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Entreprises et industrie - Commerce extérieur
La Commission européenne présente des mesures pour sauvegarder l’industrie sidérurgique européenne saluées par le Luxembourg
16-03-2016


Sourc. www.luxembourg.public.luLe 16 mars 2016, la Commission européenne a présenté une communication intitulée "Sidérurgie : préserver l'emploi et une croissance durables en Europe", visant à la sauvegarde de l'industrie sidérurgique européenne. Elle comporte des mesures destinées à surmonter les importants défis à court et à moyen termes auxquels cette industrie est confrontée, défis "suscités par la surcapacité mondiale, une augmentation spectaculaire des exportations et une vague sans précédent de pratiques commerciales déloyales", selon le communiqué de pressediffusé par la Commission européenne à cette occasion.

Le Luxembourg salue le nouveau plan d’action par lequel "la Commission témoigne de sa volonté pour préserver un tissu industriel compétitif et diversifié en Europe"

Pour le Vice-Premier ministre luxembourgeois, ministre de l’Économie, Étienne Schneider, le plan d’action de la Commission "est le résultat des efforts de la Présidence luxembourgeoise du second semestre 2015". Il rappelle qu'il avait convoqué le 9 novembre 2015 une réunion extraordinaire des ministres européens de l’Économie pour faire le point sur les graves difficultés que rencontre l’industrie sidérurgique - notamment l’importante surcapacité de production au niveau mondial - et pour prendre les décisions nécessaires. "Nos démarches entamées sous la Présidence luxembourgeoise auprès de la Commission européenne pour soutenir le secteur de l’acier portent leurs fruits. Moyennant le nouveau plan d’action, la Commission témoigne de sa volonté pour préserver un tissu industriel compétitif et diversifié en Europe", at-til déclaré.

Étienne Schneider estime par ailleurs qu’il est primordial de rendre les procédures anti-dumping plus efficaces et d’engager des actions avec des partenaires comme la Chine, l’Inde ou la Russie pour s’attaquer aux origines de la surproduction mondiale qui pèse sur les prix du marché de l’acier. "La sidérurgie occupe une place stratégique dans la plupart des chaînes de valeur industrielles, telles que l’automobile ou la construction. Partant, nous devons rapidement mettre en œuvre le plan d’action", a-t-il conclu.

Mieux se défendre face aux pratiques commerciales déloyales

La Commission souligne l'intérêt de mieux se défendre face aux politiques commerciales déloyales. Elle rappelle qu'elle a déjà mis en place un nombre record de 37 mesures antidumping et antisubventions relatives à des produits sidérurgiques. 16 d'entre elles concernaient des importations d'acier en provenance de Chine.

Afin de rendre ce type d'action plus efficace, la Commission européenne pense pouvoir réduire de deux mois la longueur du processus menant à l'adoption de mesures antidumping, comme la Présidence néerlandaise du Conseil de l'UE, l'y avait conviée dans ses conclusions publiées à l'issue du Conseil Compétitivité, du 29 février.

Pour ce faire, elle compte exploiter les "marges disponibles" pour adopter des mesures provisoires, notamment par un recours accru aux procédures écrites, et, dans le cas de situations d'extrême urgence, imposer de telles mesures après en avoir informé les États membres. En ajoutant à cela une optimisation de ses procédures internes, "une approche plus stricte en ce qui concerne le traitement des demandes des délais de réponse aux questionnaires et  le regroupement des auditions, la Commission pense pouvoir gagner "au moins un mois" de procédure. Un deuxième mois de procédure pourrait être gagné en ajustant les délais intermédiaires du processus "tels que ceux qui sont impartis aux fins de l'échantillonnage des parties intéressées ou de la réaction des parties à la divulgation des faits et des considérations essentiels", et en simplifiant le processus de consultation des États membres.

Moderniser les instruments de défense commerciale

La Commission indique ces deux dernières mesures dans son paragraphe réservé à la modernisation des instruments de défense commerciale. Elle les voit comme des mesures complémentaires à prendre en parallèle au paquet de modernisation des instruments de défense commerciale (IDC), qui est bloqué depuis novembre 2014 au Conseil, et à l'adoption duquel la Commission européenne enjoint les Etats membres. "Il est aujourd'hui grand temps de joindre les actes à la parole et d'adopter le paquet modernisation", lit-on dans sa communication.

Comme mesures supplémentaires, la Commission nomme également l'application des éléments justifiant une suppression de "la règle du droit moindre" au secteur sidérurgique et, plus généralement, aux situations dans lesquelles le marché du pays exportateur subit d'importantes distorsions. Concernant le calcul de la marge de préjudice, il pourrait être nécessaire de mieux définir le bénéfice cible afin de garantir une élimination en bonne et due forme du préjudice, dit-elle. En outre, la Commission va proposer un système de surveillance préalable pour les importations de produits sidérurgiques, par le biais d'un système de certificats d'importation automatiques sur les produits importés, dès lors que ceux-ci menacent les producteurs européens.

Enfin, la Commission européenne renvoie également les parties prenantes à la consultation publique qu'elle a lancée le 10 février 2016 au sujet de l'octroi du statut d'économie de marché à la Chine, s'ils veulent contribuer à la définition de certaines mesures de défense commerciale.

S'attaquer aux causes de la surcapacité mondiale

Dans sa communication, la Commission rappelle que le ralentissement économique constaté en Chine et dans d'autres économies émergentes a eu une incidence négative sur la demande d'acier à l'échelle mondiale depuis 2014. En outre, les capacités de production non utilisées de certains pays tiers, et notamment de la Chine, ont augmenté de manière spectaculaire. La surcapacité chinoise est estimée au double de la production annuelle de l'UE.

La Commission compte également engager des actions avec ses partenaires pour s'attaquer directement aux causes de la surproduction mondiale. Ainsi, elle entend ouvrir le dialogue dans le cadre de rencontres bilatérales avec l'Inde, la Russie, la Turquie et les États-Unis, comme elle l'a déjà fait avec la Chine et le Japon en mars 2016, ainsi qu'au niveau multilatéral, dans le cadre du comité "Acier" de l'OCDE. Enfin, la Commission compte demander à la Chine de respecter ses obligations en matière de transparence et de notification des subventions auprès de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et soulèvera cette question de manière proactive dans le cadre de l'examen, en juin 2016, des politiques commerciales de la Chine par les pairs au sein de l'OMC. Elle compte en faire autant dans le cadre du G20.

La Commission souligne qu'elle encourage les pays tiers à "appliquer des stratégies appropriées conformes aux besoins actuels du marché", notamment par la négociation de règles applicables au comportement des entreprises publiques et aux subventions accordées dans le cadre des accords de libre-échange. "Son intention de négocier un chapitre consacré à l'énergie et aux matières premières dans chaque accord commercial revêt un intérêt particulier pour la sidérurgie et d'autres industries à forte intensité énergétique", dit-elle.

Investir dans la recherche, les ressources humaines et l'efficacité énergétique

Pour la Commission européenne, la sauvegarde de l'industrie européenne dépend également fortement du niveau et de la qualité des investissements qui y seront réalisés. "Nous devons redoubler d'efforts pour aider le secteur sidérurgique et d'autres industries à forte intensité énergétique à s'adapter, à innover et à livrer une concurrence fondée sur la qualité, une technologie de pointe, une production efficiente et une main-d'œuvre hautement qualifiée", a déclaré Jyrki Katainen, vice-président chargé de l'emploi, de la croissance, de l'investissement et de la compétitivité, rapporte le communiqué de la Commission.

En lien avec les décisions du Conseil extraordinaire sur la crise sidérurgique du 9 novembre 2015, la Commission veut consolider les investissements dans la recherche et le développement dans le secteur, en exploitant les possibilités du Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS), du programme Horizon 2020 et des Fonds structurels et d'investissements.

"En tant qu'économie sociale de marché, l'Europe ne peut – et ne veut – affronter la concurrence sur le terrain des bas salaires ou de la détérioration des conditions de travail et des normes sociales. L'Europe doit opposer à ses concurrents l'innovation, des technologies de pointe, une qualité supérieure et une production efficiente", dit la communication de la Commission. Ainsi, pour conserver une industrie sidérurgique moderne et compétitive, "il faut disposer d'une main-d'œuvre bien formée et qualifiée", dit-elle.

L'investissement doit également permettre de répondre à la question cruciale de l'énergie. Certes, la diminution récente des prix de l'énergie a réduit la part des coûts énergétiques dans les coûts de production. Mais ces prix pourraient repartir à la hausse. Or, "des coûts énergétiques élevés et l'évolution des conditions du marché exigent des industries à forte  intensité énergétique qu'elles s'adaptent et qu'elles innovent pour garantir leur viabilité et leur durabilité à long terme", lit-on dans la communication. Ainsi, la Commission propose-t-elle d'encourager, à l'aide des fonds européens disponibles, une plus grande efficacité énergétique de l'industrie sidérurgique et promouvoir une plus grande compétitivité des prix de l'énergie en tirant profit du potentiel du marché unique et de la coopération régionale. Des mesures seront prises dans le cadre de l'Union de l'énergie, notamment sur l'organisation du marché de l'électricité, la gouvernance, les sources d'énergie renouvelables et l'efficacité énergétique, dit-elle.

"L'industrie sidérurgique pourra prospérer grâce à des politiques ciblées dans des domaines tels que la concurrence, l'énergie, l'échange de quotas d'émissions et l'économie circulaire", poursuit la Commission. Cette dernière renvoie à ce sujet aux règles révisées en matière d'aides d'État pour la RDI qui autorisent le soutien public destiné à inciter les utilisateurs à haute intensité d'énergie à développer des solutions innovantes, comme les technologies de captage et d'utilisation du carbone.  Dans ce contexte, la Commission précise qu'elle agit tant sur le plan multilatéral, dans le cadre de l'OCDE et de l'OMC, que sur le plan bilatéral, par ses accords de libre-échange, pour obtenir "une transparence accrue pour l'ensemble des subventions, un mécanisme de consultation et de la discipline vis-à-vis de l'interdiction des garanties illimitées et des aides à la restructuration des entreprises non viables".

Un projet de système d'échange de quotas d'émissions favorable

"Le coût plus faible du carbone, qui s'explique par des politiques climatiques moins ambitieuses, procure encore un avantage concurrentiel déloyal à divers producteurs de pays tiers vis-à-vis de leurs concurrents européens", constate la Commission. Malgré l'accord de la COP21, le risque de désavantages concurrentiels demeure. Par conséquent, dans la récente proposition de révision du système d'échange de quotas d'émission, la Commission propose l'allocation de quotas à titre gratuit de telle manière que les industries à haute intensité énergétique, dont le secteur sidérurgique, reçoivent une aide appropriée et que les acteurs les plus performants continuent d'être récompensés.

Enfin, la communication de la Commission mentionne le recyclage des matières premières comme moyen de réduire les coûts de production et l'impact sur l'environnement. "Il offrira de nouveaux débouchés, encouragera le développement de produits et créera des emplois", dit-elle.  Dans le paquet "Economie circulaire", la Commission a proposé d'augmenter les taux de recyclage des déchets, de mettre en place davantage de systèmes de tri des déchets de construction et de démolition et d'améliorer le fonctionnement des régimes de responsabilité élargie des producteurs.

Eurofer déplore l'absence de mesures réduisant les charges environnementales et de déclaration sur l'octroi du statut d'économie de marché à la Chine

Dans un communiqué de presse, l'organisation patronale Eurofer, qui avait organisé le 15 février 2016, une manifestation contre le dumping  et l'éventuel octroi du statut d'économie de marché à la Chine, a salué la volonté de la Commission d'accélérer les possibilités de réagir à la concurrence déloyale. Pour l'adaptation des mesures de protection commerciale, les USA doivent être le point de comparaison, dit son directeur général d'Eurofer, Axel Eggert, qui cite un délai entre le constat et la prise de décision de 4 mois et demi et des droits anti-dumping bien plus élevés que dans l'UE, en l'absence de l'application d'une "règle du droit moindre".

La Commission ne doit "pas céder face à des pays qui continuent à pratiquer le dumping sur le marché européen", met en garde Eurofer qui déplore que la Commission n'ait pas mentionné dans sa communication la nécessité pour la Chine de remplir ses obligations envers l'OMC avant que le statut d'économie de marché ne lui soit accordé.

Eurofer regrette également que la Commission "continue à dénier le problème du fardeau des coûts réglementaires unilatéraux" imposés par l'UE à l'industrie, lesquels ne doivent pas être  supportés par ses concurrents au niveau mondial. "La Commission a manqué l'occasion de déclarer clairement que sa proposition sur un système européen d'échange de quotas évite de mener à des coûts, au moins au niveau des installations sidérurgiques les plus efficaces de l'UE". Sur ce sujet, Eurofer dénonce l'incohérence des objectifs de l'UE pour la compétitivité, la croissance et l'emploi, s'il n'y a pas la volonté d'assurer des conditions égales de concurrence au niveau mondial, même pour les entreprises les plus efficaces en Europe. "La conséquence est la fuite permanente d'investissements et des emplois, ainsi que des importations croissantes de produits avec une empreinte environnementale beaucoup plus élevée."