Les députés européens ont appelé les États membres de l'UE à respecter l'objectif de consacrer 0,7 % de leur revenu national à l'aide publique au développement (APD) et à fixer un calendrier pour atteindre cet objectif d’ici 2020, dans une résolution adoptée le 19 mai 2015 en séance plénière. De plus, ils ont souligné la nécessité de mobiliser les ressources nationales de manière efficace dans les pays en développement en tant que source essentielle de financement, indique un communiqué du Parlement européen.
"Le Parlement envoie un message politique fort à la Commission, au Conseil et aux États membres concernant le rôle de premier plan et la responsabilité que l'UE devrait jouer dans les négociations de la troisième Conférence internationale sur le financement du développement qui se tiendra à Addis-Abeba", a déclaré Pedro Silva Pereira (S&D), auteur de la résolution non contraignante adoptée par 582 voix pour, 79 voix contre et 28 abstentions. Tous les six eurodéputés luxembourgeois ont voté en faveur du texte.
Si l’UE est le premier donateur mondial en ce qui concerne l’aide au développement, seulement sept Etats membres ont dépassé en 2014 l’objectif de 0,7 % auquel ils se sont engagés en 2005 (pour 2015), à l’exception des Etats qui ont rejoint l’UE en 2004 ou après qui ont souscrit à un objectif de 0,33 %. En 2014, le Luxembourg était le deuxième donateur en termes de RNB (1,07 %), derrière la Suède (1,1%). En 2014, l’APD des Etats membres a atteint 58,2 milliards d’euros, soit 0,42 % de son revenu national brut (RNB) et une hausse de 2,4 % par rapport à 2013.
L’Union européenne devrait affirmer son « rôle politique de premier plan" tout au long du processus de définition du cadre de développement durable et conserver son rang de principal donateur en termes d'aide au développement, affirme le Parlement dans la résolution. Il souligne que l’APD reste un instrument clé pour le financement du développement et demande aux États membres de réaffirmer leur engagement à consacrer 0,7 % de leur revenu national brut (RNB) à l'aide publique au développement (APD) – avec 50 % de l'APD et au moins 0,2 % du RNB réservés aux pays les moins développés.
Par ailleurs, les députés souhaitent que les États membres présentent des calendriers budgétaires pluriannuels pour passer à ces niveaux d'ici 2020 "en tenant compte des contraintes budgétaires", en regrettant « une certaine absence d'engagement concernant le calendrier des futurs objectifs financiers".
La mobilisation de ressources intérieures est plus prévisible et plus durable que l'aide étrangère et doit être une source importante de financement, affirme le texte. Il invite la Commission européenne à étendre son aide au renforcement des capacités dans les domaines de l'administration fiscale, de la gestion des finances publiques et de la lutte contre la corruption. Le Parlement appelle aussi l'UE et ses États membres à "combattre activement les paradis fiscaux, l'évasion fiscale et les flux financiers illicites".
Les députés précisent que "les règlementations internationales en matière d'impôt sur les sociétés devraient inclure le principe selon lequel les impôts doivent être payés à l'endroit où la valeur est extraite ou créée".
Les parlementaires rappellent que l'aide publique à elle seule n'est pas suffisante pour couvrir tous les besoins d'investissement dans les pays en développement et demandent à l'UE de mettre en place avec ces pays un cadre réglementaire qui "encourage des investissements plus responsables, plus transparents et plus justifiables contribuant au développement d'un secteur privé socialement engagé dans les pays en développement".
Quant à la troisième Conférence internationale sur le financement du développement, qui doit se tenir à Addis-Abeba (Éthiopie) du 13 au 16 juillet 2015, le Parlement européen appelle à la conclusion d'un accord « portant sur un cadre solide, transparent et accessible de surveillance et de responsabilité pour garantir une surveillance et un suivi efficaces des investissements et des progrès relatifs à des engagements et objectifs spécifiques". Il demande notamment à la Commission de « surveiller et de contrôler davantage ses programmes et projets de financement de l'aide et d'adopter les mesures qui s'imposent en cas de corruption ou de mauvaise gestion avérée".
Pour rappel, cette conférence est censée développer un programme de développement des Nations Unies pour l’après-2015 qui prend la suite des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) qui viennent à échéance en 2015. Il s’agit d’un des grands rendez-vous internationaux sous Présidence luxembourgeoise, comme l’a rappelé le ministre luxembourgeois de la Coopération et de l’Aide humanitaire, Romain Schneider, lors de la présentation des résultats des Assises de la coopération fin mars 2015. De plus, 2015 est l’Année européenne pour le développement.
L’eurodéputé luxembourgeois Charles Goerens (ALDE), membre de la commission du développement, a regretté lors du débat le fait que le calendrier dépendait des Etats membres et qu’une partie n’a toujours pas atteint l’objectif de 0,7 % du RNB auquel ils s’étaient accordés. Il a appelé à une aide plus prévisible pour permettre aux grands acteurs de l'aide publique au développement de « tabler sur une prévisibilité qui les autorise à prendre des engagements à plus long terme". Il a encore insisté sur l’importance du principe de la différenciation: « si nous voulons agir efficacement dans le domaine de l'aide publique au développement, il va falloir appliquer ce principe, que la Commission appelle de ses vœux et que nous avons soutenu, qui vise à rappeler à ceux qui génèrent, aujourd'hui, suffisamment de ressources pour subvenir à leurs propres besoins qu'ils le fassent, notamment les pays à revenus intermédiaires, afin que nous puissions concentrer notre aide sur ceux qui en ont cruellement besoin".