Principaux portails publics  |     | 

Economie, finances et monnaie - Marché intérieur
Adopté par le Conseil européen, le Mécanisme de surveillance unique (MSU) devient réalité
15-10-2013


frieden-barnier-eurogroupe-131014Sans discussion et à l’unanimité, le Conseil ECOFIN, réuni le 15 octobre 2013 à Luxembourg, a adopté les règlement créant le mécanisme de surveillance unique (MSU) pour la surveillance des banques et des autres institutions de crédit. C’est l’achèvement de la première étape dans le développement d’une Union bancaire, en faveur de laquelle le Conseil européen a lancé un appel le 29 juin 2012.

Le règlement confiant à la Banque centrale européenne des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de contrôle prudentiel des établissements de crédit, adopté par le Conseil ECOFIN, avait fait l’objet d’une accord entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission en première lecture le 19 mars 2013. Le 22 mai suivant, les eurodéputés avaient conditionné leur feu vert définitif à un renforcement de la responsabilité démocratique de la BCE par le biais d’un accord institutionnel. Ils l’avaient finalement donné le 12 septembre 2013, après avoir obtenu une grande liberté d'accès aux informations, et notamment aux dossiers complets des réunions du comité de surveillance, ainsi que la participation du comité de surveillance à des auditions régulières devant les eurodéputés.

"Ces nouvelles règles aideront à construire un secteur financier stable, à restaurer des conditions de crédit équitables à travers l’UE et à assurer que les banques, et non les contribuables, paient pour leurs propres erreurs", a dit le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, selon une déclaration officielle.

"C’est un pas en avant mémorable : le départ d’une nouvelle période dans la supervision des banques de la zone euro", a pour sa part déclaré le commissaire européen en charge du Marché intérieur, Michel Barnier. "Nous sommes face à de nombreux défis mais je suis confiant que nous les atteindrons. La crédibilité du système bancaire est en jeu."

Le Mécanisme unique de surveillance forme le premier des trois piliers qui viendront soutenir l’architecture de l’Union bancaire, qui doit assurer la stabilité financière de la zone euro, les deux autres piliers ayant trait à la résolution des défaillances et au dépôt de garantie.

Le fonctionnement du MSU

L’établissement du MSU est "une précondition pour permettre au Mécanisme européen de stabilité de pouvoir recapitaliser les banques directement, tels que décidé par les chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro, en juin 2012", lit-on dans le communiqué de presse publié par le Conseil. "La recapitalisation directe permettra de casser le cercle vicieux entre dettes bancaires et dettes souveraines – qui fut un fait marquant de la crise de la dette en Europe", souligne aussi e communiqué de presse.

La BCE sera responsable du fonctionnement général du MSU, et donc de la surveillance de plus de 6000 banques de la zone euro élargie. Elle œuvrera en coopération étroite avec les autorités nationales de surveillance nationales. La BCE et les autorités de supervision nationales des Etats membres seront représentés au sein d’un comité de surveillance. Ce comité sera créé de manière autonome au sein de la BCE, pour séparer les fonctions monétaires de la tache de supervision, afin d’éviter les conflits d’intérêt potentiels entre les objectifs de politique monétaire et de supervision prudentielle.  Ces nouveaux pouvoirs conférés à la BCE deviendront réalité en octobre 2014.

La BCE aura la surveillance directe de banques ayant des actifs supérieurs à plus de 30
milliards d’euros ou constituant au moins 20 % du PIB de leur pays d’accueil mais aussi des banques qui ont demandé ou reçu une assistance financière directe par la Facilité européenne de stabilité financière (FESF) ou le Mécanisme européen de stabilité (MES). Soit pour le moment la surveillance directe de 130 banques, représentant 85 % de la capitalisation du marché de la zone euro élargie. Le membre du directoire de la BCE, Jörg Asmussen  a déclaré que 1 000 personnes travailleront dans l’autorité de surveillance, dont 700 superviseurs, rapporte le Tageblatt.

Les superviseurs nationaux resteront en charge de missions telles la protection des consommateurs, le blanchiment d’argent, les services de paiement. Ils exerceront également la surveillance sur les banques de moindre importance mais peut décider à tout moment de superviser directement une ou plusieurs institutions de crédit pour assurer l’application cohérente de hauts standards de contrôle.

Les Etats membres ne faisant pas partie de la zone euro peuvent participer au MSU par  des accords de coopération entre leur organe national de surveillance et la BCE, moyennant quoi ils pourront avoir des droits complets et égaux aux Etats de la zone euro au sein du comité de surveillance.

Le rôle redéfini de l'Autorité bancaire européenne

L’institution du Mécanisme de surveillance unique a également provoqué la modification du fonctionnement de l’Autorité bancaire européenne (EBA) dont le règlement modifié fut adopté lui aussi par le Conseil ECOFIN le 15 octobre 2013. 

L’autorité bancaire garde sa compétence pour le développement d’une règlementation prudentielle uniforme pour l’industrie bancaire et est chargée d’assurer la convergence et la cohérence dans les pratiques de surveillance. L'EBA assurera aussi que des stress-test réguliers seront effectués pour évaluer la résilience des banques européennes.

Toutefois, le règlement de fonctionnement de l’Autorité européenne de surveillance est amendé, pour ce qui est des modalités de vote en son sein, afin d’assurer une prise de décision équitable et efficace sur le marché unique. "Les amendements assurent que les pays participant au MSU ne vont pas dominer indûment le comité de l'EBA", précise le communiqué de presse du Conseil. Il y aura ainsi des mesures de protection pour les Etats membres n’appartenant pas à la zone euro, au moyen de double majorité de votes  pour les décisions de l’EBA sur les standards techniques et de médiation.

Place au Mécanisme de résolution unique

La mise en place du MSU ouvre la voie à un accord pour la mise en œuvre du Mécanisme de résolution unique et la conclusion d’un accord final sur la directive sur la résolution bancaire. "Une meilleure supervision ne fait pas tout. Une Union bancaire requiert une action pour restructurer des banques non viables si nécessaires", a rappelé Michel Barnier qui espère qu’un accord sera trouvé un conseil sur ces deux sujets avant la fin de l’année.

La position "paneuropéenne" du Luxembourg

En marge du conseil ECOFIN, le ministre luxembourgeois des Finances, Luc Frieden, a fait connaître la position du Grand-Duché auprès du commissaire Michel Barnier. Luc Frieden a plaidé auprès de Michel Barnier pour la création d'un fonds de résolution unique, comme le souhaite la Commission européenne.

"Luc Frieden a par ailleurs sensibilisé le commissaire à la gouvernance de la résolution en mettant en avant l'importance d'une solution pan-européenne dans la composition des organes de décision", rapporte le communiqué de presse du gouvernement. Le Luxembourg craint ainsi "un modèle de gouvernance qui reflète les intérêts nationaux des États membres au détriment d'une approche réellement européenne, inspirée par le marché intérieur, dans la mise en œuvre de l'Union bancaire", y lit-on également.

Interrogé par le Luxemburger Wort, Luc Frieden a développé davantage la position du Luxembourg. "Il est essentiel pour les chances de la Place financière, que le Luxembourg garde son mot à dire pour les décisions importantes », a ainsi déclaré Luc Frieden. "Le marché intérieur européen des services financiers a besoin d’une Union bancaire, qui assure que dans toute l’Europe les mêmes règles ont cours et qui assure une plus grande stabilité. (…) Nous avons besoin d’une approche réellement européenne. Nous devons assurer que quelques Etats ne puissent pas prendre des  décisions, qui ont des conséquences négatives pour les autres pays", a aussi dit le ministre.

La question décisive est de savoir qui décide de la résolution. "Il n’est pas envisageable que des grands Etats membres puissent décider avec une majorité qualifiée de fermer une banque ou une filiale bancaire à Luxembourg", a dit encore Luc Frieden selon les propos rapportés par le Luxemburger Wort.

Comme l’a rapporté l’agence dpa dans un article du 14 octobre 2013, divers Etats membres comme l’Allemagne s’opposent à ce que soit laissée à la Commission européenne la décision sur la résolution de la défaillance d’une banque.

Michel Barnier a pour sa part souligné qu’il restait à résoudre les questions des relations entre le pays hôte et le pays d’origine de la banque défaillante, la répartition des votes dans le comité chargé de prononcer la résolution de la défaillance et sur le fonds de résolution de défaillance.