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Parlement européen - Commerce extérieur
Invité par les eurodéputés de la commission du Commerce international, l’ambassadeur des Etats-Unis auprès de l’UE, Anthony Gardner, s’est engagé à "rétablir la confiance dans les échanges transatlantiques"
03-09-2014


comm-inta-gardner-portrait-2L’ambassadeur des Etats-Unis auprès de l’UE, Anthony Gardner, invité au Parlement européen pour la première fois depuis sa prise de fonction en février 2014, s’est engagé le 3 septembre 2014 à "rétablir la confiance dans les échanges transatlantiques". Lors d’une audition à la commission du commerce international, il s’est engagé à "rétablir la confiance dans les échanges transatlantiques", à "promouvoir un dialogue franc et ouvert" et à établir de "fortes relations avec le Parlement européen". Lors de son discours qui visait à répondre aux critiques du partenariat transatlantique d'investissement et de commerce (TTIP), Anthony Gardner a souligné que la coopération entre les Etats-Unis et l’Union européenne était "plus essentielle que jamais", notamment dans le contexte de crise ukrainienne.

Pour l’ambassadeur, le TTIP est "la question économique la plus importante du point de vue de son potentiel de promotion de la croissance et de l’emploi". Il a affirmé que le TTIP à lui seul n’était pas une solution, mais que c’était "le plus important stimulateur disponible sans endettement". Anthony Gardner a mis en avant le potentiel du TTIP, notamment pour les petites et moyennes entreprises (PME), "l’épine dorsale" de l’économie, mais regretté que ce potentiel "n’attire pas beaucoup l’attention des Européens", malgré les "faibles performances" de son économie ces derniers temps. "Les États-Unis et l'Europe ont besoin de plus de croissance, mais ne nous le cachons pas, l'Europe en a encore plus besoin. Comment garantir à sa jeunesse un avenir, des retraites décentes sans cette croissance ?", a-t-il soutenu.

Trouver un "équilibre entre la protection des investisseurs et le droit des gouvernements de réglementer"

Selon lui, les Etats-Unis privilégient un "accord global", car seulement celui-ci pourra "apporter résultats positifs et équilibre". Il s’est référé au vice-ministre italien du Commerce, Carlo Calenda, qui avait laissé entendre, lors de la présentation du programme de la Présidence italienne devant les parlementaires un peu plus tôt, qu'un accord TTIP intérimaire pouvait être envisageable. Il a également mis en garde contre les conséquences négatives si les Etats-Unis et l’UE n’arrivent pas à trouver un accord. "Si l’on échoue, d’autres pays qui n’ont pas nos standards élevés vont nous imposer leurs normes".

Concernant le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etats (RDIE ou IDSD en anglais), critiqué par la société civile, les ONG et plusieurs pays comme le Luxembourg ou l'Allemagne, Anthony Garder a rappelé que les Etats membres de l’UE auraient signé "près de 1400 accords qui contenaient presque tous une clause RDIE", en ajoutant que ce mécanisme était "souvent mal compris".

"Nous ne voulons pas défendre nos entreprises face à un manque d'opportunité d'investissement", a affirmé Anthony Gardner, en soulignant l’importance d’un "équilibre entre la protection des investisseurs et le droit des gouvernements de réglementer". Selon lui, les Etats-Unis tiennent à consulter les parties prenantes "pour trouver une solution d'équilibre dans nos propres traités bilatéraux" et gardent "l'esprit ouvert face aux suggestions de la Commission". Il a appelé les deux parties à se concentrer sur "des positions pragmatiques et pratiques".

"Le TTIP ne va pas forcer les Etats à privatiser leurs services publics", assure Anthony Gardner

comm-inta-gardner-140903En allusion aux critiques qui visent le TTIP, il a soutenu que "toutes les études" montraient que l’impact du TTIP serait "positif". Il a regretté le fait que les détracteurs de cet accord se concentrent sur des "questions parfois secondaires"  et les a appelés à ne pas "préjuger des résultats" des négociations qui étaient toujours dans la "première phase", mais à attendre un texte plus élaboré.

Quant au manque de transparence souvent reproché aux parties négociatrices, Anthony Gardner a souligné son importance : "Nous sommes responsables face à nos électeurs et devons les informer sur cette question économique très importante". Il a admis que "beaucoup d’informations" étaient mises à disposition des membres du Congrès américain, mais soutenu qu’il n’était pas acceptable d’offrir plus de transparence que celle acceptée par les membres du Congrès. "Lorsqu’on négocie des accords très complexes, la transparence totale est un obstacle à un dialogue franc et honnête", a-t-il estimé.

L’argument selon lequel le TTIP promeut un "programme de déréglementation" est un "mythe", a déclaré Anthony Gardner, en tentant de rassurer les Européens.  "Le TTIP ne va pas forcer les Etats à privatiser leurs services publics", a-t-il dit, en soulignant que les services publics sont exclus de la plupart des traités de libre-échange.

Quant à l’inquiétude des ONG que le TTIP menace la qualité des normes européennes, Anthony Gardner a soutenu que certaines normes américaines sont mêmes plus strictes que dans l’UE. 

Pour l'ancienne commissaire Viviane Reding, la protection des données est "l’éléphant" dans les négociations sur le TTIP

Après l’introduction de l’ambassadeur, les eurodéputés ont présenté leurs points de vue et des questions. "Je suis d'accord, le TTIP est bon pour nos deux économies. Mais les négociateurs doivent entendre les arguments de la société civile et des ONG, et ils devront rendre des comptes", a jugé David Martin (S&D). Il a reproché à l’ambassadeur de ne pas tenir compte des préoccupations des citoyens européens quant au mécanisme RDIE : "On sait qu’il y a des problèmes parce qu’on a cette clause dans certains des 1400 traités bilatéraux, on sait que cela a eu un impact sur le développement de la politique publique".

"Je ferai presque le même discours que David Martin quant aux réserves, mais je n'en arriverai pas aux mêmes conclusions. Il ne faut pas, aujourd’hui, négocier ce traité, même avec les ambitions, très biaisés, de croissance", a affirmé Yannick Jadot (Verts/ALE). Quant à la transparence, il a appelé l’ambassadeur à "plus de nuances" : "Est-ce que vous vous rendez compte, que le vice-ministre au commerce italien, qui préside en ce moment le Conseil des ministres du Commerce, n’a pas accès aux textes de négociation ?", a-t-il demandé, jugeant que des politiques européens sont traités "comme des boy scouts".

L’eurodéputée luxembourgeoise et ancienne commissaire à la Justice et aux droits fondamentaux  Viviane Reding (PPE) a affirmé que "la confiance mutuelle a été brisée", accusant des entreprises américaines opérant en Europe de "non-respect des règles relatives à la protection de données", tout en estimant que la protection des données est "l’éléphant" dans les négociations sur le TTIP et que l’inclure dans les négociations rendraient ces dernières "encore plus difficiles". Elle a salué la volonté du gouvernement américain d’étendre aux citoyens européens les garanties du "Privacy Act", la loi américaine relative à la protection de la vie privée, et dit espérer que le Congrès américain y donnera son accord. Elle voulait également savoir si les Américains acceptent les treize recommandations, visant à améliorer le fonctionnement de l’accord Safe Harbour, qui étaient formulées par la Commission européenne en novembre 2013 pour restaurer la confiance des citoyens européens après le scandale des écoutes de la NSA.

La transparence est la "question prioritaire"

Tokia Saïfi (PPE) a qualifié la transparence dans ce dossier de "question prioritaire" et demandé à l’ambassadeur de "faire un effort d’explication" : "Vous voyez bien que le manque de transparence alimente les fantasmes et donne lieu à l’exploitation politique".

L’eurodéputé du Front national français Marine Le Pen (Non inscrits) a aussi dit douter que les agriculteurs européens puissent concurrencer les fermes américaines "plus grandes et plus productives". L’agriculture risque selon elle de "souffrir de cette concurrence frontale avec une agriculture américaine très intensive et industrielle». Elle accuse l’agriculture américaine d’utiliser des "procédés que les Français et les Européens refusent absolument". La qualité de l’agriculture européenne ne sera plus "au niveau que les Européens exigent" et sera "obligée de s’aligner sur les normes américaines", craint-elle.