Le 25 novembre 2009, le Parlement européen a adopté, par 516 voix pour, 92 voix contre et 70 abstentions, une résolution sur la stratégie de l'Union européenne dans la perspective de la conférence de Copenhague sur le changement climatique. Dans cette résolution, les députés européens appellent à un accord ambitieux et juridiquement contraignant lors du sommet de Copenhague en décembre. Cet accord devrait comporter des objectifs de réduction des émissions de CO2, des engagements de financement et des sanctions en cas de non-respect de ces engagements. Les eurodéputés luxembourgeois Claude Turmes (Verts) et Charles Goerens (ALDE) ont voté pour cette résolution, tandis que Frank Engel, Astrid Lilling, Georges Bach (PPE) et Robert Goebbels (S&D) se sont abstenus.
Les députés européens estiment que les chefs de gouvernement de l'Union européenne doivent faire preuve de leadership politique pour faire du sommet sur le changement climatique de Copenhague un succès. Les générations futures risquent de ne pas pouvoir maîtriser le changement climatique si l'action mondiale est encore retardée, soulignent-ils dans leur résolution.
Selon le Parlement européen, le sommet de Copenhague devrait au minimum parvenir à un accord contraignant sur les objectifs et le financement des mesures d'atténuation de la part des pays industrialisés et établir un processus formel pour aboutir, au début de l'année prochaine, à un accord global sur le climat pour l'après 2012. Cet accord devrait prendre effet le 1er janvier 2013.
A quelques semaines du sommet, les eurodéputés appellent les chefs d'État et de gouvernement à faire figurer un accord international sur le changement climatique après 2012 au premier rang des priorités et à faire preuve d'initiative politique en la matière.
Dans leur résolution, les députés affirment que l'accord international devrait veiller à ce que :
les pays développés réduisent leurs émissions de gaz à effet de serre dans la partie supérieure d'une fourchette comprise entre 25 % et 40 % d'ici 2020 par rapport à 1990.
les pays en développement, pris dans leur ensemble, limitent la croissance de leurs émissions de 15 % à 30 % en-deçà du niveau qui serait atteint dans le scénario du statu quo. Toutefois, étant donné leur poids économique, la Chine, l'Inde et le Brésil devraient s'engager à des objectifs similaires à ceux des pays industrialisés.
les pays développés aient la responsabilité de fournir un soutien financier et technique suffisant, durable et prévisible, aux pays en développement. Un besoin de financement total de 5 à 7 milliards d'euros par an est estimé pour la période comprise entre 2010 et 2012.
la contribution collective de l'Union européenne aux efforts d'atténuation et aux besoins d'adaptation des pays en développement ne soit pas inférieure à 30 milliards d'euros par an d'ici 2020.
les objectifs en matière de réduction des émissions aussi bien que les engagements en matière de financement fassent l'objet d'un régime de contrôle renforcé, comprenant un mécanisme d'alerte précoce et un régime de sanctions.
les futurs mécanismes de compensation prévoient des normes strictes de qualité des projets, de manière à éviter que les pays développés ne s'emparent des possibilités peu coûteuses de réduction des émissions aux dépens des pays en développement et pour garantir que de tels projets répondent à des réductions fiables, vérifiables et réelles des émissions.
l'aviation et la navigation internationales soient intégrées dans un accord avec les mêmes objectifs contraignants que les autres secteurs industriels et qu'au moins 50 % des quotas dans ce domaine soient mis aux enchères.
un soutien financier important soit fourni aux pays en développement pour qu'il soit mis un terme, d'ici 2020 au plus tard, à la déforestation tropicale brute, et que soit créé un mécanisme mondial pour le carbone forestier dans le cadre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques.
En parallèle, les députés soulignent qu'un accord à Copenhague pourrait inciter à lancer un "New Deal durable" qui permettrait de relancer une croissance économique durable, de promouvoir les technologies vertes, les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique, de réduire la consommation énergétique, et de garantir la cohésion sociale.
En ce qui concerne l'apport d'autres pays industrialisés à la conférence de Copenhague, les députés prient instamment les États-Unis de conférer force contraignante aux objectifs fixés pendant la campagne électorale et de donner ainsi un signal fort. Ils soulignent aussi qu'il est extrêmement important pour l'Inde de faire une contribution, reconnaissent l'engagement du Japon de réduire ses émissions de 25 % d'ici 2020 et se félicitent des signaux positifs en provenance de Chine, à la lumière de ces développements.
"La politique climatique est un moteur d’innovation qui peut offrir de nouvelles perspectives de croissance aux entreprises. Dans ce contexte, je salue l’objectif de l’UE de vouloir réduire les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2020 de 20 % par rapport à 1990", a expliqué Astrid Lulling dans le Luxemburger Wort du 26 novembre 2009. "Cependant, sans accord global contraignant sur les objectifs de réduction, l’UE ne peut pas assumer d’autres charges de politique climatique". L’eurodéputée a tenu à souligner que l’UE est responsable pour 11 % des émissions globales de CO2 et qu’elle ne peut pas réduire les émissions mondiales par ses propres moyens. Et Astrid Lulling, qui s’est abstenue lors du vote, de conclure : "Nous sommes favorables à une politique climatique responsable."
Abordant le fait que l’UE veut convaincre les économies émergentes et les pays en voie de développement par des aides financières de réduire leurs émissions, et que ni les modalités, ni le volume de ces transferts financiers ne soient encore définis, Frank Engel a souligné que "l’UE ne peut pas promettre de verser des milliards d’euros à des pays en voie de développement, si on ne sait pas à partir de quand, sur quelle période, à qui et combien d’argent devrait être payé".
Pour Robert Goebbels, "comme à son habitude, le Parlement européen avec cette résolution, fait preuve de bons sentiments sans prendre en compte les réalités. L’Union européenne émet quelques 11% des émissions mondiales de CO2. Elle ne peut pas donner à la fois l’exemple et payer en sus pour le reste du monde." Et le député socialiste de conclure : "Il n’est pas logique de restreindre les Etats membres dans l’utilisation de mécanismes de développement propre (CDM), pourtant prévus par Kyoto, et de demander en même temps 30 milliards d’euros par an d’aides aux pays en voie de développement, sans critères et sans discernement, pour ne parler que d’une seule incongruité de la résolution."
En réaction au vote, Greenpeace Luxembourg s'est montré scandalisé par les abstentions des quatre eurodéputés luxembourgeois. Dans un communiqué du 27 novembre 2009 titré "La honte : Les députés européens luxembourgeois Bach, Engel, Lulling et Goebbels ne s'engagent pas pour Copenhague!", l'ONG a fermement condamné "le comportement des quatre députés européens issus de la majorité gouvernementale qui brouille le message du Luxembourg en matière de lutte contre le changement climatique". Greenpeace a demandé au CSV et au LSAP "de rappeler à l’ordre leurs élus européens et d’accorder leurs violons avec leurs représentants au parlement européen pour éviter à l’avenir de ternir encore plus l’image du Luxembourg sur la scène internationale en matière de politique climatique".
"Au lieu de démontrer au niveau international que le Luxembourg est prêt à prendre ses responsabilités en matière de protection du climat et donc de soutenir des mesures ambitieuses relatives à la réduction des gaz à effet de serre et au financement des mesures d'atténuation et adaptation au changement climatique dans les pays en développement, les représentants du CSV et du LSAP au Parlement européen entretiennent l'image du Luxembourg comme étant un pays qui continue à bloquer tout progrès en matière de protection du climat", a déclaré Martina Holbach, chargée de campagne de Greenpeace Luxembourg.
L'ONG a par ailleurs tenu à souligner que "même dans leurs propres fractions au Parlement européen, ces quatre députés se trouvent plutôt isolés. Dans le groupe du parti populaire européen, 193 députés ont soutenu la résolution tandis que 29 se sont abstenus, dont les trois luxembourgeois Engel, Bach et Lulling. Il en va de même pour le groupe de l'Alliance Progressiste des Socialistes & Démocrates au Parlement européen, où 167 députés ont soutenu la résolution tandis que seulement 5 se sont abstenus, dont Robert Goebbels."
De plus, Greenpeace a dénoncé "les votes pro-énergie nucléaire du Parlement européen soutenu par 5 des 6 députés luxembourgeois (tous à l’exception de Claude Turmes) qui soutiennent le rôle de l'énergie nucleaire comme une partie importante du futur mix énergétique et l’intégration de l'énergie nucléaire dans les mécanismes du développement propre".
"Greenpeace se demande quels intérêts ces députés européens défendent? Se soucient-ils des citoyens et citoyennes au Luxembourg et de l’avenir de notre planète ou défendent-ils les intérêts de l'industrie des énergies fossiles et nucléaire?", a ajouté Martina Holbach.
Rappelant que "la semaine passée, la Chambre des députés a adopté une motion invitant le gouvernement à soutenir sur le plan international l'adoption à Copenhague d'un accord suffisamment ambitieux et efficace, juridiquement contraignant et avec des objectifs de réduction ambitieux (...)", Greenpeace exige du CSV et du LSAP qu’ils se démarquent de "l'attitude honteuse de leurs représentants au Parlement européen". Et de conclure qu'"il est inacceptable que le Luxembourg soit représenté au niveau européen par des personnes qui sont prêtes à saboter toute politique progressive de l'UE en matière de protection du climat."