean Lambert, Elisabeth Schroedter au nom du groupe des Verts européens, Jaromir Kohlicek, Sabine Wils, Alfreds Rubiks au nom du groupe de la Gauche unitaire européenne GUE/NGL, ainsi que par le député européen luxembourgeois chrétien-social Georges Bach, ancien dirigeant syndical dans le secteur des transports, a été adoptée le 30 septembre 2013 et sera en conséquence soumise au vote lors de la plénière du mois d'octobre.
Georges Bach a soutenu cette motion avec sa signature, a voté en sa faveur et diffusé son explication de vote. "Pour moi c'est important de continuer le débat sur les points qui posent problème et de soumettre la question en final à un vote démocratique en plénière, de manière à ce que chaque député européen soit obligé de se prononcer ouvertement sur cette question et de prendre ses responsabilités. Sans l'opposition de quelques députés, le texte actuel aurait passé le Parlement de manière quasiment inaperçue.
Pourtant, les questions en jeu concernent des sujets cruciaux comme la sécurité dans l'aviation. Les liens entre conditions de travail et sécurité doivent être la priorité absolue et je soutiens les syndicats depuis le début dans leurs démarches. Nous ne pouvons pas prendre des risques de sécurité et mettre la vie des passagers aériens en jeu. C'est pourquoi nous devons être sûrs et certains que les décisions qui vont être prises sont les bonnes."
Pour l’eurodéputé, il est toutefois bien possible qu'en plénière, la majorité des députés rejette encore la motion, nombreux étant ceux qui ne veulent pas que le résultat de trois ans de négociations difficiles soit anéanti et aussi parce que la proposition actuelle représente une amélioration de la situation existante dans un certain nombre de pays. "Une adoption par la plénière la semaine prochaine n'est donc à ce stade pas évidente", pense le député, qui sur cette question a fait bande à part par rapport à son groupe, le PPE.
Mais il reste convaincu que "les discussions vont certainement encore s'intensifier au cours des jours à venir" et que le vote dans la commission TRAN "va faire pression sur la Commission européenne afin qu'elle modifie les quelques points controversés". Lui-même recommande que les jours avant le vote en plénière soient mis à profit pour trouver "un bon compromis entre tous les acteurs, afin de ne pas risquer d'anéantir le travail réalisé au cours de plusieurs années dans ce dossier controversé". Mais dans ce cas, "la Commission doit agir maintenant!"
Pour le commissaire européen aux Transports, Siim Kallas, le vote de la commission TRAN du 30 septembre est un nouveau revers. Dans un communiqué, il juge que ce vote "met en danger des mesures-clés pour améliorer la sécurité aérienne. Cette proposition fait un pas en avant pour faire coïncider les meilleures pratiques de tous les États membres et les dernières preuves scientifiques". Il demande donc qu’ait lieu un débat transparent avec les eurodéputés basé sur les faits et pas sur des « histoires inquiétantes trompeuses et de fausses revendications » d'ici au vote en séance plénière en octobre.
Le syndicat européen des pilotes ECA (European Cockpit Association) a lui aussi réagi dans la soirée du 30 septembre avec un communiqué dans lequel il salue le vote de la commission TRAN.