Le 20 mai 2014, le député Henri Kox (déi Gréng) adressait au ministre de l’Agriculture une question parlementaire portant sur les néonicotinoïdes, trois pesticides jugés nocifs pour les abeilles dont l’utilisation avait été interdite pour deux ans un an auparavant par la Commission européenne.
Depuis le 1er décembre 2013, ces trois pesticides - clothianidine, imidaclopride, thiaméthoxame – ne peuvent plus être utilisés pour le traitement des semences, l'application de micro-granulés au sol et la pulvérisation des végétaux attirant les abeilles. Ils restent toutefois autorisés pour certains autres usages sous serre ou en plein champ après la floraison.
Cette interdiction, qui n’est donc pas complète et qui ne porte pas sur tous les néonicotinoïdes, comme le relève le député écologiste, avait été décidée par la Commission européenne après qu’il avait été constaté qu’une majorité qualifiée ne pouvait être trouvée au Conseil à ce sujet. Cette mesure, qui faisait suite à une étude dans laquelle l’EFSA mettait en évidence un certain nombre de risques pour les abeilles, doit toutefois être réexaminée dès que de nouvelles informations seront disponibles, et au plus tard dans les deux ans, c’est-à-dire d’ici fin 2015.
Entretemps, Henri Kox note que "de plus en plus d'études scientifiques tendent à confirmer la dangerosité de ces pesticides" et il se réfère notamment à une étude toute récente (Bulletin of Insectology, vol. 67, Juin 2014, p.125-130), dans laquelle des chercheurs de l'Université de Harvard concluent que les deux néonicotinoïdes étudiés (imidacloprid et clothianidin) sont "hautement susceptibles" de provoquer l'effondrement de colonies saines.
Le député souhaitait donc savoir si le ministre avait connaissance de cette étude et si le gouvernement entendait plaider en faveur d’une interdiction complète des néonicotinoïdes au niveau européen.
Dans sa réponse transmise le 12 juin 2014, le ministre Fernand Etgen indique que le Service de phytopathologie de l'Administration des services techniques de l'Agriculture a bien connaissance de cette étude. Il souligne toutefois aussi que, depuis que de premiers doutes concernant l'influence négative des néonicotinoïdes sont apparus, de nombreuses études ont été réalisées, avec des résultats souvent assez divergents.
"Un effet négatif de ces substances sur les colonies d'abeilles ne peut pas être écarté, même s'il semble peu probable que ceci soit la seule cause de la hausse de mortalité observée", en a-t-il retenu. En effet, explique le ministre dans les relations complexes existant au niveau de l'écologie des abeilles, il n'est pas toujours possible, parmi tous les facteurs qui interagissent (dans ce cas : conditions météo, autres maladies et parasites, autres insecticides et influences environnementales), de déterminer celui qui est prédominant, car tous ces facteurs ont sans doute plutôt un effet cumulatif.
Cependant, affirme le ministre, lorsque des doutes fondés concernant l'effet négatif de l'un de ces facteurs existent, le principe de précaution s'impose.
Ainsi, il estime qu’il "serait bon de prolonger la période d'interdiction, vu que celle appliquée à présent par le règlement d'exécution n°485/2013 modifiant le règlement d'exécution (UE) n° 540/2011 en ce qui concerne les conditions d'approbation des substances actives clothianidine, thiaméthoxame et imidaclopride et interdisant l'utilisation et la vente de semences traitées avec des produits phytopharmaceutiques contenant ces substances actives est nettement trop courte pour pouvoir déterminer, de façon statistiquement représentative, si oui ou non, elle aura un effet positif sur la vitalité et la survie des colonies". En effet, explique le ministre, les semences des cultures d'hiver 2013 ont encore été traitées et semées peu avant l'entrée en vigueur de l'interdiction, et celle-ci ne produira donc ses véritables effets qu'à partir des prochaines cultures d'automne, donc peu de temps avant la fin de la période d'interdiction en mai 2015.
Le ministre en conclut que l'interdiction qui est en vigueur "ne pourra que difficilement conduire à un effet représentatif" et qu’elle devrait par conséquent "être maintenue jusqu'à l'été 2017, afin de pouvoir encore couvrir deux périodes d'hivernage et de printemps complètes avant de pouvoir tirer des conclusions valables sur l'effet sur les colonies d'abeilles".