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Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale
Conseil ECOFIN – Les ministres européens des Finances détaillent le contenu du Fonds européen pour les investissements stratégiques, principal instrument du plan d’investissement Juncker
17-02-2015


Le projet de règlement concernant le Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI), principal instrument du plan d’investissement Juncker destiné à libérer 315 milliards d’euros pour soutenir les investissements dans l’UE au cours des trois prochaines années, constituait le point principal à l’ordre du jour du Conseil ECOFIN du 17 février, les autres points ayant été les ressources propres, le remboursement anticipé par le Portugal de ses encours à l’égard du FMI dans le cadre du programme d’aide et en filigrane la question de la Grèce, qui n’était pas à l’ordre du jour mais a déclenché de nombreuses réactions.

Les ministres détaillent le contenu du Fonds européen pour les investissements stratégiques en attendant l’accord politique prévu pour mars 2015

Le ministre des Finances luxembourgeois Pierre GRAMEGNA avec le président de la BEI Werner HOYER et le ministre fédéral belge des Finances Johan VAN OVERTVELDT lors du Conseil ECOFIN du 17 février 2015 à Bruxelles (c) Union européenneSelon le ministre letton des Finances Janis Reirs, qui a assuré la présidence du Conseil, les négociations entre les États membres avancent à bon rythme en vue d'un accord politique au Conseil ECOFIN de mars 2015. Le vice-président de la Commission et commissaire à l’euro et au dialogue social Valdis Dombrovskis a, quant à lui, parlé d’une discussion "constructive" et fait part d’un calendrier "ambitieux" selon lequel le règlement de l'EFSI  devra être adopté d’ici au mois de juillet et le Fonds opérationnel d’ici au mois de septembre.

Les ministres des Finances européens ont apporté leur soutien à la clause de révision qui consiste en un réexamen du Fonds après les premières années de fonctionnement pour déterminer si l'EFSI doit devenir un instrument permanent, au redéploiement de fonds européens pour financer l'EFSI, conformément à la proposition de la Commission, ainsi qu’à la structure de gouvernance "légère" qui devra être mise en place en vue d’assurer des prises de décision indépendantes. Le ministre Reirs a à ce titre insisté sur le fait que l'EFSI reste "indépendant de manière à ne pas créer de bureaucratie."

Conformément à la proposition initiale, l'EFSI sera établi au sein de la Banque européenne d’investissement (EBI) par un accord entre la Commission et la BEI. Les Etats membres et des parties tierces auront la possibilité de participer au Fonds au moyen de contributions financières.

Le Fonds sera composé de 16 milliards d’euros provenant du budget de l’UE (principalement du programme de recherche et d’innovation Horizon 2020 et du Mécanisme d'interconnexion en Europe) et de 5 milliards en cash provenant de la BEI. Pour faciliter le paiement d’appels en garantie, un fonds de garantie sera mis en place. Ce dernier atteindra progressivement les 8 milliards d’euros d’ici à 2020. En complément, le Fonds entend attirer des investisseurs privés, et ce notamment grâce au financement de projets à risques.

Quant à la gouvernance du Fonds, les ministres se sont entendus sur deux instances qui la composeront :

  • un comité de pilotage, chargé de mettre en place la stratégie d’ensemble, la politique d’investissement et le profil risque du Fonds. Celui-ci sera composé de la Commission et de la BEI ainsi que les pays et/ou investisseurs privés qui contribueraient directement au fonds, tout en évitant la politique du 'juste retour' (selon laquelle un pays contribuant au capital du fonds pourrait exiger la réalisation d'investissements sur son territoire).
  • Un comité d’investissement, responsable de la sélection des projets qui devront par ailleurs également être approuvées par la BEI. Il sera, selon les conclusions du Conseil, composé d’un directeur et de six experts indépendants.

 Par ailleurs, les ministres européens des Finances siégeant en tant que membres du conseil d'administration de la BEI, ont décidé, mardi 17 février, que l'institution européenne allait préfinancer des projets de développement des PME avant même l'entrée en fonction de l'EFSI. Les fonds disponibles proviendront du Fonds européen d'investissement (FEI), instrument faisant partie du groupe BEI, qui couvrira certains risques auxquels seront exposées les PME bénéficiaires.

Les réactions des Etats membres

Le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble a indiqué, au sujet de la participation des Etats membres à la gouvernance du Fonds que "la validité du comité de pilotage n'est pas claire" pour lui. " Nous ne voulons pas que d'autres États membres ou tierces parties disposent de droits de vote au sein du comité de pilotage", a-t-il encore dit. Selon lui, il ne devrait pas revenir au comité de pilotage de l'EFSI, mais au Conseil et à la Commission, d'élaborer les lignes directrices sur l'investissement qui orienteront le choix de projets viables.

Compte tenu du manque d’allant des autres Etats membres, la Pologne ne s’est pas montrée très enthousiaste à contribuer directement au Fonds, selon son ministre des Finances Mateusz Szczurek. Ce dernier a par ailleurs prôné d'élargir de 6 à 12 experts indépendants le comité d'investissement, étant donné la charge de travail requise. Le ministre des Finances des Pays-Bas et président de l’Eurogroupe Jeroen Dijsselbloem a demandé quant à lui demandé à combien s'élèverait le coût de fonctionnement de l'EFSI et qui allait couvrir ces frais. Pour Bjarne Corydon, ministre danois des Finances, la durée de vie du fonds devrait être limitée à 2019, alors que le texte sur la table prévoit une clause de rendez-vous pour prendre une décision sur ce point après les premières années de fonctionnement.

Pierre Gramegna, ministre luxembourgeois des Finances, a insisté sur la valeur ajoutée du Fonds : pour lui, il faut s’assurer que "les 21 milliards d’euros débloqués par la BEI servent à autre chose qu’à financer des projets qui l’auraient été de tout manière". Au sujet de la sélection des projets, il indique qu’il faut mettre en place une procédure de sélection qui garantisse un "traitement objectif des demandes" et éviter une "politisation de la sélection", sans quoi il sera difficile d’attirer des investisseurs privés. "La position du Luxembourg, c’est que les projets doivent être alloués sur la base de leur valeur économique et objective, et non pas en raison de critères ou quotas géographiques", a insisté le Ministre. "Les Etats membres devraient être à même de financer des projets, mais ils ne devraient pas être intégrés dans le processus de décision lors de la sélection des projets", a-t-il encore dit. "Le comité d’investissement qui devra examiner chaque projet et décider lesquels bénéficieront d’une aide au titre de l’EFSI devrait être composé par des représentants de la BEI et de la Commission, mais pas des Etats membres." 

Mario Monti a présenté le premier rapport d'évaluation d'un groupe de haut niveau sur les ressources

Le Conseil a pris par ailleurs note du premier rapport d'évaluation d'un groupe de haut niveau sur les ressources propres publié en décembre 2014. Le rapport a été présenté par le président du groupe, Mario Monti.

Pour mémoire, le groupe de haut niveau sur les ressources propres a été mis en place dans le cadre d'un accord politique sur le cadre financier pluriannuel 2014-2020. Le groupe se compose de membres nommés par le Parlement européen, la Commission européenne et le Conseil et est chargé d'examiner le système actuel des ressources propres de l'UE jusqu’en 2016 en vue de le rendre plus simple, plus transparent, plus équitable et plus démocratique à partir de 2021. Il se réunit au moins une fois tous les 6 mois. Les conclusions provisoires du Conseil rapportent que les parlements nationaux seront invités à une conférence interinstitutionnelle en 2016 pour évaluer les résultats des travaux du groupe. Sur la base des résultats de ce travail, la Commission évaluera si de nouvelles initiatives en matière de ressources propres sont nécessaires pour la période après 2020.

"Nous avons encouragé Mario Monti à veiller au fait que le sujet des ressources propres ne peut être traité avec succès que si en même temps, nous veillons au ‘better spending’, à l’efficience, et à la plus-value des programmes européens", a indiqué le ministre des Finances allemand Wolfgang Schäuble dans une conférence de presse à l’issue du Conseil. "Il faut en outre veiller à ce que tous les participants, notamment les Etats membres, respectent leurs engagements, car aussi longtemps que nous sommes dans ces structures, il nous faut de la confiance mutuelle", a ajouté le ministre.

La volonté du Portugal de rembourser de manière anticipée près de la moitié des prêts du FMI saluée par les ministres

L'Eurogroupe et le Conseil ECOFIN ont par ailleurs "donné leur appui politique" à la volonté du Portugal de rembourser de manière anticipée près de la moitié des prêts que le FMI lui a octroyés dans le cadre de son plan de sauvetage. "Les ministres des Finances de la zone euro apportent un soutien de principe au remboursement anticipé de prêts du FMI par le Portugal", avait déjà déclaré le président de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, à l’issue de la réunion de l’Eurogroupe du 16 février 2015. "Comme l'Irlande, qui a depuis peu entamé ses propres remboursements anticipés au FMI, le Portugal a démontré la rapidité avec laquelle un pays peut à nouveau être rétabli après avoir appliqué avec succès un programme d'ajustement, à condition qu'il y ait une appropriation des réformes à mener de manière continue", a-t-il ajouté.

"Les pays qui ont fait des réformes ont retrouvé la croissance", a de son côté indiqué le vice-président de la Commission européenne en charge de l’euro et du dialogue social Valdis Dombrovskis lors de la conférence de presse à l’issue de la réunion du Conseil. Le remboursement anticipé permettrait au Portugal d’économiser près d’un demi-milliard d’euros de paiements d’intérêts. "Ceci aura un effet positif sur la durabilité de la dette portugaise", a-t-il souligné.

Le ministre des Finances luxembourgeois Pierre Gramegna a déclaré à l’issue de la réunion du Conseil que la proposition du Portugal de rembourser de manière anticipative certains prêts "illustre le fait qu’un pays comme le Portugal, qui a pris des mesures de réformes structurelles importantes, est sur le bon chemin, puisqu'il peut rembourser de manière anticipative certains prêts, et il montre aussi que l’attitude de l’UE et de la zone euro en particulier et les prêts qui ont été faits au Portugal ont été utilisés pour rendre le pays plus compétitif et lui permettre de renouer avec la croissance".