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Conseil JAI – Les ministres de l’Intérieur de l’UE discutent entre autres de l’indépendance du Parquet européen et de la réponse pénale à donner au phénomène des combattants étrangers
05-12-2014


Le commissaire européen à la Migration et aux Affaires intérieures Dimitris Avramopoulos (Source : Conseil)La problématique des combattants étrangers, les flux migratoires, l’indépendance du Parquet européen ou encore le PNR européen étaient à l’ordre du jour du Conseil JAI des 4 et 5 décembre 2014.  

Les ministres de l’Intérieur de l’UE ont débattu sur la problématique des combattants étrangers, en s'appuyant sur un document de réflexion élaboré par le coordinateur de l'UE pour la lutte contre le terrorisme Gilles de Kerchove, qui déplore que la réponse judiciaire n’est "pas adéquate" et note que sur 3000 combattants étrangers concernés, seulement 10 ont été condamnés. Les ministres ont également discuté des mesures pour une meilleure gestion des flux migratoires afin de "répondre à la pression migratoire d’une manière structurée et au-delà des mesures d’urgence immédiate", adoptées lors du Conseil JAI en octobre 2014.

Le ministre luxembourgeois, Etienne Schneider, a plaidé pour le renforcement du cadre légal européen concernant la réponse pénale à apporter au phénomène des combattants étrangers, qui permettrait "plus d'harmonisation entre les législations nationales en matière de terrorisme et enverrait un signal politique fort de l'UE dans sa détermination à répondre d'une seule voix face à une menace qui concerne l'ensemble des États membres", note un communiqué. Les ministres se sont également accordés sur un échange d’informations sur les combattants étrangers entre les Etats membres et avec Europol. Ils ont adopté les lignes directrices mettant en œuvre la version révisée de la Stratégie de l'UE de lutte contre la radicalisation et le recrutement de terroristes, qui avait été adoptée lors du Conseil JAI en juin 2014.

PNR – Le Luxembourg souligne l’importance de la protection des données

Le Conseil a réitéré son appel à adopter "en urgence" la proposition de directive PNR relative aux données des passagers aériens ("Passenger Name Record"), qui est bloquée par le Parlement européen. Elle prévoit d’harmoniser les dispositions des États membres et oblige les transporteurs aériens qui assurent des vols entre un pays tiers et le territoire d’au moins un État membre de transmettre aux autorités compétentes les données PNR. Elle vise la création d’un fichier et affirme garantir un niveau élevé de protection de la vie privée et des données à caractère personnel.

Le ministre luxembourgeois de la Sécurité intérieure, Etienne Schneider, avec le commissaire européen à la Migration et aux Affaires intérieures Dimitris Avramopoulos (Source : Conseil)Le ministre luxembourgeois Etienne Schneider a souligné qu’il faut voir le PNR européen dans le contexte du nouveau cadre juridique européen de protection des données. Sans cette dimension, la nécessaire sécurité juridique de la directive PNR ne serait éventuellement pas garantie, estime-t-il, en se référant à l’arrêt de la Cour de justice de l’UE qui avait déclaré invalide en avril 2014 la directive sur la conservation préventive des données. Néanmoins le Luxembourg "appelle de ses vœux une relance des discussions avec le Parlement européen afin d'aboutir à un PNR européen, car il est convaincu que seul un système harmonisé au niveau de l'UE offrira aux citoyens un maximum de garanties à la fois quant au respect des libertés fondamentales et en matière de contrôle", selon le communiqué.

Pour mémoire, la Commission Libertés civiles, justice et affaires intérieures (LIBE) au Parlement européen avait rejeté en avril 2013 la proposition de directive sur le PNR, en estimant qu’une collecte systématique des données des passagers portait atteinte aux principes européens de protection des données à caractère personnel. Le Parlement européen veut en plus attendre le jugement de la CJUE sur l’accord PNR avec le Canada avant de l’approuver, selon une résolution adoptée en novembre 2014.

Le commissaire européen à la Migration et aux Affaires intérieures, Dimitris Avramopoulos, a pour sa part jugé le 5 décembre 2014 que la décision de faire appel à la CJUE (concernant l’accord PNR avec le Canada) "ne devrait pas avoir d’impact sur le processus ou la substance de la directive PNR qui sera un outil crucial pour la lutte contre le terrorisme".

Discussion sur un programme européen de réinstallation des réfugiés

Les ministres ont débattu de la situation des flux migratoires en Méditerranée et ont été informés par la Commission et le Service européen pour l'action extérieure (SEAE) sur le suivi de la 'task force' Méditerranée mise en œuvre après le naufrage de Lampedusa en octobre 2013 et sur les conclusions d'octobre 2014 des  ministres sur la gestion de l'immigration. Les ministres ont été informés des débuts de l'opération Triton et du retrait progressif de l'opération Mare Nostrum, créée par l’Italie après Lampedusa.

Les ministres ont discuté sur la possibilité d'un programme européen de réinstallation des réfugiés dans l'UE. La Commission a évoqué la possibilité de mettre en œuvre un nouveau projet pilote, basé notamment sur une possible répartition des réfugiés entre États membres, mais la plupart des délégations a souhaité que l'accueil de réfugiés ne repose que sur une base volontaire.

Le commissaire européen à la Migration et aux Affaires intérieures Dimitris Avramopoulos a appelé lors d’une conférence de presse les Etats membres à mettre en œuvre les nouvelles règles du régime d’asile européen commun afin de "réduire l’écart entre le petit nombre d’Etats qui accueillent la majorité des demandes d’asile et ceux qui ne sont pas confrontés à ces défis".  Il a souligné que tous les Etats membres doivent offrir un "nombre crédible" de places à des réfugiés dans le cadre de la réinstallation afin de "sauver les réfugiés les plus vulnérables d’emprunter les voies les plus dangereuses vers l’Europe" et "réduire la pression migratoire" sur l’Europe. "Il n’est pas acceptable que les Etats membres qui reçoivent le plus de demandes d’asile sont les mêmes qui permettent le plus souvent la réinstallation des réfugiés", a-t-il estimé. 

L’indépendance d’un Parquet européen mise en question

Les ministres ont discuté sur la proposition relative à la mise en place d’un Parquet européen, notamment sur la question comment garantir son indépendance et comment rendre la procédure de désignation et de nomination des membres du collège plus transparente et plus objective. Selon une note de la Présidence italienne, les procureurs européens "exerceront la surveillance sur les enquêtes et les poursuites dans leur État membre d'origine" et "les éventuelles instructions aux procureurs européens délégués dans les États membres seront données par leur intermédiaire". Un système qui devrait garantir "que les instructions données aux procureurs européens délégués dans les États membres le soient toujours avec une parfaite connaissance du système juridique national".

Selon la présidence, "il se pose […] des questions quant à l'indépendance du processus décisionnel du Parquet européen". Elle estime que "si tous les contacts avec les procureurs européens délégués passent par les procureurs européens, et que ces procureurs européens sont dans la pratique choisis par leur État membre respectif, il […] est possible que le processus décisionnel du Parquet européen conserve de facto un caractère "national". Selon la présidence, "la valeur ajoutée du Parquet européen pourrait aussi se voir remise en cause si toutes les décisions essentielles sont prises par les procureurs européens délégués, sans surveillance effective au niveau européen".

Un échange de vue sur l’espace Schengen

Le Conseil a procédé à un échange de vues sur l’évaluation du fonctionnement de l’espace Schengen, sur base d'un rapport de clôture au terme de 15 années d'évaluation, de même qu'à la lumière d'un rapport semestriel. Le Conseil a souligné "l'importance que revêtent la confiance mutuelle entre les États membres, la coopération sur un pied d'égalité et l'évaluation par les pairs, tous ces éléments étant et devant continuer d'être les moteurs du succès à long terme du système d'évaluation de Schengen". Un nouveau mécanisme d'évaluation a été créé, censé faire face aux nouveaux défis, notamment "la pression migratoire accrue aux frontières extérieures dans le contexte du ‘printemps arabe’".

Le Conseil a en outre adopté des conclusions sur l’élaboration d’une stratégie de sécurité renouvelée pour l’UE, adoptée par le Conseil en février 2010.