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Environnement
La Commission européenne annonce qu’elle ne bloquera pas l’accord conclu en trilogue entre le Conseil de l’UE et le Parlement européen sur une réduction des sacs en plastique à usage unique
19-11-2014


Frans Timmermans, premier vice-président de la Commission (Source : Commission)La Commission européenne a annoncé le 19 novembre 2014 ne pas avoir l’intention de bloquer l’accord conclu en trilogue entre le Conseil de l’UE et le Parlement européen sur une réduction des sacs en plastique à usage unique, même si elle estime que certains passages de l’accord ne correspondent pas à l’objectif "Mieux légiférer".

L’accord, qui a été trouvé le 17 novembre 2014 en trilogue, prévoit que les Etats ne l'ayant pas encore fait imposent que ces sacs soient payants d'ici 2018, et/ou limitent leur consommation annuelle à 90 sacs par habitant d'ici 2019. En 2025, la consommation annuelle ne devra pas dépasser 40 sacs par habitant. L’accord doit être avalisé le 21 novembre 2014 par les représentants des Etats membres au Coreper, puis par la Commission de l’Environnement du Parlement européen.

Frans Timmermans, premier vice-président de la Commission chargé entre autre de l’objectif "Mieux légiferer", a déclaré le 19 novembre 2014 lors d’une conférence de presse que la Commission n’empêchera pas l’accord en demandant l’unanimité lors du vote au COREPER et l’accepterait s’il était voté à la majorité qualifiée.

"Je ne pense pas que le projet, tel qu’il s’est développé, correspond à ce que nous considérons comme ‘mieux légiférer’. Dans certains Etats membres, il y a probablement des manières plus simples de procéder qu’avec cette proposition", estime-t-il, ajoutant que "s’il y a des problèmes d’exécution, ce sera aux Etats membres de régler le problème". Il a souligné qu’il faut être "pragmatique" et ce que la Commission "veut en fin de compte, c’est réduire les sacs en plastique dans l’environnement". Il a par ailleurs dit s’attendre à un vote à l’unanimité.

Le texte de compromis "pose des problèmes concernant les normes d'emballages pouvant être compostés et a des doutes sur les instruments auxquels les États membres peuvent recourir"

Natasha Bertaud, porte-parole de la Commission, avait déjà détaillé le 18 novembre 2014 les préoccupations de la Commission lors d’une conférence de presse. "La Commission estime que le nouveau texte de compromis pose des problèmes concernant les normes d'emballages pouvant être compostés et a des doutes sur les instruments auxquels les États membres peuvent recourir." Ella a rappelé que, lorsque l'étude d'impact avait été réalisée sur cette proposition qui remonte à un an, "huit États membres n'avaient pas de données permettant d'identifier et de fixer des objectifs nationaux adéquats".

La proposition de directive telle qu’adoptée par le Parlement européen en avril 2014 avait prévu une réduction de l'utilisation de sacs en plastique à usage unique d'au moins 80 % d'ici 2019, avec un objectif intermédiaire de réduction de 50 % de ces sacs polluants d'ici à 2017. Les députés avaient recommandé le recours à des instruments économiques tels que l'imposition, la limitation de commercialisation voire l'interdiction. Mais avec l’accord en trilogue, une interdiction des sacs oxo-dégradables sera finalement renvoyée à plus tard, en fonction d'études scientifique et d'impact socio-économique que la Commission s'est engagée à mener.

Le Royaume-Uni opposé à une interdiction des sacs en plastique

C’est notamment le Royaume-Uni qui s’était opposé à une interdiction des sacs en plastique. Selon un article du quotidien britannique The Guardian, l’entreprise britannique Symphony Environmental Technologies est un des plus importants producteurs de sacs oxo-dégradables et a "réussi à faire utiliser" ces sacs dans des pays comme le Pakistan ou le Kosovo. L’article révèle que le député européen Nirj Deva (ECR) est un des présidents du conseil d’administration. Margrete Auken, eurodéputée danoise et rapporteuse de la proposition, avait reproché à l’entreprise de se faire jouer ses contacts avec les conservateurs au gouvernement britannique pour mobiliser une minorité de blocage contre son projet au Conseil de l'UE, selon un article d’Euractiv.

La proposition de directive de la Commission, qui date de novembre 2013, n’avait pas fixé d’objectif et laissé le choix aux Etats membres, tout en en renvoyant aux bonnes pratiques de pays comme l’Irlande, qui a réduit sa consommation de 95 %, en introduisant une taxe sur ces sacs.

C’est la consommation de sacs en plastique à poignées d'une épaisseur inférieure à 50 microns, qui est visée, tandis que les sacs très légers, qui pèsent moins de 15 microns, sont exclus de projet.

Les sacs en question sont moins souvent réutilisés que les sacs plus épais et finissent généralement en déchets sauvages. Plus de 90% des quelque 100 milliards de sacs plastiques mis sur le marché de l'UE rentrent dans cette catégorie. Selon la Commission européenne, plus de 8 milliards par an de ces sacs finissent en déchets sauvages, disséminant des microparticules plastiques dans la nature. Les écologistes soupçonnent ces sacs, censés être biodégradables à l'issue d'un traitement chimique,  de se désagréger en fines particules de plastique restant nocives pour l'environnement et la santé. Des dizaines de milliers d’animaux sont tués chaque années parce qu’ils avalent du plastique, estime un rapport publié par plusieurs agences de protection de l’environnement.

Fortes disparités entre les Etats membres

A titre d'exemple, le Danemark ou la Finlande affichent une consommation annuelle de quatre sacs par habitant, contre plus de 460 pour le Portugal ou la Pologne. La France qui prévoit d’interdire ces sacs à partir de janvier 2013, arrive à 80 sacs par an et habitant.  Le Luxembourg, où l’initiative de recourir à des sacs écologiques a démarré dès 2004, affiche avec la Belgique, l’Irlande et l’Autriche les meilleurs résultats dans ce domaine. Les nouveaux Etats membres d'Europe de l'Est sont plutôt réticents à une réduction.

Réactions

L’eurodéputé luxembourgeois Claude Turmes (Verts) s’est félicité dans un communiqué un "bon compromis" qui obligera les Etats membres à "emprunter tous la même voie". Il a rappelé que la moyenne européenne de consommation des sacs est de 200 par an et que seulement 6 % des sacs sont recyclés. Il a salué le fait qu’au Luxembourg, la consommation de sacs en plastique est de seulement 15 par habitant par an.

L’eurodéputé verte Margrete Auken a pour sa part salué sur son compte Twitter une "grande victoire", après l’annonce de la Commission de ne pas bloquer l’accord, et s’est déclaré "confiante" que le COREPER l’adoptera.