Principaux portails publics  |     | 

Politique étrangère et de défense
Conseil européen – Les chefs d’Etat et de gouvernement lient clairement la durée des sanctions contre la Russie à la mise en œuvre complète des accords de paix de Minsk sur l’Ukraine
19-03-2015


Le Premier ministre luxembourgeois, Xavier Bettel, lors de son arrivée au Conseil européen à Bruxelles, le 19 mars 2015 (source: Conseil européen)Les chefs d’Etat et de gouvernement des Etats membres de l’Union européenne (UE), réunis pour le premier jour du Conseil européen à Bruxelles le 19 mars 2015, se sont accordés pour prolonger les sanctions économiques européennes décrétées contre la Russie jusqu'à la "mise en œuvre complète" des accords de paix de Minsk, soit probablement jusqu’à la fin de l'année 2015.

Les conclusions du Conseil européen sur les relations extérieures de l’UE soulignent ainsi que les dirigeants européens ont décidé que "la durée des sanctions contre la Russie", adoptées le 31 juillet 2014 et renforcées le 8 septembre 2014 en raison de son soutien imputé aux actions de déstabilisation menées dans l’Est de l’Ukraine, "devrait être clairement liée à la mise en œuvre complète des accords de Minsk, en gardant à l'esprit que cela n'est envisagé que d'ici le 31 décembre 2015". Les seconds accords de Minsk, négociés dans la capitale biélorusse le 12 février 2015, prévoient en effet que le plein rétablissement du contrôle des frontières par le gouvernement ukrainien ne devrait être finalisé au plus tard que "d'ici la fin de 2015".

"Les décisions nécessaires seront prises dans les prochains mois", précisent par ailleurs les chefs d’Etat et de gouvernement, soit probablement au Conseil européen prévu en juin 2015, ces derniers se disant encore "prêts à prendre de nouvelles mesures si nécessaire". Dans le même temps, "l’UE se tient toujours prête à soutenir le processus de cessez-le-feu ainsi qu’à répondre positivement aux progrès réalisés", a précisé le président du Conseil européen, Donald Tusk, dans une déclaration diffusée à l’issue de la rencontre.

Le contexte

Pour mémoire, les sanctions économiques "de grande envergure", ciblant la coopération sectorielle et les échanges de l’UE avec la Russie, avaient été décrétées le 31 juillet 2014 dans le contexte de l'attentat contre le vol de la Malaysian Airlines à Donetsk, attribué aux à la rébellion séparatiste pro-russe, qui avait fait 298 victimes le 17 juillet précédent. Elles instauraient notamment une limitation de l'accès de la Russie aux marchés de capitaux primaires et secondaires de l'UE; un embargo sur l'importation et l'exportation d'armes et de matériel connexe ; et une interdiction des exportations de biens et technologies à double usage.

Ce train de sanction avait été durci le 8 septembre 2014 en raison "des flux croissants de combattants et d'armes" en provenance de Russie vers l’Ukraine ainsi que de "l'agression [menée] par les forces armées russes sur le sol ukrainien" qui avaient été dénoncés par les dirigeants européens réunis en Conseil européen informel le 30 août 2014 , ce que Moscou a toujours démenti. L'application de ces sanctions économiques, décrétées initialement pour une durée d'un an, aurait donc dû arriver à échéance le 31 juillet 2015.

Les sanctions doivent être liées à la réalité sur le terrain, selon Xavier Bettel

Le fait de lier directement la durée des sanctions à l’application des accords de Minsk, et d’en prolonger de fait l’application, semble ainsi être un compromis entre deux tendances parmi les Etats membres de l’UE, notamment mises en évidence lors de la réunion informelle "Gymnich" des ministres européens des Affaires étrangères, le 7 mars 2015 à Riga.

"Certains pays sont en faveur de leur maintien, d'autres sont en faveur de leur renforcement et d'autres sont pour leur réduction", avait alors dit le ministre espagnol, José Manuel García-Margallo, malgré les assurances de la Haute Représentante de l’UE pour les Affaires étrangères, Federica Mogherini, quant à l’unité des Européens sur le sujet. Les tenants d’une ligne dure plaidaient ainsi pour une décision de prolongation immédiate en vue de maintenir la pression sur la Russie, tandis que d’autres souhaitaient se donner davantage de temps, pour tenir compte de la situation sur le terrain.

A la sortie de la première journée de réunion, le Premier ministre luxembourgeois, Xavier Bettel, a estimé que pour le Luxembourg, il avait toujours été clair que les sanctions devaient être liées à la réalité sur le terrain et devaient donc être prises "en réaction à de nouveaux éléments". "Pour le moment nous sommes dans une phase où l’on constate un espoir vers une désescalade", a-t-il ainsi déclaré, notant cependant que cette situation était "fragile" et "très précaire" et qu’il ne s’agissait donc pas de se réjouir trop vite.

"Il est désormais important que nous puissions faire le suivi [du respect de cet accord], mais si nous avions décidé dès maintenant de renforcer les sanctions ou de les prolonger directement, cela n’aurait pas été un bon signal et nous étions d’accord, tous les 28, sur le fait que cela n’était pas la solution", a encore dit le Premier ministre luxembourgeois.

Condamnation réitérée de l’annexion de la Crimée et réaction aux campagnes de désinformation de la Russie

Les chefs d’Etat et de gouvernement ont par ailleurs réaffirmé la condamnation par l’Union européenne de "l'annexion illégale" de la Crimée et de Sébastopol un an plus tôt par la Russie, annexion que l’UE continue de ne pas reconnaître, ainsi que leur détermination à "mettre en œuvre pleinement cette politique de non-reconnaissance", lit-on dans les conclusions du Conseil européen.

Toujours dans le contexte ukrainien, le Conseil européen a souligné la nécessité "de répondre aux campagnes de désinformation menées actuellement par la Russie". Dans ce contexte, il a invité la Haute Représentante de l’UE à mettre au point d'ici juin un "plan d'action sur la communication stratégique". La mise en place d'une équipe de communication est une première étape dans ce sens, précisent encore les conclusions du Conseil européen.

Politique de voisinage et sommet du Partenariat oriental

Dans ses conclusions sur les relations extérieures de l’UE, le Conseil européen mentionne également la politique de voisinage de l’UE, dont il salue une révision en cours qui devrait "assurer la poursuite de la profonde implication de l'UE à la fois avec les partenaires du Sud et de l'Est" alors qu’un débat plus large sur le voisinage méridional de l’UE entre les dirigeants européens est annoncé au sommet d’octobre 2015.

Les conclusions du Conseil européen rappellent par ailleurs que l'UE est pleinement engagée dans le Partenariat oriental à la veille d’un sommet qui se tiendra à Riga es 21 et 22 mai 2015. Celui-ci "permettra de renforcer, de manière différenciée, les relations avec chacun de ses six partenaires", dit le Conseil européen, qui note que des efforts particuliers devraient être consacrés à faire avancer la coopération dans la construction de l'État, la mobilité et les contacts de peuple à peuple, les opportunités de marché et les interconnexions.

"Le Conseil européen attend avec intérêt la ratification, le plus tôt possible par tous les États membres, des accords d'association et de leurs zones de libre-échange complètes et approfondies avec la Géorgie, la République de Moldavie et l'Ukraine", soulignent encore les conclusions. Pour précision, la Chambre des députés du Luxembourg a ratifié ces accords la veille du premier jour du sommet européen, le 18 mars 2015.