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Justice, liberté, sécurité et immigration
Dans sa réponse à une question parlementaire de Fernand Kartheiser, Nicolas Schmit explique comment s’applique le principe selon lequel un citoyen de l’UE doit disposer de "ressources suffisantes" pour un séjour de plus de 3 mois
26-09-2012


Le 26 juillet 2012, le député Fernand Kartheiser (ADR) adressait à la ministre de la Famille et de l’Intégration et au ministre de l’Immigration une question parlementaire portant sur les conditions de séjour d’un citoyen de l’UE sur le territoire luxembourgeois. La loi du 29 août 2008 portant sur la libre circulation des personnes et l'immigration prévoit en effet qu'un citoyen de l'Union européenne souhaitant séjourner sur le territoire du Grand-Duché pour une durée supérieure à trois mois doit disposer pour lui et sa famille "de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale". (Art. 6). Par ailleurs il est précisé qu'une personne ne respectant pas ces conditions peut "faire l'objet d'une décision de refus de séjour, d'un refus de délivrance ou de renouvellement d'une carte de séjour ou d'un retrait de celle-ci et, le cas échéant d'une décision d'éloignement" (Art. 25).

Une question qui est posée dans un contexte où l’on observe avec la crise un afflux au Luxembourg de ressortissants de pays de l’UE où la crise se fait sentir particulièrement fort. Lorsque le CLAE avait abordé le sujet lors d'une table ronde en février dernier, Sylvain Wagner, du Ministère de l’Immigration, avait d’ailleurs rappelé les règles conditionnant la libre circulation des personnes. Entre temps, le débat a été thématisé à la Chambre des députés.

Il est aussi intéressant de relever que cette question parlementaire a été rédigée quelques jours à peine avant la publication sur France 24 d’un article d’Aude Mazoue selon lequel la Belgique aurait procédé à l’expulsion de 1224 chômeurs européens depuis début 2012. Pour avoir perçu plus de trois mois d'allocations chômage, Français, Roumains, Italiens ont ainsi été reconduits à la frontière, leurs titres de séjour ayant été confisqués. Le gouvernement belge s’est appuyé sur la directive européenne de 2004 qui autorise chaque État membre à mettre un terme aux aides sociales d’un citoyen européen des lors qu’il constitue une "charge déraisonnable" pour le système d’aide sociale de la nation. "Pour débusquer les "gêneurs", l’Office des étrangers convoque les ressortissants de l’Union européenne bénéficiaires du revenu d’intégration sociale (RIS) au motif d’examiner leur situation. Les ressortissants de l’Union sont alors invités à présenter leur carte de séjour qui est confisquée avant d'être priés de quitter le territoire belge", rapporte Aude Mazoue dans cet article.

Fernand Kartheiser posait quatre questions précises auxquelles le ministre de l’Immigration, Nicolas Schmit, a répondu le 24 septembre 2012. Europaforum rapporte ici les questions et les réponses.

1) Comment faut-il interpréter les notions de "ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale" (Art. 6 de la loi du 29 août 2008 portant sur la libre circulation des personnes et l'immigration) et de "charge déraisonnable pour le système d'assistance sociale" (Art. 24, paragraphe (1) de la même loi) ? S'agit-il de notions quantifiables reposant sur des critères précis ?

La notion de "ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale" est précisée par l'article 2, paragraphe (1) du règlement grand-ducal modifié du 5 septembre 2008 définissant les critères de ressources et de logement prévues par loi du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration qui dispose que "les ressources suffisantes exigées en vertu de l'article 6, paragraphe (1), points 2 et 3 et de l'article 18 de la loi sont appréciées en tenant compte de la situation personnelle de la personne concernée. En aucun cas, le montant exigé ne peut excéder le montant du revenu minimum garanti défini par la loi modifiée du 29 avril 1999 portant création d'un droit à un revenu minimum garanti".

En ce qui concerne la notion de "charge déraisonnable pour le système d'assistance sociale", l'article 24, paragraphe (4) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration dispose que "la charge pour le système d'assistance sociale est évaluée en prenant notamment en compte le montant et la durée des prestations sociales non contributives qui ont été accordées, ainsi que la durée du droit de séjour".

Les deux notions sont donc quantifiables et reposent sur des critères précis, conclut le ministre.

2) Dans quelle mesure le fait de percevoir des prestations sociales non contributives compte-t-il parmi les critères retenus ? Le cas échéant, est-il possible d'avoir des précisions quant à la nature des données échangées entre le Fonds national de solidarité ou d'autres institutions et la Direction de l'Immigration ?

La perception de prestations sociales non contributives par un citoyen de l'Union ou un membre de sa famille est signalée par le Fonds national de solidarité à la Direction de l'Immigration. La Direction de l'Immigration est informée des sommes perçues mensuellement par la ou les personnes concernées.

Cette communication de données se fait en application de l'article 138 de la loi du 29 août 2008 précitée, de même que du règlement grand-ducal modifié du 26 septembre 2008 portant création des traitements de données à caractère personnel nécessaires à l'exécution de la loi du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration et déterminant les données à caractère personnel auxquelles le ministre ayant l'immigration dans ses attributions peut accéder aux fins d'effectuer les contrôles prévus par la loi.

3) Des ressortissants de l'Union européenne ont-ils déjà fait l'objet de l'une des mesures visées à l'article 25, paragraphe (1) de la loi citée ci-dessus depuis l'entrée en vigueur de celle-ci ? Si oui, combien se sont vu refuser la délivrance d'une carte de séjour, combien se sont vu refuser le renouvellement de leur carte ou se sont vu imposer le retrait de celle-ci et combien ont fait l'objet d'une décision d'éloignement ? Le cas échéant, de quels pays ces ressortissants sont-ils originaires et y a-t-il eu une évolution significative au fil des années ?

Des citoyens de l'Union se sont déjà vus retirer leur droit de séjour conformément à l'article 25, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008.

On ne peut cependant pas parler d'un refus de "délivrance d'une carte de séjour" ou d'un refus de "renouvellement de leur carte" ou encore du "retrait" de celle-ci, étant donné que les cartes en question sont réservées aux membres de famille d'un citoyen de l'Union qui sont ressortissants de pays tiers. Le citoyen de l'Union lui n'est obligé qu'à procéder à une déclaration d'enregistrement auprès de la commune de sa résidence. Une attestation d'enregistrement lui est délivrée s'il remplit les conditions prévues par l'article 6 de la loi du 29 août 2008.

Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 29 août 2008 en date du 1er octobre 2008, un total de 110 retraits du droit de séjour ont été effectués. Ces décisions n'ont cependant pas été accompagnées d'une décision d'éloignement, permettant ainsi aux personnes concernées de régulariser leur situation en matière de droit de séjour en remplissant de nouveau les conditions de l'article 6.

Des relevés annuels relatifs à la nationalité des personnes concernées n'ont pas été établis.

4) Les ressortissants de l'UE visés par les mesures précisées ci-dessus ont-ils la possibilité de s'expliquer sur leur situation avant qu'une décision administrative ne soit prononcée de manière définitive ? Le cas échéant, de combien de temps disposent-ils ? Quelles sont les procédures?

En application de la procédure administrative non contentieuse, le citoyen de l'Union concerné est dans un premier temps informé de l'intention du ministre de retirer son droit de séjour, tout en étant invité à prendre position dans le délai minimum de 8 jours prévu par cette procédure.