Les chefs d’Etat et de gouvernement des 28 Etats membres de l‘UE, réunis le 17 mars 2016 à Bruxelles pour un Conseil européen essentiellement consacré à la crise migratoire et à la négociation d’un accord avec la Turquie, ont adopté au cours de la soirée des conclusions sur l'emploi, la croissance et la compétitivité ainsi que sur le climat et l'énergie.
Le Conseil européen y approuve "les priorités stratégiques" recensées par la Commission européenne dans son examen de croissance présenté en novembre dernier dans le cadre du semestre européen 2016, à savoir : relancer l'investissement, poursuivre les réformes structurelles afin de moderniser nos économies et mener des politiques budgétaires responsables. "Les États membres intégreront ces priorités dans leurs prochains programmes nationaux de réforme et programmes de stabilité ou de convergence", indiquent les conclusions. Les chefs d’Etat et de gouvernement y prennent aussi "note de la consultation lancée par la Commission sur les questions sociales" et soulignent "l'importance du bon fonctionnement des marchés du travail et des systèmes de protection sociale". La Commission européenne avait en effet présenté le 8 mars dernier une première ébauche d’un "socle européen des droits sociaux" et lancé par la même occasion une vaste consultation publique à cet égard
Les chefs d’Etat et de gouvernement se sont aussi entendus pour examiner en juin les progrès réalisés dans le cadre des travaux menés en vue de l'achèvement de l'Union économique et monétaire.
Comme l’a indiqué le Premier ministre luxembourgeois, Xavier Bettel, à la sortie de la première partie de la réunion du Conseil européen, les conclusions mentionnent aussi "la situation difficile que connaît le secteur sidérurgique européen" dans un contexte de "surcapacité au niveau mondial". "Il importe de soutenir l’industrie sidérurgique car elle représente de n ombreux emplois sur le continent", a souligné le Premier ministre luxembourgeois. Ainsi, est-il inscrit dans les conclusions, "le Conseil européen invite le Conseil à examiner rapidement la communication de la Commission en vue de prendre des mesures résolues pour remédier à ce problème". La communication de la Commission proposant de mesures pour "sauvegarder l’industrie européenne" avait été présentée la veille et aussitôt été saluée par le gouvernement luxembourgeois.
"Un paragraphe sur l’agriculture a aussi été ajouté suite aux demandes française et luxembourgeoise", a aussi souligné Xavier Bettel en évoquant la crise que connaissent en Europe les secteurs laitier et porcin. "Le Conseil européen prend note de la situation des agriculteurs, notamment dans les secteurs laitier et porcin, qui pâtissent gravement de la chute des prix", est-il indiqué dans les conclusions et il "invite la Commission à agir rapidement sur la base des résultats de la session que le Conseil "Agriculture" a tenue le 14 mars". Le Conseil européen "suivra attentivement l'évolution de ce secteur, tellement important pour l'Europe", stipulent encore les conclusions.
Les conclusions mentionnent par ailleurs l’intention de la Commission de publier sous peu une communication relative à un plan d'action sur la TVA. Le Conseil européen s’y "félicite que la Commission ait l'intention d'inclure des propositions prévoyant une flexibilité accrue pour les États membres en ce qui concerne des taux réduits de TVA, qui leur donnerait la possibilité d'appliquer des taux nuls aux produits sanitaires". Une mention qui est une réponse directe aux vifs débats qui ont actuellement lieu au Royaume-Uni au sujet de la suppression de la "taxe tampon". Le taux de TVA sur les protections d’hygiène féminine est actuellement de 5 % au Royaume-Uni et fait l’objet d’une vive controverse. Or, en vertu de la directive de 2006 sur la TVA, pour abaisser ce taux de TVA à 0 %, le Royaume-Uni aurait besoin de l’accord des 28 à l’unanimité au Conseil. La question ne relève a priori pas directement du Conseil européen, et le fait que le sujet soit mentionné dans les conclusions s’explique par la campagne qui a lieu actuellement au Royaume-Uni en vue du référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l’UE qui est prévu le 23 juin prochain.
Enfin, et c’est par ce point que le Premier ministre Xavier Bettel avait commencé, les conclusions contiennent aussi un paragraphe consacré au climat et à l’énergie. Il y est fait référence à "l’après Paris" et le Conseil européen s’y "réjouit à la perspective de la signature de l'accord de Paris le 22 avril à New York et souligne que l'Union européenne et ses États membres doivent être en mesure de ratifier l'accord dans les meilleurs délais et à temps pour y être parties dès son entrée en vigueur". Mais par la même occasion, le Conseil européen encourage aussi "les législateurs à poursuivre en priorité les travaux sur les propositions visant à renforcer la sécurité énergétique de l'UE", liant ainsi intrinsèquement les deux dossiers, comme une façon de concilier les ambitions de certains Etats membres et les réticences d’autres sur la question des engagements de l’UE en matière de climat.
Les conclusions mentionnent la détermination de l’UE "à réduire les émissions de gaz à effet de serre sur son territoire, ainsi qu'à accroître la part des énergies renouvelables et à améliorer l'efficacité énergétique, comme il en est convenu en octobre 2014". "L'adaptation de la législation aux fins de la mise en œuvre de ce cadre demeure une priorité", précisent les conclusions du Conseil européen qui invite la Commission à "présenter rapidement toutes les autres propositions pertinentes à cette fin, de manière à engager sans tarder le processus législatif". Une formulation qui semble laisser peu de place aux revendications exprimées le 4 mars dernier par quelques ministres de l’Environnement, parmi lesquels Carole Dieschbourg, pour que les objectifs de l’UE soient revus à la hausse dans la perspective de la mise en œuvre de l’accord et de son mécanisme de révision.