Principaux portails publics  |     | 

Emploi et politique sociale
A une semaine de l’euro-manifestation du 4 avril, l’OGBL appelle une nouvelle fois à un changement de cap fondamental des politiques de l’UE
27-03-2014


jc-redingA un peu plus d’une semaine de l’euro-manifestation qui se déroulera à Bruxelles le 4 avril 2014 à l’initiative de la Confédération européenne des syndicats (CES), l’OGBL a présenté son constat et ses revendications relatifs à une politique européenne que le syndicat critique de manière sévère.

Lors d’une conférence de presse qui a rassemblé, le 27 mars 2014, des délégués de l’ensemble des secteurs professionnels de l’OGBL, son président, Jean-Claude Reding, a dressé un bilan plutôt sombre des évolutions de ces dernières années, estimant que la politique d’austérité adoptée dans l’UE a mené à des "conséquences sociales négatives dans tous les Etats membres". Et de se dire "choqué" que le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, loue au contraire cette politique qu’il appelle à poursuivre.

Contre l’austérité et pour une politique massive d’investissements durables

Le président du syndicat a donc appelé une nouvelle fois à "un changement fondamental des politiques en Europe", message qu’il portera à Bruxelles fort d’une délégation de "plus de 500 membres de l’OGBL" le 4 avril.

Si l’on peut "se réjouir" de la libre-circulation, de l’abolition des contrôles aux frontières ou du projet de paix "relatif" que constitue l’UE, selon le syndicat, "ce n’est pas suffisant". "Le traité de Lisbonne parle de progrès social", or on constate surtout "une harmonisation par le bas", a notamment déploré Jean-Claude Reding qui fustige un "dumping social dans l’UE". "Quand les citoyens qui vivent dans l’UE ont peur de leur voisin, cela crée du ressentiment et affaiblit la cohésion sociale", a-t-il regretté.

La politique actuelle "mène dans une impasse", juge-t-il. Ainsi l’austérité a-t-elle surtout conduit selon le syndicat "à un accroissement des inégalités et des déséquilibres géographiques, une augmentation du chômage – en particulier chez les jeunes -, une consommation en baisse, une cohésion sociale menacée, une instabilité politique croissante, l’émergence de groupes anti-européens et l’effondrement de marchés locaux" au profit d’une concurrence accentuée entre les Etats membres. Or "nous avons des alternatives dont nous avons fait part aux décideurs politiques", a-t-il souligné.

Jean-Claude Reding se réfère notamment au Plan de la CES pour l’investissement, une croissance durable et des emplois de qualité, qui appelle à une politique d’investissements durables et d’emplois décents. "Il faut que l’argent de la spéculation soit utilisé dans l’économie réelle", a appuyé Jean-Claude Reding.

Pour une politique industrielle européenne ambitieuse

Jugeant la politique industrielle de l’UE "défaillante", l’OGBL a également plaidé en faveur "d’une politique industrielle ambitieuse au niveau européen, notamment en combinaison avec les politiques environnementale et énergétique", comme il l’avait fait lors de son entrevue avec le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, le 21 mars. En plus de promouvoir les énergies renouvelables, il y a lieu selon l’OGBL "de promouvoir, dans le secteur industriel également, l’efficacité énergétique". Le président de l’OGBL a estimé à ce sujet qu’en vue de remplir les objectifs climatiques de l’UE, une politique d’investissement massive dans ce domaine serait nécessaire.

"L’UE est née d’un projet industriel, la Communauté européenne du Charbon et de l’Acier (CECA) or si on demande aujourd’hui à la Commission quel est le projet industriel européen, l’unique réponse est le respect de la concurrence. Ce n’est pas un projet", a encore estimé Jean-Claude Reding, visant la communication de la Commission publiée en janvier 2014.

Il s’agirait au contraire, comme le Parlement européen aurait de son côté cherché à le faire, de définir les domaines de compétence de l’Union, notamment l’énergie dans lequel l’UE applique de "hauts standards". Des domaines dans lesquels il ne faudrait pas craindre d’appliquer un certain protectionnisme selon l’OGBL au risque de les mettre en danger. Le TTIP, par exemple, en mettant ces services en concurrence, créerait "un dumping écologique sur le dos des gens" et "les producteurs européens pourraient mettre la clé sous la porte", a poursuivi Jean-Claude Reding.

La directive "détachement" rejetée

L’accord récemment trouvé en trilogue sur la directive sur le détachement des travailleurs est totalement rejetée par le syndicat, le secteur professionnel du bâtiment, l’un des plus concernés, estimant qu’elle n’est pas adaptée pour lutter contre le dumping social et "l’esclavage moderne".

Le syndicat reproche notamment l’absence de véritable possibilité de contrôle pour les Etats membres ainsi que de responsabilité de l’employeur qui recourt à des sous-traitants. Le syndicat a mis en avant la nécessité d’inclure dans la directive un dispositif de responsabilité solidaire en cascade et sans conditions, en vertu duquel le maître d’ouvrage peut être tenu responsable de l’ensemble des sous-traitants et des entreprises internalisées, et qui n’est prévu dans la directive que sur base volontaire. L’OGBL réclame en outre que le critère du prix le plus bas soit rejeté au profit de critères écologiques et sociaux notamment, sur le modèle de la directive "concessions" qui est pour sa part saluée comme un "progrès".

Appel à défendre des services publics et d’intérêt général universels

Au sujet des services publics (transports, éducation, santé, etc), "un élément central du modèle social européen", l’OGBL a plaidé pour "un accès universel à des services de qualité". La responsable de ce secteur pour le syndicat, Nora Back, a notamment souligné l’exemple de la santé, jugeant que l’on ne pouvait pas soumettre le secteur à la libéralisation dans un système "qui ferait de l’argent sur le dos des malades". Au contraire, ce secteur "doit être protégé par les responsables politiques et bénéficier des moyens croissants dont il a besoin" pour être efficace.

De même, le secteur de la sécurité sociale, "un pilier de notre société", "n’a pas le droit d’être attaqué par des tentatives de privatisation", affirme-t-elle. Des sociétés privées "n’assumeront pas un service universel, il n’est pas possible qu’on aille vers une société à deux vitesses où certains peuvent payer et d’autres non. On a vu le résultat dans d’autres pays, ce n’est jamais dans l’intérêt des consommateurs ou des travailleurs et ça n’est finalement jamais moins cher, au contraire", souligne Nora Back.

Tous les candidats de tous les partis aux élections européennes "contre l’austérité"

Enfin, le syndicat a présenté les réponses des partis politiques luxembourgeois à son questionnaire en vue des élections européennes que l’OGBL avait transmis à tous les partis et les candidats déclarés suite à son dernier comité central.

Le formulaire soumettait douze questions aux candidats aux européennes : sont-ils prêts à réformer le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) dans le sens d’une prise en considération des objectifs environnementaux et sociaux ; à exiger le respect par tout Etat membre de la Charte des droits fondamentaux ; à soutenir des services publics et d’intérêt général de qualité et accessibles à tous et à s’opposer à la politique de libéralisation et de privatisation systématique en Europe ; ou encore à soutenir les positions du mouvement syndical européen concernant les négociations sur le projet de partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP).

À quelques nuances près, tous les partis se sont exprimés "clairement contre la politique d'austérité actuelle" et "en faveur d'un changement de cap" des politiques dans l’UE, ainsi que le réclame l’OGBL. "Quand je vois les réponses, je pourrais me dire que, finalement, peu importent les personnes qui seront élues, elles défendront en principe les positions qui sont les nôtres", a souligné Jean-Claude Reding.

Le président de l'OGBL n’a cependant pas manqué de relever certaines contradictions entre les positions exprimées par les partis nationaux et leurs candidats et les positions officiellement défendues par leur groupe politique au niveau européen, visant particulièrement le CSV et sa candidate tête de liste. Si le parti de l'actuelle vice-présidente de la Commission européenne, Viviane Reding, se dit contre l’austérité, le groupe politique européen auquel le parti appartient, le PPE, en a été l’un de ses ardents partisans selon l’OGBL.