Les ministres des Finances de la zone euro se sont réunis à Bruxelles le 9 mars 2015 pour un Eurogroupe consacré principalement aux projets de plans budgétaires remis par les Etats membres de la zone euro dans le cadre du semestre européen 2015 et du two-pack.
Pour mémoire, en décembre dernier, les ministres des Finances de la zone euro, qui s’étaient basés sur une analyse conduite en novembre par la Commission, avaient estimé que les projets de budgets de sept pays présentaient un risque de non-conformité avec les exigences du Pacte de stabilité et de croissance. Comme prévu alors, les ministres se sont donc intéressés aux progrès réalisés par les Etats membres, dont certains s’étaient engagés à des réformes structurelles et budgétaires supplémentaires. Ils se sont une nouvelle fois basés sur les travaux plus récents de la Commission européenne.
Pour rappel, le Luxembourg faisait partie, avec l’Allemagne, l’Irlande, les Pays-Bas, la Slovaquie et la Lettonie, des six pays dont le projet de budget était jugé conforme avec les règles du Pacte de croissance et de stabilité. Une analyse confirmée lors de cet Eurogroupe. Dans les cas de l’Estonie, de la Finlande et de la Slovénie, les projets de budget étaient jugés "globalement conformes". C’est toujours le cas pour la Slovénie, mais les ministres indiquent dans leur déclaration que cette analyse est désormais "moins claire" pour l’Estonie et la Finlande.
Pour ce qui est des sept pays où était identifié un risque de non-conformité, Jeroen Dijsselbloem, qui présidait la réunion, a indiqué devant la presse que la situation s’était un peu améliorée en Belgique, à Malte et en Italie et, dans une certaine mesure, en Espagne et au Portugal. Le président de l’Eurogroupe a expliqué que les ministres avaient tenu compte des récents rapports de la Commission, concernant notamment l’Italie et la France, pour laquelle la Commission a recommandé d’accorder à la France jusqu'à 2017 pour corriger son déficit excessif. Toutefois, n’a-t-il pas manqué d’indiquer, les risques subsistent et des efforts supplémentaires sont requis dans la plupart de ces pays. Et il a notamment cité à cet égard le cas de l’Autriche, dans le cadre du volet préventif du Pacte, et de la France, dans le cadre du volet correctif.
Jeroen Dijsselbloem a salué les engagements fermes pris par tous les Etats membres, et il a notamment mentionné les engagements pris par la France de parvenir d’ici avril à présenter 4 milliards d’économies supplémentaires et de respecter pleinement le nouveau délai que la Commission et l’Eurogroupe proposent de lui donner pour corriger son déficit excessif. La France s’est aussi engagée à livrer en mai des plans plus détaillés visant à réformer son économie, a souligné le président de l’Eurogroupe.
La situation en Grèce a également été abordée par les ministres des Finances de la zone euro. Il s’agissait de faire le point suite à l’accord le 20 février dernier sur la prolongation du programme d’aide trouvé. Cet accord avait été confirmé le 24 février lors d’une conférence téléphonique qui avait suivi l’envoi par les autorités grecques d’une première liste de réformes qui reste à préciser en concertation avec les institutions créancières du pays.
D’après Jeroen Dijsselbloem, la discussion fut brève, et elle portait principalement "sur les procédures qui auraient dû être lancées après la décision", comme il l’a expliqué à la presse. "Nous nous sommes mis d’accord aujourd’hui sur le fait qu’il n’y a pas de temps à perdre", a-t-il indiqué avant d’annoncer le lancement des discussions entre les autorités grecques et les institutions dès le 11 mars prochain de façon à parvenir à une conclusion rapide de la mission de suivi en cours. Le président de l’Eurogroupe n’a pas caché une certaine impatience au sujet de "deux semaines passées à savoir qui allait rencontrer qui et où et dans quelle configuration", et il a clairement fustigé "une perte de temps" devant la presse. Il a donc choisi "une approche pratique", et les discussions avec les institutions vont avoir lieu à Bruxelles, tandis que les équipes techniques des institutions seront parallèlement reçues à Athènes. Pour rappel : un accord sur les mesures qui doivent être mises en œuvre par le nouveau gouvernement grec dans le cadre du programme doit être trouvé d’ici fin avril, ce qui constitue une première étape avant leur mise en œuvre et le versement des fonds prévus dans le cadre du plan d’aide.
Le ministre Pierre Gramegna, qui représentait le Luxembourg lors de cette réunion, s’est fait lui aussi l’écho d’un certain agacement à l’égard des tergiversations des autorités grecques depuis l’accord du 20 février dernier, faisant un parallèle sur les ondes de RTL Radio Lëtzebuerg entre leur attitude et la procession dansante d’Echternach, où la coutume veut que l’on avance de trois pas pour reculer de deux pas. Le ministre a ainsi souligné au micro de 100komma7 qu’il s’agissait désormais "d’agir et non plus de discuter". Le ministre luxembourgeois a toutefois salué sur RTL certains éléments positifs dans la liste détaillée de sept mesures transmise juste avant la réunion par le ministre grec des Finances à Jeroen Dijsselbloem. Comme le président de l’Eurogroupe, il a toutefois bien insisté sur le fait que cette liste devait encore être complétée.
Le commissaire Pierre Moscovici a souligné que "les dernières idées envoyées par le gouvernement grec" n’ont pas fait l’objet d’une discussion détaillée. "Ce n’est pas le rôle de l’Eurogroupe de le faire, car cela implique un travail d'abord technique qui est la responsabilité des institutions (…) avant qu'on revienne devant l'Eurogroupe", a-t-il précisé.
Les discussions techniques qui vont commencer sont "très importantes" aux yeux de Pierre Gramegna pour pouvoir se faire une idée précise de ce que pourront permettre d’économiser ou de gagner les mesures prévues, et donc savoir si le gouvernement grec pourra tenir les engagements pris dans le cadre du plan d’aide.
Les ministres ont aussi abordé la situation à Chypre et ils ont lancé un appel aux autorités chypriotes à mettre en œuvre la loi sur les saisies récemment suspendue par le parlement chypriote. Pierre Moscovici a souligné que l’entrée en vigueur de cette loi était "une précondition essentielle pour traiter efficacement le problème des prêts non productifs, qui représentent actuellement le principal défi de l’économie chypriote". Saluant les "impressionnants progrès réalisés au cours des deux dernières années", le commissaire estimerait fort dommage que ces progrès soient ralentis par cette seule question.
Les ministres ont enfin eu une discussion sur les réformes structurelles dans le secteur des services dans la zone euro. Jeroen Dijsselbloem a expliqué que la discussion avait porté sur les défis politiques liés à de telles réformes. "Un certain nombre de ministres ont fait part de leurs expériences, succès et échecs dans la lutte contre les intérêts particuliers et la réduction du fardeau d’une réglementation excessive", a rapporté le président de l’Eurogroupe. Plusieurs ministres ont ainsi évoqué des exemples d’allongement des heures d’ouverture des magasins, ou de suppression de restrictions inutiles dans l’accès à des professions réglementées comme le notariat ou la pharmacie, a-t-il encore expliqué à la presse avant d’annoncer que le sujet reviendrait à l’ordre du jour de l’Eurogroupe dans le courant de l’année.